LA LETTRE CATHOLIQUE N° 31

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FIERS D’ETRE DE L’EGLISE CATHOLIQUE APOSTOLIQUE ET ROMAINE

 

NOVEMBRE-DECEMBRE 2006 DIFFUSION GRATUITE - FAITES LA CONNAÎTRE

 

SOMMAIRE

EDITORIAL :

REQUIEN IN PACEM... 2

Une parole de vérité pour une main de charité…... 3

De l’Air de la Calomnie…... 5

De La Liberté Liturgique…... 8

 

DISCOURS DE RATIBONNE : 9

 

LA TRIBUNE LIBRE:

New-York, 11 Septembre 2001. 15

LA CAMPAGNE PRESIDENTIELLE. 17

DE L’IMMIGRATION.. 19

 

LES SENATEURS.. 21

 

BREVES D'ACTUALITE:

‘ LA BOURDE DU PAPE ? !’ 28

LA RELIGION MUSULMANE. 30

DE LA BOMBE ATOMIQUE ! 33

S I D A.. 34

 

LA VIE DES MOTS:

Légitimité - Autorité - Pouvoir………………………………..35

 

RADIOLOGIE DE LA POLITIQUE:

CHRISTINE BOUTIN.. 39

 

 

HISTOIRE DE L'EGLISE:

L’EMPIRE D’ORIENT, UN EMPIRE CHRETIEN.. 40

 

MEDITATION DE LA BIBLE:

Le Crime de Caïn sur Abel le Juste. 61

 

L'APOCALYPSE:

LE SIXIÈME JOUR ET L’ANTÉCHRIST.. 70

 

 

 

 

 

 

 

 

« Quand les évêques se comportent comme des filles,

c’est aux filles de se comporter comme des évêques. »

                                                                                  Jacqueline Pascal.

 

 

 

 

BENOIT XVI

 

 

 

 

EDITORIAUX :

 

 

REQUIEN IN PACEM

 

Monsieur Marcel Gerbault

Curé-Archiprêtre de la Cathédrale de Perpignan.

 

Nous tenons à lui rendre hommage pour l’intérêt qu’il portait à notre travail.

Il fut aussi l’un des très rares prêtres qui aura été l’une des trois lumières qui vinrent éclairer les ténèbres alors que nous pensions qu’elles allaient célébrer leur triomphe sur notre maison.

Il fut d’une étonnante fidélité sacerdotale sans jamais rien concéder à la vérité dont il se savait devoir être un témoin résolu et particulièrement brillant. Plus encore que sa qualité intellectuelle, il sut être d’une étonnante disponibilité et d’une générosité d’accueil sans défauts.

Dans un diocèse appauvri de Foi, d’Espérance et surtout de Charité, Monsieur Gerbault fut un témoin des vertus théologales, une leçon tranquille pour beaucoup de ses confrères et les milieux laïcs trop peu souvent à leur place.

Il accueillait quiconque frappait à sa porte, il n’excluait personne et surtout pas ceux qui pouvaient lui être opposés.

Monsieur le chanoine Marcel Gerbault décéda dans la soirée de la Toussaint. Il se laissa habiter par une obsession d’amour : le salut des âmes.

Nous pleurons un prêtre qui sut être pour nous un père alors que le diocèse s’efforçait de regarder ailleurs.

Pierre-Charles Aubrit Saint POL

 

 

Une parole de vérité pour une main de charité…

Pierre-Charles Aubrit Saint Pol

 

Le discours de Benoît XVI à Ratisbonne est le fil conducteur de tout son pontificat. Nous entrons dans la progression d’une Église plus d’épouillée, une Église de l’intériorité… Nous nous engageons dans une ascèse spirituelle, intellectuelle pour une pastorale qui s’installe résolument dans la lumière de l’eschatologie, des fins dernières qui furent occultées progressivement dès le début de la crise moderniste, occultation renforcée par la crise qui suivit le Concile Vatican II…

 

C’est sans doute ce qui explique la finalité du décret que promulguera le Saint Père sur la liturgie tridentine en novembre, de façon à lever tous les obstacles psychologiques et affectifs qui peuvent encore empêcher l’unité des catholiques. Le reste relève de la charité, du développement de relations fraternelles qui, par l’ascèse de la prière, peuvent seules faire s’effondrer les orgueils désespérés.

Le parachèvement du Concile Vatican II se réalise dans cette perspective. C’est dans le creuset de ce pèlerinage que les pauvres de Dieu se rassembleront et qu’ils affronteront victorieusement les esprits du monde…

Et, ce sera le Jour du Seigneur par la victoire de l’Immaculée voulue par Dieu le Père.

 

Tout le bruit fait par les intégrismes musulmans et certains de leurs États, leurs menaces et condamnations ne sont que l’expression d’une inquiétude métaphysique pour laquelle ils n’ont aucune clef, sinon la plus servile : la violence.

Soit, ils déchaînent leur violence et s’anéantissent dans leur refus tragique !

Soit, ils accueillent la vérité dans toute sa lumière et ils vivront dans la lumière du Visage qu’ils haïssent le plus au monde en ce moment et depuis l’origine !

 

(Les musulmans nous traitent d’impurs parce que nous croyons en un Dieu Trinitaire, nous nous n’insultons pas les musulmans de leur croyance.)

 

Cette analyse vaut pour tout le reste de l’humanité qui s’enfonce dans une décadence sans précédent. Quel choix fera-t-elle : la lumière ou le désespoir du blasphème ?

 

Le discours de Ratisbonne fracture des portes jusque maintenant closes par la puissance des ténèbres. Il appartient à tout catholique, par les moyens de sa nature et les grâces de Dieu, de s’engager sans crainte dans celles-ci irrémédiablement ouvertes.

 

Nous devons demander la grâce de réapprendre à dire OUI à Dieu pour dire NON au monde.

 

Tous les intellectuels chrétiens, surtout catholiques mais également les autres, ont l’obligation morale de saisir l’opportunité de ce discours pour inviter les intellectuels musulmans modérés sur le terrain de la recherche intellectuelle en laissant aux religieux la responsabilité de leur charge. Nous devons être les alliés des intellectuels musulmans qui souhaitent délivrer l’Islam des pesanteurs et des archaïsmes sources de ses violences.

Les musulmans doivent comprendre pourquoi leur religion balance constamment entre repli sur elle-même et agression envers le monde extérieur ? Pourquoi génère-t-elle, en permanence, des intégrismes si contraires à la dignité de l’homme et à la Gloire de Dieu ?

 

Allons-nous répondre à l’appel de Benoît XVI ?

L’histoire nous jugera et Dieu également…

 

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De l’Air de la Calomnie…

Pierre-Charles Aubrit Saint Pol

 

 

 

 

L’une des caractéristiques de la médiocrité de notre époque est la pratique de la calomnie…

Elle est l’arme ultime, avant la violence physique ou après elle, de ceux qui ne désirent pas la grandeur, tant ils ont à cœur d’être rassurés. Ils projettent sur ceux qui naissent chaque jour les déjections de leur médiocrité, car eux se contentent de vivre.  Ces esprits chagrins ont un constant besoin de se rassurer, tout leur fait peur, surtout de ne plus pouvoir être ce que d’autres sont parce qu’ils ne l’ont jamais voulu. Comme de petits Caïn, ils ne supportent pas le rayonnement des Abel. On tue comme on peut…

 

L’air de la calomnie s’entonne en tous lieux, en tous milieux. Quelle tristesse que de le trouver là où il ne devrait pas y être, dans l’Église !

 

Dans notre diocèse, que caractérise une désertification de la charité, ne cesse d’être entonné l’air de la calomnie. Il s’amplifie et se répète d’autant plus que se font ressentir les effets d’une orientation pastorale désastreuse. A son sujet, il nous faut faire effort de beaucoup d’ironie pour ne pas désespérer ni pleurer autant de souffrance que de rage.

Ils ont mis en œuvre une puissance si destructrice qu’ils n’ont plus d’autre possibilité que la fuite en avant faute de pouvoir revenir à l’aveu…

 

Devant la faillite d’une pastorale ‘d’apostasie pratique’, ils accablent de calomnie les pasteurs précédents et éloignent ceux qui avaient eu le bon goût et la charité d’en être les collaborateurs heureux.

 

Ceux qui aujourd’hui ont le pouvoir vers lequel ils languissaient comme enfants devant la vitrine d’une confiserie en carême, car ils en étaient tenus éloignés par une inspiration sage, se comportent devant leur propre désastre en vieilles filles. Ils s’émoustillent du brin de paille qu’ils se hâtent d’expédier par vent de Tramontane par-dessus le moulin à vent comme il se doit. On assiste à une si puissante déferlante de ronrons et de proutes soyeux que l’on y accorderait quelque crédit si on avait la mémoire défaillante.

