DE LA CITE DES HOMMES… PHILEMON
RICHELIEUX |
LA LETTRE
CATHOLIQUE N°55 DIFFUSION GRATUITE - FAITES LA CONNAÎTRE – 16 NOVEMBRE 2008 - " Est ce qui est ! Obéir à la Vérité pour mieux servir la Charité
" |
DE L’ELECTION DE BARAK OBAMA
De l’élection de Barak Obama :
Tous auront eu pour lui les yeux de Chimène, et auront
vu en lui l’ami idéal, celui sur lequel, en une fougue énamourée, on dépose les
espoirs, faute d’avoir su les construire ou les reconstruire soi-même voire
simplement les préserver.
Si on pose un regard sur cet évènement, du point de vue
du peuple des Etats Unis, pour autant qu’on puisse le faire, nous dirons que
l’élection d’un métis afro-américain est l’aboutissement logique de la mutation
intellectuelle de ce grand peuple, dont il est évident qu’il est
fondamentalement bon malgré la rugosité de son tempérament et ce côté enfant
terrible qu’on lui découvre et qui fait tout son charme. Dans tous les
reportages que j’ai pu suivre, il ne m’est pas apparu un constat de rupture
non, il s’agissait davantage d’un sentiment d’accomplissement, d’un
aboutissement, d’une espérance en vue d’une éclosion qui devait naturellement
se produire un jour ou l’autre. Je n’ai relevé aucun esprit de revanche, ni
aucun triomphe du Noir sur le Blanc.
La citoyenne afro-américaine de cent huit ans est le
témoin providentiel de cet aboutissement.
Non, ce n’était pas les élections de Mitterrand en
1981, ce n’avait rien avoir non plus avec l’effarent comportement de Mme Royale
le soir de sa défaite, comme si M. Sarkozy avait été élu par défaut. La jeune
nation des Etats Unis est avec le Royaume-Uni la plus aboutie des démocraties.
Non, l’élection de M. Obama n’est en rien une rupture et certainement pas selon
le concept français.
Il ne faut pas s’en cacher, cette élection est le pas
majeur et ultime pour faire éclore les fleurs d’une révolution culturelle et
sociologique qui avait commencé dès que le premier esclave noir eut posé son
pied sur les bateaux de la honte qu’ils fussent anglais, espagnols, portugais,
hollandais ou français. Mais il ne faut pas non plus s’aveugler, tous les
problèmes liés aux ethnies ne se régleront pas par magie ; c’est dans
l’amour raisonnable de la nation et la remise au centre de celle-ci du citoyen
en tant que personne aimée de Dieu et substance de l’amour de la patrie que les
solutions surgiront.
Bien certainement, ces quarante dernières années ont
contribué fortement à cette élection encore impensable, il y a 20 ans. Un métis
à la Maison Blanche est la preuve de la maturité démocratique et culturelle de
ce peuple. Cette nation ne cesse de nous
étonner, de nous surprendre. Depuis la Seconde guerre Mondiale, elle aura su
être aux avant-postes de toutes les blessures même si certains d’entre eux
comme l’Irak ne se justifient pas. Ce peuple est grand parce qu’il a cette
enviable capacité à regarder rapidement son histoire en face qu’il finit par
assumer avec une puissance de vérité qui devrait être un exemple pour nous
Européens et berceau de la pensée philosophique. Mon Dieu, il est vrai que
notre Europe est veille !
Mais cet évènement en soi grand n’eût peut-être pas été
aussi rapide à venir, s’il n’avait été porté par un ensemble de facteurs
politiques et sociologiques d’une considérable influence.
L’avènement de l’administration Bush-fils aura permis
la montée de l’extrémisme nationaliste nord- américain, assez semblable, quant
à ses mécanismes, à celles des nationalismes européens de sinistre mémoire,
avec toutefois cette grande différence qu’en Europe les Eglises, les courants
religieux n’en furent pas le moteur, alors qu’aux Etats Unis, cet extrémisme-là
fut majoritairement le fruit d’une perversion religieuse, psychologiquement
très proche des mécanismes fascistes. Ces monstrueux courants religieux[1]
réussirent à forger une idéologie enclose au sein même des républicains,
imposant un inconcevable conservatisme qui se sera longuement nourri de
l’humiliation de la guerre du Vietnam ainsi que de l’effondrement du communisme
et qui eut pour étincelle l’inhumain attentat du 11 septembre. Ces courants
conservateurs extrêmes exalteront un sentiment national idéologique d’un
orgueil quasi suicidaire. Certes, ils contribuèrent à ne pas accélérer les lois
contre-nature et permirent aux courants pro-vie de se structurer en réduisant
les sensibilités extrémistes[2] qui se
révélèrent dans les années quatre-vingt ; cette politique courageuse ne
doit pour autant pas faire écran aux désastres en question.