 

Nous sommes saturés d’un climat digne du temps des soviets tant sont nombreuses les dérives d’un autoritarisme mesquin, méchant et enfantin qui blessent profondément notre diocèse…

 

Est-il dans l’ordre de la charité de rester sur la réserve pour laisser à la Providence la part qui lui revient. Faut-il de nouveau exposer publiquement une réalité fortement chargée de honte, prendre sur soi la mise à jour de scandales aux ondes d’épouvantes ?

 

Rien n’est plus héroïque que de témoigner de sa fidélité à Rome, au Magistère et au Concile Vatican II dans notre diocèse ; c’est à peine si on vous accorde la communion parce que vous n’avez pas l’attitude ‘moderne’ pour la recevoir.

 

Nous avons un évêque qui n’est pas un père et un conseil presbytéral atteint de toutes les formes d’idéologies et d’un anti-romain si enfantin qu’il en est risible.

 

La fidélité à l’Église demande un dépassement de soi quotidien. Nous serons avec Elle sur le chemin du Golgotha et bientôt avec Elle sur la Croix de l’Époux.

Il en n'est pas moins vrai qu’aujourd’hui notre église locale n’est qu’un corps blessé, infecté qui se prépare à vivre des réformes désastreuses comme la suppression des cures…

 

Le triomphe de l’Église, c’est le triomphe du pauvre à la manière du Pauvre…

 

P.S. : C’est avec consternation que nous constatons, qu’en dehors de Monsieur le cardinal, son éminence, Jean-Marie Lustiger et Monseigneur l’évêque de Tarbes-Lourdes, l’ensemble de l’épiscopat français s’est distingué par un silence indigne quant à la polémique du discours de Ratisbonne. Il ne manque pourtant pas de bons évêques, mais comme de vieilles filles ils se taisent…

Paul VI, à leur sujet, aimait à reprendre les paroles de Jacqueline Pascale : Quand les évêques se comportent comme des filles, c’est aux filles de se comporter comme des évêques…. Quel travail ne nous reste-t-il pas à faire !

Où sont nos évêques renouvelés dans l’esprit de l’Immaculée ?

 

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De La Liberté Liturgique…

Pierre-Charles Aubrit Saint Pol

 

 

 

 

Nous avons appris que le pape Benoît XVI s’apprêterait à libéraliser la messe Tridentine. Nous sommes heureux de cette décision, car elle contribuera à faire revenir dans l’unité des catholiques qui, jusqu’à nos jours, depuis la réforme liturgique, ne trouvaient plus leur place.

Nous nous souvenons de quelle manière cette réforme fut appliquée en l’Église de France et certaines autres de part l’Occident. Les blessures gratuitement infligées, les humiliations, le constant mode accusatif utilisé et aussi les libertés sacrilèges prises dans cette période et encore maintenant : les vexassions envers les catholiques qui osent recevoir le Corps du Christ à genoux, sur la langue ou quand ils font une simple génuflexion pour marquer leur adoration et pour ne pas freiner la procession ou pour ne pas inciter le célébrant à un geste d’agacement. Enfin, comment ne pas souhaiter ce retour qui empêchera des évêques de se comporter en chevalier de la dictature de la médiocrité, ils y réfléchiront à sept fois avant d’expulser des communautés qui ne faisaient qu’appliquer justement la réforme liturgique. 

Il est certain que cette décision du Saint Père sera très male ressentie par notre épiscopat, car ils se doutent bien que cette liberté liturgique revenue, il y aura progressivement correction des orientations liturgiques post-conciliaires et pastorales.

Nos évêques, pour ceux du-moins qui ont un vrai souci de l’Église et du salut des âmes, accueilleront cette disposition comme une invitation à la réparation envers nos frères blessés et aussi trouveront-ils là l’opportunité de corriger les orientations pastorales. Ne convient-il pas de veiller à ce que chacun retrouve sa place à la Table de Dieu ?

 

Quant à nos frères traditionalistes ou intégristes, ils ne doivent  pas recevoir cette disposition comme une victoire, mais une main de charité, une offrande d’amour. Qu’ils soient humbles, qu’ils acceptent d’accompagner l’Église dans les épreuves présentes et à venir. Qu’ils convertissent leur mentalité et se mettent dans un souci de charité à la disposition e toute l’Église, de leurs frères qu’ils rejoignent dans la communion. Qu’ils ne prêtent pas le flanc aux polémiques ! Ne dispersons pas nos forces, soyons unis pour faire face aux délires du monde… 

 

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DISCOURS DE RATIBONNE :

 

UNIVERSITE DE RATISBONNE

 

REFLEXIONS - ESPERANCE

 

Le père Samir Khalil Samir,

professeur d’islamologie et de la pensée arabe à l’Université Saint-Joseph (Beyrouth)

Le projet proposé par Benoît XVI

 

( Cet article parut sur le site : EUCHARISTHIE MISERICORDIEUSE, avec l’aimable autorisation des responsables : Mme et M. Francart )

 

( Ce texte que nous vous présentons conclut et résume parfaitement le discours de Ratisbonne de Benoît XVI et ouvre toutes les perspectives pour l’Église et tous les intellectuels de bonne volonté. Ce texte fera autorité dans ce débat, car il est écrit par un arabe prêtre catholique… La Providence a l’art achevé de l’humour et du sourire, n’est-ce pas cela aussi que la charité intellectuelle ! ) P.C. .A. St. P.

Il se passe quelque chose d’absurde dans le monde. Absurde et effarant. Une personne respectée de tout le monde, d’une profondeur intellectuelle et spirituelle incontestée, Père spirituel de plus d’un milliard d’hommes et de femmes, mis sur le banc des accusés, abaissé, insulté, son effigie brûlée pour avoir tenu une conférence magistrale dans son ancienne université sur le rapport entre foi et raison. Pareil déferlement de haine et de violence n’est pas digne de la religion de paix que veut être l’islam.

            Mais le plus effarant, c’est que ceux qui s’acharnent le plus contre lui sont ceux qui n’ont pas la moindre idée de ce qu’il a dit ou fait, qui n’ont pas lu sa conférence objet de tous les maux. Ils se sont contentés de lire (ou d’entendre rapporter) deux ou trois phrases, extraites hors de leur contexte. Et le comble du tragique, c’est qu’ils protestent parce qu’un auteur du XIVe siècle accuse leur fondateur d’avoir donné licence à ses adeptes d’user de violence pour amener les gens à sa religion. Ils protestent d’être non-violents par des actes de violence.

           Face à cette violence, l’homme de Dieu a dit combien il souffrait d’avoir donné à ces foules motif de souffrance !

           Tout cela ne serait pas grave si ces personnes n’étaient pas nos frères, et nos frères les plus proches ! Comment ne pas souffrir avec eux de leur propre souffrance, de leur propre rage ! Comment ne pas souffrir avec les millions de musulmans sincères et authentiques qui assistent à cette auto-destruction. Car, en vérité, à qui profitent ces manifestations ? uniquement aux ennemis du monde musulman. Une fois de plus, comme si l’affaire des caricatures ne suffisait pas, le monde musulman a donné au monde la preuve qu’il ne peut réagir avec calme et raison, lui qui affirme et répète que l’islam est « la religion de la raison », à la différence du christianisme si chargé de « mystères » incompréhensibles et déraisonnables !

           Est-ce là un acte de foi, ou un acte de raison ? Car tel est bien l’objet de la conférence magistrale que Benoît XVI a prononcée dans son ancienne université de Regensburg. Il s’agissait là d’une réflexion sur le rapport de l’Occident à la religion en général, et en particulier avec l’islam. Le pape Benoît XVI constate que l’Occident se ferme toujours plus à la dimension religieuse, alors que les trois-quarts de l’humanité vivent de cette dimension religieuse. Il propose une critique de la raison occidentale, de la raison positiviste, faite de l’intérieur. Une critique qui ne rejette rien des acquis de la Renaissance et de l’Illuminisme ( Aufklärung), mais qui en rejette les excès. Ce faisant, l’Occident est en passe de se fermer à toute la dimension religieuse qui anime d’immenses peuples, dont les musulmans et les chrétiens africains, asiatiques ou orientaux. Il critique cette raison séculariste qui étouffe l’Esprit.

           Ce faisant, le Père des chrétiens prépare le terrain à tous ceux qui croient à la dimension surnaturelle et aspirent à une vie surnaturelle, à tous ceux qui ne veulent pas être impitoyablement réduits à être des animaux rationnels mais non spirituels, comme si l’on pouvait séparer les deux, comme si le concept de logikos (nâtiq) ne signifiait pas, dans la pensée grecque comme dans la pensée arabe, à la fois l’un et l’autre !

           Le christianisme a eu la chance d’être enraciné, dès le départ, dès le Nouveau Testament, dans la culture grecque, et d’avoir ses racines profondes dans la tradition biblique. Il a eu la chance de pouvoir puiser à la fois dans la rationalité grecque et dans la spiritualité biblique. Le monde musulman au Moyen-Age, entre le IXe et le XIIe siècles, a eu également la chance de vivre la même réalité, en plongeant ses racines dans la spiritualité coranique et la soumission religieuse à Dieu, et en puisant à larges mains dans la rationalité grecque grâce aux chrétiens syriaques qui vivaient en son sein et lui ont transmis tout ce patrimoine.