Il est fort dommage que le sort ait permis de mettre à
la tête de ce pays un homme singulièrement pauvre intellectuellement et
culturellement ce qui ne lui permettait pas de contenir ces extrémismes ;
il en fut leur jouet.
Parmi les désastres internationaux de cette idéologie
nationaliste, le plus marquant, est le reflux de toute sympathie même de
peuples qui ne peuvent qu’avoir de la reconnaissance et une profonde amitié.
Jamais ce peuple, en une si petite période, aura accumulé autant de rejets
certainement excessifs, mais à la mesure des excès exécrables de cette
invraisemblable politique où domina un orgueil nationaliste hors de tous les
sens. Je pense à la date d’exécution de Saddam Hussein, les Etas Unis auraient
dû empêcher que l’exécution ait lieu le jour d’une fête célébrée par les
sunnites.
La guerre en Irak reste frappée par le non-droit,
guerre illicite, que rien ne peut venir justifier, pas même le besoin de
surveiller les richesses pétrolifères puisque depuis la guerre irako-koweïtie,
les Etats Unis ont des bases en Arabie-Saoudite. La guerre actuelle doit son origine dans
cette idéologie nationaliste extrême que ne peut justifier la chute de Saddam
Hussein[3]. Elle aura sans aucun doute gêné la guerre en
Afghanistan qui aurait besoin de plus d’hommes pour venir à bout de ce nid de
terroristes.
Enfin, ce nationalisme exacerbé aura contribué quelque
part à tendre les relations avec la Russie, mais aussi à l’intérieure de
l’Europe vis-à-vis d’elle. Les Etats européens, anciens satellites du bloc
soviétique ont, sans aucun doute, vu dans la politique de cette administration
Bush, la matière à nourrir leur amertume envers la Russie de maintenant et
exaspérer dans le peuple un sentiment d’humiliation.
Sur le plan international, l’administration Bush aura
été un désastre, un facteur majeur de complications, même si du point de vue
stratégique, avec entre autres les radars, elle aura fait montre d’une réelle
lucidité. Le bilan profond de cette
administration dans le domaine diplomatique et stratégique n’apparaîtra pas
avant les quinze prochaines années.
Quant à la politique intérieure, qu’avons-nous à en
dire ? Nous ne sommes pas citoyens de ce pays, chacun à sa place. Il
n’appartient pas à des étrangers de jugers de la politique intérieure d’un pays
dans lequel les principes fondamentaux de la démocratie sont respectés. Que
chacun balaye le seuil de sa porte !
Ce qui se rapporte à la crise financière, on ne peut
guère le reprocher à cette administration, dont assurément la ligne directrice
était de faire confiance. Nous le savons, l’initiative de cette crise, nous la
devons à l’administration Clinton qui semble avoir aggravé la dérégulation,
sans corriger les excès de cette politique initiée par Donald Reggan. De ce
point de vue, la faute de cette crise incombe aux deux partis en présence.
Ne nous y trompons pas, le Président Obama va défendre
les intérêts de son pays, la liste des membres de son équipe semble bien le
confirmer ; parler de rupture au sujet de son élection relève de la
science fiction. Car la rupture ne dépassera pas le fait que ce soit un métis
qui a été élu ; dès le soir des résultats, son discours s’inscrit dans la
continuité de ses grands prédécesseurs.
En matière de politique internationale, la rupture de
bon sens est venue de l’administration Bush, Obama va s’efforcer de reprendre
le bâton du bon sens et du sens universel du bien commun, car il lui faudra
reconquérir les cœurs des peuples des grandes et anciennes démocraties. Il
inaugurera aussi le début d’une attitude de respect des autres, sans doute
développera-t-il une politique de concertation avec ses alliés et mènera-t-il
également, plus par le fait du sort, son peuple à plus d’humilité ; mais
qu’on ne s’y trompe pas, il défendra les intérêts de son peuple, c’est son
devoir.