           Mais tandis que le monde musulman a pratiquement perdu le lien avec sa grande tradition médiévale, qui avait donné naissance à cette extraordinaire floraison que l’on a appelée ’la Renaissance abbasside’, laissant le religieux dominer totalement le rationnel jusqu’à aboutir au XIVe-XVe siècles à ce que l’on a appelé ’la Décadence’ (’asr al-inhitât), le monde chrétien en Occident a poursuivi son parcours cherchant à maintenir sans cesse ce lien indissociable entre foi et raison, jusque ce que la bourrasque du XIX e siècle n’ait initié cette lente décadence spirituelle.

           Notre monde arabo-musulman n’a qu’un désir : faire vivre en harmonie la foi musulmane authentique dans une modernité ouverte au spirituel. Mais cette modernité se présente à nous comme étant un Occident dur et sec, possédant une intelligence supérieure vidée de son âme. Cette modernité-là nous n’en voulons pas et avec raison ! Et alors, la tentation est forte de se réfugier dans le religieux, dans le religieux privé de tout esprit critique, d’autant plus a-critique que l’Occident a fait de la critique son cheval de bataille. Même la liberté, ce don magnifique de Dieu à l’Homme, est parfois dénaturée, et peut facilement devenir « un prétexte pour la chair », comme le dit saint Paul dans sa magnifique épître aux Galates (5,13). Alors nous nous sommes détournés aussi de la liberté. Sans raison critique, sans liberté, que nous reste-t-il encore d’humain ?

           C’est pour offrir une issue à cette impasse que Benoît XVI a tenu ce discours étonnant. Il critique cette culture occidentale dans ce qu’elle a de néfaste et de mortifère, pour l’ouvrir à l’Esprit. Il critique aussi notre civilisation musulmane dans ce qu’elle a de trop fondamentaliste et d’acritique, qui peut conduire à la violence, dans ce qu’elle a de manque de liberté. Mais cette critique n’est pas là pour écraser l’autre ; elle se fait discrètement, dans un débat courtois, qui évoque les Majâlis de Baghdad, où chacun exposait librement ses opinions, pourvu qu’elles soient basées sur la raison, le ’aql (on pense à la magnifique description qu’en donne au Xe siècle cet andalou choqué qu’est Humaydi).

           Ce n’est point un défi politique qu’a lancé Benoît XVI, et pas davantage une provocation gratuite. C’est une réflexion sérieuse et fraternelle, qui, accueillie avec calme et sérénité, peut nous aider à voir plus clair dans les causes de notre enlisement. N’est-il pas vrai que nous souffrons du manque de liberté dans nos pays ? N’est-il pas vrai que nous souffrons du manque de respect de la personne et de la dignité humaines ? N’est-il pas vrai que nous souffrons de la violence que déchaînent certains des nôtres et qui nous éclabousse tous ?

           Sous certains aspects ce discours s’applique autant à nos frères juifs comme à nos frères chrétiens. Jusques à quand allons-nous régler nos problèmes internationaux par la guerre et la violence ? N’est-ce pas assez de deux générations humiliées en cette Terre sainte qui est de tous ? La violence peut-elle se rattacher de quelque manière à Dieu, alors qu’elle est irrationnelle, comme le disait Manuel Paléologue ? alors qu’elle nous déshumanise ?

           Il y a, dans le discours de Benoît XVI, un projet de dialogue planétaire, d’un dialogue entre toutes les cultures et les civilisations, entre toutes les religions et les formes variées d’athéisme. Un projet qui ne peut être basé sur une religion (quelle qu’elle soit), ni sur une culture, mais sur la Raison et l’Esprit en tant que c’est ce qui distingue l’Homme des autres animaux. Je pense à ce merveilleux traité d’éthique du Xe siècle, le Tahdhîb al-Akhlâq de Yahyâ ben ’Adi, qui s’ouvre par cette phrase : « Sache que ce qui distingue l’homme de tous les animaux c’est la pensée et le discernement ( fikr wa-tamyîz) ».

           La critique que fait Benoît XVI au monde occidental, c’est pour que nous puissions trouver un espace de liberté à l’intérieur, tout en gardant notre spécificité de croyant : « Cette tentative (…) de critique de la raison moderne de l’intérieur, n’inclut absolument pas l’idée que l’on doive retourner en arrière, avant le siècle des Lumières, en rejetant les convictions de l’époque moderne. Ce qui dans le développement moderne de l’esprit est considéré valable est reconnu sans réserves : nous sommes tous reconnaissants pour les possibilités grandioses qu’il a ouvertes à l’homme et pour les progrès dans le domaine humain qui nous ont été donnés.(…). L’intention n’est donc pas un recul, une critique négative ; il s’agit en revanche d’un élargissement de notre concept de raison et de l’usage de celle-ci.

           Car malgré toute la joie éprouvée face aux possibilités de l’homme, nous voyons également les menaces qui y apparaissent et nous devons nous demander comment nous pouvons les dominer. Nous y réussissons seulement si la raison et la foi se retrouvent unies d’une manière nouvelle, et si nous franchissons la limite auto-décrétée par la raison à ce qui est vérifiable par l’expérience, si nous ouvrons à nouveau à celle-ci toutes ses perspectives . Ce n’est qu’ainsi que nous devenons également aptes à un véritable dialogue des cultures et des religions, un dialogue dont nous avons un besoin urgent ».

           Tel est le projet qui nous est proposé, un projet humaniste. Car Benoît XVI est conscient des maux qui minent la société occidentale : « Dans le monde occidental domine largement l’opinion que seule la raison positiviste et les formes de philosophie qui en découlent sont universelles. Mais les cultures profondément religieuses du monde voient précisément dans cette exclusion du divin de l’universalité de la raison une attaque à leurs convictions les plus intimes. Une raison qui reste sourde face au divin et qui repousse la religion dans le domaine des sous-cultures, est incapable de s’insérer dans le dialogue des cultures ».

           N’est-ce pas un peu ce projet que nous recherchons ? Certes, il y a eu maladresse de la part de ce Père. Peut-être était-il tellement pris par la dimension académique de son discours qu’il en oublia les retombées politiques possibles ? Peut-être ne s’est-il pas encore fait à sa nouvelle fonction de pape, avec ce qu’elle implique aussi de fonction politique ? Je pense qu’il a cependant quelque chose à nous dire et qu’il serait raisonnable de lui laisser sa chance. Il est sûr en tout cas, comme il l’a dit ce dimanche à l’Angélus, qu’il ne voulait blesser personne. Et si quelqu’un s’est senti blessé, qu’il exerce cette vertu du pardon, la plus noble de toutes, celle qui nous fait semblable à Dieu notre Père, al-Rahmân al-Rahîm.
          
wa-s-salâmun ’alâ man ittaba’a l-hudâ !

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LA TRIBUNE LIBRE

Théodulfe Soplataris

New-York, 11 Septembre 2001

 

11 SEPTEMBRE NEW-YORK

 

 

Quand l’humanité rejoint une fois de plus l’infra humain ! 

 

 

 

« En cheval    d’orgueil… 

Il fut un ciel bleu sans nuage…

La puissance espérait en elle-même

Il fut un ciel bleu endeuillé…

Il faut espérer ailleurs ou de sa puissance

désespérer                   

En cheval d’orgueil…

La civilisation touchée se souviendra de                                  

son talon »

                  (L’Ermite des temps nouveaux)

 

Un anniversaire dont on se serait bien passé,

Un événement pour quel profit… ?

Les administrations successives informées de la probabilité d’un attentat d’envergure n’y attachèrent aucune importance ! Ce qui était évitable arriva. Pourquoi ? Parce qu’il le fallait ! Effroyable réponse et nous n’envoyons aucune autre.

Nous sommes en présence d’un des visages du mal qui rejoint le long cortège des abominations humaines. Un visage d’effroi… Il frappe aveuglément, l’innocence n’est pas épargnée ! Il frappe au Nom de Dieu, de quel Dieu ?

Depuis l’Âge Moderne, la civilisation se développe dans un progressif mais radical rejet de Dieu. Elle n’a que du mépris pour la vie. Elle croît dans le dédain des sourires et des larmes. Elle s’est piégée dans un narcissisme hypertrophié. Elle a chassé l’esprit de pauvreté, elle s’est endeuillée de toute espérance, elle s’est ouverte en une gourmandise compulsive : l’espoir… Son chant est funèbre.

Le peuple des États-Unis par cette terrible épreuve peut retrouver en lui les moyens de se reconnaître, de prendre le risque de la conversion. N’est-il pas sollicité à l’humanité ! Contemple ta fragilité. Retrouve le chemin de ton cœur, expose-le à l’attention de Dieu.

Il est regrettable que l’administration Bush se soit crue obligée de satisfaire aux caprices de son Président qui a vu là l’occasion de parachever l’œuvre de son père. Il engagea son peuple en Irak, en dehors du droit international. Cette décision rend illisible l’action en Afghanistan et les mesures anti-terroristes.

Le peuple des États-Unis est l’un des plus handicapés des veilles démocraties et il ne possède pas le recul historique de l’événement comme l’ont les autres nations. Clemenceau disait à leur sujet : Les États Unis ont quitté la violence pour tomber dans la décadence sans passer par la civilisation.

Il n’y a pas véritablement de culture américaine, il n’y a pas de civilisation propre au peuple des États-Unis. Depuis plus d’un siècle, ils ont la suprématie sur la Terre et sont possédés par un activisme irrationnel. Ils ne se pausent jamais. Il faut des pauses pour permettre à une civilisation d’éclore.

Les États-Unis sont la tête de l’empire romain moderne décadent et tragique.

 

« O peuple si généreux, si beau…

Qu’as-tu à l’âme pour ne plus savoir t’aimer ?

A quel dieu infernal as-tu abreuvé tes espoirs…

Immolé tes espérances… 

Arrête de conquérir le monde !

Deviens le conquérant de ton cœur ! »

                                                     ( L’Ermite des temps nouveaux)

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LA CAMPAGNE PRESIDENTIELLE

 

Théodulfe Soplataris

 

 

L’URNE A VOTRE CHOIX !

 

 

Tous les partis politiques viennent de révéler les grandes lignes de leur programme. Tous restent dans une logique idéologique avec des nuances. Il faut souligner qu’aucun d’entre eux ne rompt avec la culture révolutionnaire, ce qui rend difficile la lisibilité des discours et leurs gestuelles au regard de la situation réelle pas même les partis royalistes. Ils devraient pourtant renouer avec la mémoire historique, car quand la Troisième République voyait la France en danger, elle savait devenir royale et la sauver…

La constitution de la Cinquième République pourrait bien être la cause structurelle d’une succession d’incapacités, d’une affligeante incapacité à permettre au peuple de France de redevenir lui-même.

Cette république est sclérosée, elle dévoie et stérilise toutes les générosités, les énergies. Elle n’est plus en capacité de maintenir et encore moins de renouveler les espoirs légitimes du peuple.

Aucun parti politique n’a inscrit dans son programme une disposition qui permettrait de favoriser la vie, de contrer l’IVG. Et aucun d’entre eux ne dit initier une courageuse et réaliste politique familiale. Il semble que sur ce point, un interdit empêche de fracturer cette porte. Ce blocage pathologique ne s’explique qu’à cause des restes pourrissants des idéologies révolutionnaires. Ils continuent de nourrir faussement des esprits chagrins et une malignité dangereuse parce qu’incapable de vérité.

Il y a trois mois, un proche collaborateur de Philippe de Villiers annonçait que son parti inscrirait dans son programme un chapitre sur une politique favorisant la vie en vue de contrer les désastres de l’IVG. Après leur université d’été, il n’en fut rien. Interrogé sur ce point, on fit savoir que sans être spécifiquement inscrit au programme ce projet n’était pas rejeté mais ferait partie d’une politique sociale et familiale d’ensemble. C’est prendre les Français pour des benêts. Il est évident qu’une telle orientation serait un handicap pour son élection, mais bien plus encore pour sa collaboration avec le probable gouvernement de M. Sarkozy. Des informations de sources autorisées, entre autres la journaliste Brossolette, annoncent cette éventualité. Le refus du président de l’UMP d’opposer un candidat à de Villiers pour les législatives semble annoncer un marchandage qui rend risibles les effets de manche et les diatribes contre Sarkozy.

Si l’effacement de 250 000 sourires officiellement recensés, chiffre qu’il faut multiplier par trois ou quatre ne pèse rien sur les ambitions politiques, alors aucun de ces candidats ne vaut notre vote, quelle que soit la qualité de son programme.

Lorsque l’on se présente comme catholique, on se doit d’être conséquent dans ses options politiques. Dieu ne s’exclue pas de la cité. Cette situation révèle la dictature idéologique, elle contredit les grandes affirmations démocratiques. Et l’âne en rit beaucoup !

Si on est impuissant à décider devant les problèmes majeurs que sont la famille, la vie, les manipulations biogénétiques, on ne peut pas dans ce cas prétendre incarner les espoirs d’un peuple.

Nous sommes en présence d’un personnel politique sans morale, sans grandeur, sans noblesse. Un personnel politique de l’impuissance et du mensonge.

Le sourire à naître est plus important que le calcul politicien qui ne pèsera pas au jugement dernier.

Il n’y a plus de légitimité pour nos politiques, il ne faut donc pas leur donner par notre vote une assise légale… Il n’est plus possible pour un chrétien, pour un homme véritablement de prière de négliger les enjeux moraux. Nous ne pouvons être complices d’une aussi vertigineuse décadence.

Ne soyons pas au chevet d’un régime pourri… Laissons le fruit gâté tomber…

Lisez Léon Blois, Bernanos, ce furent des esprits religieux, ils ont prophétisé notre époque…

Nous sommes sous la dictature de la médiocrité. Il ne faut plus se taire. Redevenons des témoins, nous le devons à nos enfants…

 

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DE L’IMMIGRATION

 

Théodulfe Soplataris

 

 

 

 

La Terre est à toute l’humanité, sa générosité, sa difficulté sont offertes à tous sans restriction de culture, de religion.  

L’exploitation de la Terre est liée à la vie de l’homme, liée à tout vivant. Il est dans l’ordre naturel et surnaturel que l’homme domestique la création dans tous ses ordres : minéral, végétal, animal et humain. L’homme est le couronnement naturel de la création, le Christ est le couronnement surnaturel de l’homme et l’aboutissement de toute la création.

Il est dans l’ordre de la nature humaine blessée par le péché originel que l’homme possède une part de cette Terre par son travail. Cette possession lui importe, car par elle il manifeste son identité sociale, culturelle et religieuse. Ces conditions sont nécessaires à la reconnaissance mutuelle entre les personnes. La propriété est un droit naturel qui ne peut être soustrait à l’homme qu’au ciel. La pauvreté évangélique ne soustrait en rien le droit à la propriété. Réduire la pauvreté évangélique au seul domaine des biens matériels, c’est n’avoir rien compris aux béatitudes et porte les germes de bien des déviances.

La propriété individuelle est, de part sa nature, dans une logique sociale et économique. Il est donc normal que son évolution se soit étendue du foyer à la patrie. Il fut logique que cette évolution s’accompagna d’une identité culturelle, religieuse et politique spécifique. Il est tout aussi naturel que cette identité soit défendue, protégée contre l’envahisseur, contre toute forme d’envahisseur et tout mode.

Il est pourtant dans une logique naturelle que le pauvre soit admiratif devant une riche vitrine et qu’il tende à pouvoir un jour s’en saisir. Comment s’étonner que les citoyens de pays pauvres soient attirés par les pays riches ? On ne peut détourner le cours naturel de la vie même chez un être raisonnable. L’immigration ne pose de problèmes que sur deux points essentiels : les pays dit riches n’ont pas une richesse extensible, si dans le pays d’accueil il y a des pauvres en grand nombre, des problèmes essentiels comme le logement, il n’est pas raisonnable de continuer d’accueillir l’émigrant.

Second problème : y-a-t-il chez l’émigrant une volonté réelle d’aimer le pays d’accueil et son peuple ? Y-a-t-il chez lui une volonté explicite de s’intégrer, d’accepter telle que se présente la société, de ne pas la juger ni la condamner. Car la moindre courtoisie dans un pays d’accueil, c’est de le respecter et d’attendre de le connaître et d’en faire partie avant d’ouvrir sa gueule. Depuis quand crache-t-on dans la soupe de celui qui vous offre de partager son pain et son travail ?

Le problème moderne de l’immigration vient des émigrants de confession musulmane. Un certain nombre d’entre eux viennent chez nous dans l’idée d’imposer leur foi et leur loi et de cela il ne peut en être question. Si tu n’aimes pas le pays qui t’accueille alors va-t-en ! Si tu n’aimes pas ce pays, c’est que tu n’as jamais voulu l’aimer, mais tu veux l’asservir, le conquérir !

Face à ce réel problème, nos politiques ont été soit d’une grande lâcheté et le sont toujours, lâcheté criminogène, soit d’une maladresse et d’un concept archaïque inacceptable. Le problème demande un traitement humain, mais également l’application stricte de la loi. Il est claire que l’idéologie aussi généreuse et enfantine qu’elle est, n’est d’aucun secours. Le règlement se trouve dans une meilleure répartition des richesses et dans une assistance aux peuples pauvres avec une pression de vigilance sur les politiques des États concernés. Les crispassions fictives menées par les groupes de pression n’apportent aucune solution et c’est à se demander si on ne recherche pas à développer la souffrance pour se forger une bonne conscience, le retour de la gauche caviar…L’indécence est cousine de l’immoralité…

Il est à craindre que la politique de l’immigration menée par l’actuel gouvernement, par son flou et son illisibilité, ne finisse par produire des effets pervers sur l’ensemble du peuple de France et attiser des incompréhensions à hauts risques…

Ce n’est pas parce que l’on assène des vérités de bon sens qu’on initie nécessairement une politique de bon sens ; M. Zarkosy donne de plus en plus l’impression d’un bateleur dont on ne comprend plus la direction de sa gestuelle… Son action se brouille de plus en plus et sa personne semble s’estomper derrière un voilage qui ne rassure personne.  