L’élection d’Obama pose le problème des lois qui
s’opposent à la loi morale naturelle. S’il maintient son projet, les mouvements
blasphématoires et si désolants vont se sentir plus puissants, car soutenus par
le pouvoir fédéral. Il faut espérer qu’il sache temporiser et contenir les
courants les plus durs chez les démocrates qui ont pour tête de fil Madame
Clinton dont nous devons nous réjouir qu’elle n’ait pas été élue. Madame Chirac
qui lui apporta son soutien eût été avisé de se taire sur ce sujet ; il
semble bien que l’âge n’empêche aucune bêtise…
Obama se dit prêt à revoir les lois restrictives sur la
recherche des cellules embryonnaires. Dieu va le laisser s’engager dans cette
voie, et sans doute ira-t-il plus loin ; Dieu fera avec lui ce qu’il fait
avec les responsables européens, il va lui retirer l’assistance de l’Esprit
Saint. Les murs, on se les monte soi-même !
Il n’y aura qu’un mandat pour lui, et on ne s’étonnera
pas qu’il se termine bien plus mal que pour l’actuel Président Bush !
Les Eglises vont se ressaisir et ne rien lâcher face
aux promesses d’Obama ; ne doutons pas que les courants pro-vie continuent
leur action préventive et pédagogique. Il n’y a aucune légitimité à édicter des
lois contre-nature. Ces lois compromettent l’intelligence de la personne, elles
sont en définitive, une menace d’obscurantisme sur toute l’humanité.
Il est évidant que l’humanité est dans une phase de
tous les dangers ; la crise financière et économique est majeure,
profonde, son impacte met à jour tous les maux de notre civilisation, cette
crise va révéler qu’elle dépasse largement le simple effondrement du
néo-libéralisme.
L’ensemble du monde peut encore faire des retours en
arrière, se languir de telle idéologie, de telle forme de gouvernement ou il
peut tout aussi bien se trouver une nouvelle idéologie, comme une pluie acide
venant des courants écologistes, rien de tout ceci n’y fera ! Il est
convoqué progressivement à un rendez-vous historique : celui de sa
conscience face à l’éternité.
Les hommes, les peuples vont devoir s’inventer une
nouvelle solidarité qui traversera les civilisations, les sociétés et les
cultures ; car l’histoire le démontre, jamais l’homme ne revient ni
s’installe dans le passé. Qu’il le veuille ou non, il est un pèlerin, il ne
peut s’arrêter, sa marche est continue.
Le Président Obama ne pourra pas faire l’impasse sur la
nécessaire concertation avec ses alliés et les autres ; les défis à
relever sont si immenses…
Qu’importe qu’il y ait des résistances, il faudra bien
en arriver à une réglementation internationale des marchés financiers, à une
refonte complète des règles économiques dans lesquelles le pauvre comme le
riche aura toute sa place.
Il faut que triomphe un véritable esprit de solidarité
honnête, loyal ; un tel redressement ne passe pas par la victoire d’un
seul homme, mais bien d’une communauté internationale dans
laquelle
résonne le courage moral et intellectuel. Il ne s’agit pas ici d’un idéal, mais
d’une urgence citoyenne.
A la poubelle les idéologies qu’elles aillent rejoindre
le cimetière des orgueils sanglants ; il nous faut de saines et humbles
doctrines.
Les peuples ont besoin de se savoir respectés, aimés,
on ne leur prouvera que par la capacité de leur parler en vérité. M. Sarkozy de
ce point de vue là est un exemple, une réelle rupture pour l’Europe ; le
Président Obama n’a qu’à reprendre en main le bâton des pères fondateurs des
Etas Unis : n’ont-ils pas tracé en vérité l’avenir de ce peuple
bouleversant, audacieux et si généreux de lui-même ?
L’avenir de l’homme passe par l’humilité et l’ouverture
de son cœur et de son intelligence à la grâce divine ; tant qu’il ne le
voudra pas, alors tout ce qu’il fera produira des résultats qui se retourneront
contre lui ! Il n’est qu’à voir l’historique de toutes les réformes
économiques et sociales depuis le second choc pétrolier, elles finissent toujours
par être contre productives.
Que peuvent l’homme et sa société sans Dieu ?
[1] Il s’agit des mouvements évangélistes et soutenus minoritairement par le courant intégriste catholique.
[2] Certains de ces courants iront jusqu’à assassiner les médecins avorteurs.
[3] Etant donné la pauvreté intellectuelle de Bush, on peut penser également qu’à son sujet, cette guerre, pourrait avoir été également motivée par le fait que son père n’ait pu aller jusqu’à Bagdad, lors du premier conflit. Il est donc possible que l’affection envers son père ait été un facteur non négligeable dans cette décision.