 

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LES SENATEURS

JEAN PHILOPON

 

MAITRE DE CONFERENCE A L’UNIVERSITE OCCIDENTALISTE ET CHRETIENNE DE PATAGONIE

 

( I )

 

LES PIPES !

 

 

Maître Thomas, vigneron, reçoit ses amis : maître Jules, boulanger ; maître Henric, boucher ; maître Léon, fromager ; maître Augustin, le poissonnier ; maître Scoty, ferronnier ; maître Dominique, bourrelier. Maître Thomas les reçoit dans sa propriété ‘Les Trois Chênes’. Les villageois, du bon village d’Agorarion que domine le Canigou, les surnomment « les sénateurs »

 

De leur temps, ils furent les meilleurs élèves de leur génération à Saint Louis du Vernet. Ils durent abandonner leurs études après la guerre 39-45 pour reprendre l’entreprise familiale. Ils se promirent, lors d’une fin de semaine à Saint Michel de Cuxac, de continuer de s’instruire, de se cultiver et de se réunir une fois par mois. Leurs épouses acceptèrent cette exigence et en firent leur confort. Les ‘sénatrices’ se rencontrent au rythme de leurs époux, chez le bourrelier. Elles prennent en mains la paroisse, sauvèrent l’école, initièrent diverses activités. Le village aime ces particuliers : leur simplicité, leur urbanité, leur joie de vivre les distinguent.

 

Au tour de l’âtre, ils se retrouvent partageant leur écot de confort gourmand. On les surnomme également ‘les sept pipes’. Ils élèvent la pratique de la pipe sur le même plan que la cérémonie du thé. C’est un grand risque que d’ironiser sur l’art de fumer la pipe en leur présence, il vaut mieux encore critiquer l’USAP ou le Treize Catalan. Ils ont établi une échelle de jugement externe : le pipeur rapide s’attire un sourire de miséricorde et ce commentaire « le chemin est long entre le bec et le foyer, prenez le temps de sourire ! »S’il s’agit d’un cigaretteux, c’est l’incompréhension « Tiens, un brûleur de vie ! » Ils se méfient d’eux : des ‘embrouilleurs’ d’esprit, des agités !

 

Le village a son rythme, il n’est semblable à aucun autre : le pas de sénateur ! C’est le royaume du bon sens : chacun à son emploi ! Si le monde tourne trop vite, tant mieux pour lui. Agorarion a le soleil pour mesure de la journée, rien n’en détournerait les agorarionnais. On va du pas de sénateur vers son éternité, même le cheval s’y soumet. Stupeur pour l’étranger, voilà un riche village qui n’a pas même un tracteur ! On ne vit pas avec son temps ici Monsieur ! On prend le temps de vivre, d’aimer, de sourire et même de mourir.

 

Maître Dominique préside la réunion. C’est le recueillement : on nettoie sa pipe ! gestes lents, précis, dans lequel toute une journée de labeur se décharge, rien n’est précipité, tout y est ample, généreux. L’univers est convoqué, on contemple le silence. C’est le bourrage ! il n’y manque rien et rien n’est trop. On serre à deux doigts le tasseur et c’est l’attente. Le président saisit un sarment incandescent et le présente à chaque pipeur. Il n’en serait être autrement, seul le feu de la terre peut célébrer un jour d’homme ! Le président peut alors rompre le silence.

 

Dominique : « La semaine dernière un brûleur de vie, s’est commis à la télévision. Si agité, qu’on aurait pu penser qu’il s’asseyait sur du sel bénit. Il discourut sur l’homme économique et le travailleur, pour moi cela ne fait qu’un homme. Il affirma que ces deux hommes descendaient du singe ! Ce fut bien dommage que son interlocuteur ne lui demanda pas de quel arbre lui-même descendait-il !

 

Thomas : Peut-être qu’il eut pitié pour les racines de l’arbre ! Un arbre prend le temps pour venir et tout le sien pour mourir. Quel thème choisis-tu Dominique ?

 

Dominique : De la création de l’homme, de ce qui le fait être et où il va ? Il prit son temps pour répondre, le temps de voir la les volutes traverser la pièce.

 

Jules : Nous voilà parti pour une croisière au tour de la galaxie !

 

Augustin : Dis donc Scoty, tu as encore changé de tabac, c’est de l’anglais cette fois ? La Pucelle te tannera le fondement avec son épée un de ces jours.

 

Scoty : Laisse la Pucelle avec Marguerite. Dominique continue.

 

Dominique : On ne peut pas aborder le sujet directement. Il doit être précédé par une réflexion sur la matière, son origine, enfin la création.

 

Léon : Il faudra veiller à ne pas se laisser coincer entre le big-bang ou le big de bang et le hasard.

 

Thomas : Mettons-nous du côté du hasard.

Nous savons que la densité de la matière dépend de la vitesse des particules qui circulent entre elles, plus c’est lent plus c’est lourd. Nous savons que la plus pure des énergies quantifiables est de la matière.

 

Jules : Tout est énergie, tout est matière.

 

Henric : Si nous postulons à partir du hasard, il nous faut le définir. Or, le hasard est assimilé à l’accident que l’on peut quantifier par la probabilité.

 

Dominique : Le hasard est un concept que l’on a associé à la nécessité. Peut-on dire que le hasard est le produit de la nécessité ? Pour y répondre, il faut conjointement au hasard définir la nécessité.

 

Léon : La nécessité est une évidence qui s’impose dans une relation de causalité. : Je me couvre pour me protéger du froid ! Le fait de me couvrir est une nécessité que me produit le froid.

Mais que peut-elle être la nécessité originelle qui produit le hasard ou l’accompagne ?  La cause  originelle de la nécessité qui peut-elle être ? Est-il possible de poser le sujet en ces termes ? Y-a-t-il une autre possibilité ?

 

Augustin : S’il y a une nécessité originelle, c’est qu’elle est produite par une nécessité primitive qui n’est pas associable au hasard.

 

Henric : Le lait aura tourné dans le pi de la vache à la traite de demain.

Je crois qu’il faut commencer par la définition du hasard. Considérons-le comme un fait originel précédent la nécessité. Un fait neutre qui aurait sa propre logique. Dans cette optique ce serait lui, la cause du big-bang.

 

Dominique : Admettons ! prenons-le comme postulat. Quel serait alors le hasard primitif qui serait la cause du hasard originel ? Toutefois le hasard ne peut être à l’origine du big-bang, car le big-bang est l’explosion d’un noyau primitif. Le hasard serait donc la cause du noyau primitif.

 

Augustin : Il y a de quoi provoquer un infarctus à une limace !

 

Thomas : Augustin, cesse de faire l’âne !

 

Scoty : Je prendrai bien une bonne pinte de bière bien fraîche et bien tirée pour diriger tout ça.

Il me semble que le hasard serait bien intelligent pour s’ordonner à lui-même. Peut-il être sa propre origine ? Problème, le hasard dans sa définition est supposé être un concept pas une personne !

 

Dominique : Le hasard n’est pas une personne ni quelque chose, car on ne l’identifie comme concept que dans la mesure ou on l’utilise pour expliquer la cause d’un événement ou d’une chose. Le hasard n’est donc qu’un concept dit ‘relationnel’, il n’apparaît que dans une relation entre données ou évènements non explicables quant à leur cause.

 

Jules : Si le hasard n’est pas une cause en soi, il ne peut être lié à la nécessité. Il ne peut être la cause d’un événement que l’on ne peut expliquer par la seule raison. Le hasard n’a pas de substance.

Il me semble impératif pour en finir avec le hasard de réfléchir sur la matière.

 

Léon : La matière peut-elle s’appeler à l’existence et à la forme ? Est-elle capable de ressentir la nécessité, de conceptualiser sa relation avec elle-même, l’espace et le temps ?

Peut-on répondre à cette question : la matière a-t-elle un désir, une émotion ?

 

Scoty : La matière serait-elle, par le pur des hasards, l’origine de la vie ? Si je pose cette question à mon âne, il en meurt d’un fou rire.

 

Dominique : Il faut aller au bout du raisonnement.

 

Thomas : Si la matière s’ordonne à elle-même, il faut admettre qu’elle est intelligente. Si elle est intelligente et que son origine est le hasard, c’est donc que celui-ci est intelligent.

 

Henric : Cela supposerait que ce foutu hasard soit sa propre origine sans origine ; le hasard serait donc la volonté hasardeuse de la création. Pourtant, ce n’est pas un hasard si ma pipe est fumée. Dans cette logique, il faut attribuer au hasard une réalité de qualité ce qui impliquerait qu’il soit quelqu’un ou quelque chose ! ce qui est impossible.

 

Augustin : Il me semble qu’il y a beaucoup de hasards hasardeux, mettons-les en garde à vue, ce sont des suspects de choix !

 

Dominique : Si on part du postulat que la matière s’ordonne elle-même à la forme, il faut définir l’intelligence.

Qu’est-ce que l’intelligence ? Quelle en est sa cause ?

 

Léon : L’intelligence, c’est la capacité de mettre en relation, de décider, de conceptualiser. Elle est de l’ordre de la qualité. C’est la volonté d’aimer.

 

Henric : Ce qui existe sans être peut-il s’ordonner à la qualité ? C’est à dire peut-il être par lui-même ?

 

Jules : Pasteur démontra définitivement qu’il n’y a pas de génération spontanée.

 

Scoty : L’intelligence éclaire la volonté, elle est donc la cause objective de la liberté. Il est donc impossible à la matière de vouloir, de s’ordonner elle-même à la qualité, car par l’observation scientifique, on sait qu’elle n’existe non pour elle-même mais pour le vivant. Seul le vivant est. La matière ne peut avoir conscience d’elle-même ni de ce qui l’entoure. Elle n’a donc ni désir ni vouloir. Elle n’a pu inspirer ses propres lois.

 

Dominique : Définissons la qualité. Qu’est-elle ? Peut-on la désigner par le mot ‘esprit’ ?

 

Thomas : Il serait déshonnête, au stade de notre développement d’user du mot esprit. Nous devons d’abord conclure sur le hasard.

La qualité me semble être la sublimation de la matière mais aussi sa cause. Le vivant est composé de matière mais aussi d’un facteur complémentaire appelé l’anima – le principe de vie naturelle – donc le vivant sublime la matière.

 

Léon : Le végétal est le premier stade de cette sublimation, l’animal le second et l’homo sapien-sapien est la perfection de cette sublimation progressive. C’est l’ordre de la qualité objective.

 

Henric : le premier des hominidés qui, par la nécessité, utilisa la matière pour en faire un instrument, fut le premier artisan, mais par ce fait, il apporta un sens utilitaire à la matière. En lui donnant un sens utile et une forme, il la domine, la sublime. La matière par l’homme se trouve deux fois sublimée : la première, par son corps composé de matière ; la seconde par l’usage réfléchi qu’il fait de cette matière.

 

Augustin : La matière existe. Elle ne peut se sublimer par elle-même. Elle s’offre à une intelligence extérieure à sa nature. Si donc la matière ne possède pas d’intelligence propre, elle n’a pas de vouloir et ne peut donc pas s’ordonner à la forme. Elle n’est donc pas sa propre origine ni sa propre cause.    

 

Thomas : Nous savons maintenant ce qu’est le hasard. Rien. Il n’existe que conceptuellement. Il n’a ni vouloir, ce n’est pas un existant.

 

Dominique : Le hasard est le stade primaire de l’idéologie matérialiste. Il faut donc admettre qu’à l’origine de ce qui est et existe, il y a une volonté intelligente.

 

Thomas : Dominique, la prochaine réunion débattra de cette intelligence. 

 

 

BREVES D’INFORMATION

 

‘ LA BOURDE DU PAPE ? !’

 

LES BOURDES A LA BOURDE… ET TA SŒUR… ! 

 

Benoît XVI aurait fait une bourde quant au discours de Ratisbonne ? !

Basta !

Cette affirmation vient des milieux progressistes, assez pauvres intellectuellement et toujours à la recherche de ce qui pourrait les rassurer. Ils sont constamment à la recherche de ce qui peut les conforter dans leurs certitudes protectrices qu’ils voudraient faire partager aux autres, les imposer.

Ce sont des esprits qui voient loin, pas plus éloignés que le cercle confortable de leur fauteuil, de leur propre cercle de convictions, s’ils en ont une ! 

Voici qu’ils faisaient de longues siestes sur un quant à soi aimable, rassurant et, patatras ! Voilà que Benoît XVI met tout parterre. Avait-il besoin de fracturer les portes des enfers ! Était-il nécessaire qu’il garde en tant que pape le théologien qu’il fut avant son élection ?

Un nouvel état de vie ne change pas la personne dans ses qualités, il fut théologien avant, il l’est encore après.

Benoît XVI n’a pas fait de bourde, son discours était particulièrement réfléchi. Devions-nous rester dans un sentiment de culpabilité, d’infériorité vis à vis de nos frères musulmans, ceux de la Réforme, ceux de la laïcité ? Il fallait en finir avec cette situation contraire à notre dignité et à notre fierté d’être catholique :

 

Le chemin de la tolérance et du dialogue, que le concile Vatican II a heureusement engagé, doit être poursuivi avec constance", a déclaré le pape.

"Mais cela ne doit pas nous faire oublier le permanent devoir de repenser et d'affirmer avec tout autant de force les lignes maîtresses, inaliénables, de notre identité chrétienne", a-t-il ajouté.

"Il faut avoir conscience que notre identité ne se joue pas sur un plan simplement culturel, ou à un niveau superficiel, mais requiert force, clarté et courage devant les contradictions du monde dans lequel nous vivons, qui sont le propre de la foi", a insisté Benoît XVI. Il a appelé les chrétiens à témoigner "avec force et sérénité.( discours du mercredi à l’audience publique du 11/10/06 )

 

" […] de ne pas parler en fonction de ce que les gens veulent entendre, en obéissant à la dictature de l'opinion courante, considérée comme une espèce de prostitution du langage et de l'esprit mais de chercher d'obéir à la vérité. Cette dure discipline de l'obéissance à la vérité est la vertu fondamentale du théologien. Elle fait de lui un collaborateur et un porteur de la vérité". […] Retrouvez le chemin de la liberté. ( Homélie au congrès international de théologie, 08/1O/06 )

 

 

Il faut s’attendre à une remise debout des catholiques, à une invitation à se lever, le cœur doux et humble mais fort et virile. Qu’importe si nous dérangeons les petits compromis, qu’importe si nous sommes de moins en moins aimés ; l’important est que nous continuions à déranger, à aimer, pour le reste laissons Dieu prendre soin de nous.

Nous n’avons pas à rougir de ce que nous sommes. L’Évangile n’a qu’un cadre : l’amour envers Dieu et le prochain. Nous n’avons à nous restreindre dans aucun autre cadre, ni politique, ni social, et certainement pas idéologique.

 

 

Le pape Benoît XVI enseigne à la foule de sa « voix légèrement flûtée ». Il se laisse seulement parfois interrompre par des applaudissements, mais rappelle vite son auditoire à l'attention. Une exigence qui enthousiasme et galvanise. Le poids des mots est fondamental. Certes, le pape, comme tous les dirigeants du monde, n'a pas la possibilité de rédiger l'ensemble de ses discours et interventions. Il n'écrit donc pas l'ensemble de ses textes, mais il les relit et les corrige tous avant de les lire en public.

 

Hervé Yannou, correspondant du Figaro au Vatican (extrait tiré du site : Eucharistie Sacrement d’Espérance)

 

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LA RELIGION MUSULMANE

 

RELIGION DE TOLERANCE ?

 

 

Dans un collège des environs de Lyon, une fille âgée de 14 ans a subi un début de lapidation pour avoir mangé son goûter avant la rupture du jeune du ramadan…

Il n’y a pas eu désapprobation des religieux… !

Les médiats ont essayé d’étouffer la nouvelle, ils en ont été contraints par la pression des blogs, de l’internet…

Les quatre jeunes assaillants ont été mis en examen.

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LE MEPRIS DES RELIGIONS

 

I - Dans le projet de la nuit blanche, les responsables du château de Versailles avaient mis au programme, concernant la chapelle royale, une sorte de ballets qui simuleraient entre autres choses : des chorégraphies exprimant des sacrifices humains, des rites païens, des rites inspirés des occultismes… Ce projet est né d’esprits voulant délibérément porter le sacrilège dans un lieu qui participe à la symbolique de la catholicité en France et qui, aujourd’hui accueille une célébration mensuelle…

La rédaction, informée de ce projet, s’est engagée pour en empêcher le déroulement : elle contacta le président du conseil départemental, d’autres individuellement firent de-même et nous obtîmes l’annulation de ce programme. A l’évidence, il fut remplacé, au pied levé, par une exposition de robes de mariées de Lacroix, rejoignant le seul mariage royal : celui du Dauphin et de Marie-Antoinette qui eut lieu dans cette chapelle… Cette exposition fit l’objet d’une autre contestation pour laquelle la rédaction se désolidarisa. L’excès en tout nuit, et malheureusement il entraîna une attitude sans mesure, blessant la charité…

 

II – La station de radio Europe 1 a, en ce début de mois, commencé une campagne publicitaire par voie d’affiches. L’une d’elle représente un mur flanqué d’une porte entre ouverte sur laquelle est posée une statue de La Vierge Marie, penchée, prête à tomber sur celui qui entre dans la pièce…

 

Peut-on s’étonner que cette station de radio s’adonne à ce genre d’insulte envers les catholiques ? Nous n’oublions pas la transformation de bien de ses animateurs en agents de propagande politique de gauche, ni son matraquage en faveur de la dépénalisation de l’avortement. Et ici, pour ceux qui ont une notion juste de la vie intellectuelle et culturelle, comment  oublier sa responsabilité dans la confiscation de la vie intellectuelle, la décadence actuelle si bien illustrée par la pensée unique… Une station sans honneur…

On peut s’étonner de la présence de  M. Jean-Pierre Elkabbach, lui qui sait ce qu’est l’insulte envers un groupe pour conviction religieuse… Mais faut-il, là aussi, s’en étonner !

 

III – De nombreuses dégradations ont été constatées sur des édifices religieux, en Bretagne mais aussi d’autres lieux… Ce qui est étrange, c’est que lorsqu’il s’agit d’un édifice appartenant à d’autres confessions religieuses, on s’en émeut beaucoup… On accourt au chevet du blessé… Mais pour l’église catholique, c’est à peine si la presse le mentionne… Ce genre d’événement touchant les catholiques ne fait pas partie de la réflexion de la pensée unique, ni des attitudes courageuses de nos décideurs de tout poil.

Quoi de plus confortable que de se vautrer dans la médiocrité, c’est si rassurant !

 

Nous voudrions vous proposer une réflexion d’ensemble sur les agressions que les religions subissent actuellement. Il y a un regain abominable d’une laïcité fondamentaliste, intégriste, sans doute inspirée par des sociétés secrètes qui jouent le pourrissement à seule fin de se construire de bonnes raisons d’affaiblir ces religions. Elles sont pourtant les seules en mesure de s’opposer à la mondialisation et aux dérives de plus en plus graves contre la démocratie et la dignité de l’homme.

On ne peut guère compter sur les politiques et les institutions, que l’on se souvienne du déni de justice fait à l’encontre du recteur de Notre Dame de Paris, agressé en plein office par un groupe d’Act Tup, association gay, désireuse d’obtenir le mariage civil gay et l’adoption d’enfant…

L’actuel ministre de la justice, fils du défunt Marcel Clément, ne s’est pas grandi… Il n’est pas donné à tout le monde de savoir naître tous les matins…

Je crois qu’il faudra que les responsables religieux et à défaut, leurs fidèles, s’organisent pour chaque fois porter plainte et manifester une indignation commune…

Ce sont là des signes évidents de décadence et du recul des institutions…

 

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DE LA BOMBE ATOMIQUE !

 

COREENNE

ET

DEMAIN IRANIENNE !!!

 

LA BOMBE … ! PARDON JE NE L’AI PAS FAIT EXPRE… !

 

La Corée du Nord a fait exploser une bombe atomique dans son sous-sol.

Faut-il s’en étonner ?

Nous sommes en présence d’une relance de la politique de la terreur… Celle exercée par des États dangereux, voyous. Des États habités par une névrose : celle de la puissance et de l’existence au mépris de la justice, de l’homme et de leur propre peuple.

Mais n’est-ce pas là, la logique d’une politique d’armes de destruction massive et de surarmement ?

Était-il nécessaire d’inventer ce genre d’arme ?

Nous avons ouvert des appétits et nous sommes incapables de construire une paix véritable, juste…

Depuis la chute de l’idéologie communiste, nous sommes des puissances habitées par l’art consommé de l’impuissance, du non-espoir, de l’indigence morale… Des puissances dans l’art du creux et de l’absence…

Il est dans la logique qu’un de ces jours, un réseau terroriste, aidé par l’un de ces États voyous, dépose une de ces bombes dans une capitale… Dormez braves gens, nos États nous gardent ! C’est pour bientôt le fou-rire ?

Et, si demain un autocrate décidait d’envahir subito l’Occident de l’Europe ? Si demain, au petit déjeuner, on voyait des avions russes dans notre ciel infanticide bombarder nos orgueils… ?

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S I D A 

UN MENSONGE… !

information provenant du blog: Le Salon Beige

Sommes-nous encore, en Occident capables de vérité ?

Lors d'une conférence de presse le 13 octobre, le cardinal archevêque de Durban (Afrique du sud), Mgr Wilfrid Fox Napier a exposé la terrible situation dans son pays. Quatre millions et demi de personnes sont atteintes du sida. 1000 personnes en meurent chaque jour. Pour lui l’establishment libéral a créé un réflexe anti-catholique avec l’usage du préservatif. Or «nous sommes en train de gagner le débat sur le préservatif»:

"Que les médias me citent un seul exemple au monde où les préservatifs aient réussi à arrêter la montée du taux d’infection !"

Il a expliqué que la régression de l’épidémie n’était intervenue que dans un seul pays, l’Ouganda.
Pourquoi ? :

"le gouvernement a incité les gens à modifier leur comportement ce qui a eu un effet spectaculaire ; faisant par là régresser le taux d’infection de 29 % à 6%".

Il a ajouté qu’un membre du Parlement avait lancé le slogan «abstain or die». Abstenez-vous ou mourrez ! Tout le monde a compris ce message dans son pays. Alors que le pays voisin le Botswana où le gouvernement a fait la promotion du préservatif, le taux de contagion qui était l’un des plus bas du monde est devenu pratiquement le plus élevé de l’Afrique. Le Cardinal a terminé très finement son exposé en disant :

« Les Européens s’occupent de Dieu pour satisfaire leurs besoins plutôt que faire de Dieu une réalité. »

 

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LA VIE DES MOTS

 

Pierre-Charles Aubrit Saint Pol

 

Légitimité – Autorité – Pouvoir 

 

 

« Légitime », ce mot du latin « lex, legis » qui désigne la  loi religieuse et par extension la loi générale d’où le mot « legitimus » ce qui est conforme à la loi.

« Légitime » entre en usage savant au XVIe siècle. Il désignait exclusivement la distinction entre enfant de l’union légitime par opposition à ceux issus de l’union adultérine. Un enfant adultérin était considéré comme né hors la loi, enfant du péché. Il ne pouvait prétendre être un chef. Il n’avait pas la confiance de la communauté. Il n’était pas béni selon la loi et coutumes.

L’usage de « légitime » est associé à la notion de pouvoir et d’autorité, ce qui donne au concept de légitimité un sens outre-passé. Il sublime la Loi ainsi que le Pouvoir et l’Autorité. La « légitimité » est leur âme.

 

« Autorité » vient d’une racine indo-européenne : « oweg » qui signifie « croître » et se traduit en français par août. En latin la racine se transforme en « augere, auctus, auctor » celui qui fait croître.

Il se transforme en « fondateur » celui qui donne l’autorité. Cette racine donne également « augurium » accroissement donné par les dieux à une entreprise, une actIon. Elle donna « augur » celui qui est consacré par les dieux. « Augur, augustis » celui qui est consacré par les dieux, ce qui donne « auguste » qu’Octave fut le premier à porter et on lui consacra le mois d’août.

L’usage de l’autorité légitime quelque en soit l’objet possède un caractère religieux. Il est relié à Dieu indépendamment de la personne, pour autant que celle-ci ait la légitimité d’en user.

 

« Pouvoir » procède d’une racine indo-européenne « poti- », il désigne le chef : de la famille à la patrie. En grec « posis » époux ; « despotes » le maître de la maison et dévia pour qualifier le pouvoir absolu. C’est « potis » mot latin qui désigne le pouvoir politique. Il donna « potere » diriger, faire presser, puissance, toute-puissance.

Les mots autorité, pouvoir et légitimité expriment l’idée d’une urgence, d’une nécessité communautaire, un impératif de survie.

 

L’humanité originelle est société : un homme, une femme ; Adam et Eve.

L’humanité n’eût pu exister, si elle n’avait été qu’un ensemble d’individus sans autres liens organiques que la nécessité de la procréation. ; toutefois la procréation est en soi un lien social même dans son expression la plus primaire.

Le monde animal a ses propres liens même s’ils sont de l’ordre de l’instinct et de l’émotion.

Qui dit société, dit organisation hiérarchique naturelle qui est ordonnée au service du bien commun. Cette organisation implique un principe d’autorité et de pouvoir. – Tandis que l’anarchie a ses racines directement dans le péché et n’a aucune légitimité sociologique. C’est un état permanent de révolte pacifique ou violente selon les circonstances.

 

L’autorité et le pouvoir ont une assise commune, assise morale, intellectuelle, spirituelle : le droit, c’est à dire le principe qui contient la loi et la fait vivre.

Le droit est une nécessité produite par les besoins impératifs que sont, pour la société de l’homme : la survie de l’espèce, de la communauté, la défense de ses libertés, la défense de sa propriété privée ou commune, la défense des dieux autour desquels s’affirme l’identité cultuelle, culturelle, politique et économique.

A cette structure naturelle vient s’ajouter la mémoire de Dieu. L’âme conserve l’imprégnation du regard de son Créateur, dans laquelle se récapitule la mémoire génétique en partie constituée par les ascendants et l’environnement spécifique à l’instant de la fécondation, ainsi que la mémoire de l’animalité antérieure.

Il nous faut accepter que l’humanité soit le résultat d’un acte créateur propre associé à l’évolution. Il ne faut pas craindre d’appréhender l’évolution animale de l’homme associée à un acte créateur extérieur. Ces deux étapes entrent dans une logique successive et unifiée. Il ne fait aucun doute que Dieu soit intervenu dans le corps de l’hominidé le plus évolué pour déplacer l’appareil génital chez la femme et ajouter l’élément osseux nécessaire à la parole puis, seulement après, il lui conféra l’âme, le rendant intelligent, capable de conceptualiser, capable de choix entre le bien et le mal, car Il le voulut semblable à Lui.

 

L’homme et la femme sont l’achèvement de la sociabilité qui n’est plus de l’ordre de l’instinct mais de l’ordre de la volonté et de l’interdépendance. L’homme est le mammifère qui a besoin le plus de l’autre pour vivre, se reconnaître et être reconnu.  L’homme est le seul mammifère a avoir autorité et pouvoir sur lui-même, condition liée à sa grandeur, c’est ce que l’on appel : la liberté de conscience.

 

Ce développement préliminaire nous porte à considérer que le concept de légitimité ne peut se contenir dans le seul cadre de la loi et du droit. En effet, il rejoint la morale et la charité qui est l’ordre supérieur, lumière qui illumine le bien commun.

 

La communauté subit la nécessité qu’induit l’exigence de la survie. Elle doit se protéger, elle va donc élire un chef qu’elle prend parmi les siens. Il s’engage alors à l’obligation du courage physique et moral, au don de soi, le sacrifice de sa vie. Celui qui engage sa vie pour sauver celle des autres, celui-là a l’autorité et le pouvoir sur la communauté pour le service de celle-ci. C’est de cet ensemble qu’émane la légitimité de l’autorité et du pouvoir, pouvoir politique, militaire et religieux selon les normes antiques.

 

Plus près de nous, ceux qui contribuèrent à chasser l’occupant nazi avaient une légitimité à gouverner.  Le concept de légitimité s’étend à ceux qui respectent la loi naturelle et la morale qui en découle.

L’exercice du pouvoir, en lui-même, ne confère pas la légitimité, celle en temps de paix s’obtient par la défense du bien commun, le respect de la loi naturelle et de la morale.

 

Dés lors que le pouvoir politique s’arroge le droit de violer la loi naturelle, de légiférer positivement en faveur du mal en soi, il perd toute sa légitimité, il en est de même des institutions qui doivent se plier au législateur.

Il est légitime pour le peuple de rejeter un pouvoir et ses institutions parce qu’il n’existe plus de légitimité dans celles-ci à gouverner le peuple. En aucune manière, la loi ne peut se substituer à la légitimité, car la loi et le droit ne peuvent par eux-mêmes conférer celle-ci. –  C’est aussi la raison pour laquelle, il nous apparaît un compatible pour un prêtre, pour un évêque et un laïc de demander une distinction ou de l’accepter d’institutions et de pouvoirs qui n’ont plus de légitimité. Il faut également considérer la contradiction qu’il y a entre le service de l’Évangile et ce geste qui confère une sorte de légitimité à posteriori. -  La légalité ne peut pas se substituer à la légitimité, alors que l’inverse est possible.

 

Les chrétiens, les catholiques tout particulièrement et tous les hommes religieux, au seuil de l’élection présidentielle et de toutes les autres à venir, sont obligés, quelle que soit la sympathie qu’ils éprouvent pour tel ou tel candidat, de s’attacher à ceux qui entreprennent de rétablir le respect juridique des lois naturelles. Et, s’ils se trouvent à choisir entre deux candidats qui refusent explicitement de rétablir juridiquement le respect des lois naturelles : suppression de l’IVG, suppression des statuts ‘communautaristes’ spécifiques à des pratiques sexuelles qui ne relèvent que de la vie privée, ils doivent alors s’abstenir du choix et voter blanc.

 

Quand un régime est décadent, pourri, il est inutile de courir à son chevet. Il faut le laisser choir.

 

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RADIOGRAPHIE DU POLITIQUE

 

CHRISTINE BOUTIN

 

 

Madame Christine Boutin vient d’ouvrir son blog, elle y invite tous ceux qui le souhaitent à l’interpeller, à l’interroger… Ce qui est là un effort louable de démocratie ! Pour autant, il nous semble nous adresser à un mur, car à nos questions point de réponse… ! Il se pourrait que cette dame soit quelque peu dans un relatif inconfort devant elles :

 

 

 

Chère Madame,

              J'ai eu l'occasion de suivre un entretien que vous accordâtes à FR.2 ou sur la chaîne parlementaire. Vous y avez exprimé votre engagement comme une vocation de service, ce dont je ne doute pas.
              Pensez-vous pouvoir continuer de servir le bien commun de la patrie en vous maintenant dans une union avec un parti politique qui n'a pas cessé de multiplier les lois contre nature, des dispositions radicalement opposées à la loi naturelle et donc à la loi de Dieu?
              Pouvez-vous concilier le fait d'être membre d'une famille politique si opposée à vos convictions religieuses?
              Est-ce encore le bon moyen pour influencer le gouvernement de la cité?
              Ne vous trouvez-vous pas en contradiction avec vos convictions?
              Avez-vous médité sur la légitimité d'un régime politique qui ne semble plus avoir de légitimité ?
              N'y a-t-il pas là une réflexion à faire quant à la recherche d'une autre forme d'engagement au service du bien commun de la cité?
              J'ignore si vous lisez ma lettre catholique que je vous adresse régulièrement, si c'est le cas vous connaissez ma préoccupation sur la légitimité du politique à la lumière de la morale et surtout de la défense de la vie?
              Pouvez-vous soutenir un pouvoir qui a vis à vis du sacrilège de Notre Dame de Paris fait un déni de justice?
              L'interlocuteur que je suis ne participe à aucune idéologie. Je m'interroge sur la capacité que peut encore avoir le politique à maintenir l'espoir dans le peuple?
              Merci de votre attention, bien à vous, P.C.A.St.P., rédacteur en chef ce, 29/09/06. 

 

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L’HISTOIRE DE L’EGLISE

 

Eusèbe de Césarée

 

L’EMPIRE D’ORIENT, UN EMPIRE CHRETIEN

 

JUSTINIEN L’EMPEREUR

 

Le Ve et VIe siècles connaissent l’apogée de la première période byzantine. Il y a une continuité par rapport aux siècles précédents. Il n’y a pas rupture entre l’Antiquité et le Moyen Age. Les invasions barbares ne stationnent pas chez les Byzantins, elles n’installent pas chez eux leur culture ni leurs mœurs :

Ce qui apparaît d’abord en opposition, comme on l’a dit, avec l’Occident conquis par les barbares, c’est la continuité par rapport à la période précédente : il n’y a pas ici de coupure entre Antiquité et Moyen Age, l’une se prolonge dans l’autre. Les Ve et VIe siècles continuent l’œuvre du IV; plus que jamais l’Empire qui se dit toujours « romain » apparaît comme un empire chrétien.

 

L’Empire se pose en protecteur des chrétiens au-delà de ses frontières. L’empereur exige de ses voisins le respect de la liberté de conscience :

 

[…] en 532 Justinien introduit, dans le traité que Khosrau 1eraccepte de signer, une clause garantissant la liberté de conscience des sujets chrétiens du Roi des rois sassanides, comme déjà peut-être Constantin lui-même l’avait réclamé.

 

L’activité missionnaire au nord de l’Empire ne cesse pas : les rois des Hérules et celui des Huns de Crimée reçoivent à Constantinople leur baptême.

A l’intérieur de l’Empire la mission continue, on consolide les campagnes : la Carie, la Lydie, Phrygie. Les païens et les hérétiques subissent des dispositions restrictives, sans doute par le souci de préserver les chrétiens de toute contamination.

Le pouvoir impérial met en accusation des membres de ses élites qui restent ou retournent au paganisme. Il fait fermer l’école néo-platonicienne, un foyer fanatique d’occultisme et de paganisme :

 

De rands procès, menés comme toujours avec cruauté ( emprisonnement, torture, supplice du feu), furent instruits à Constantinople en 527 contre les manichéens,  en 529, 545-6 contre les païens : il y avait là de très hauts fonctionnaires de l’entourage même de l’empereur, des hommes et des femmes de plus haut rang, des intellectuels : professeurs, avocats, médecins.

 

Il y a une grande activité intellectuelle mise au service de la foi. C’est Alexandrie qui est la capitale de la vie intellectuelle. C’est elle qui donne le la.

Dés le début du Ve siècle l’enseignement païen est de grande qualité et détendu face aux problèmes religieux. Les élèves chrétiens parviennent avec douceur à orienter les doctrines philosophiques dans un sens plus acceptable. Jean Philopon, premier authentique chrétien, reçoit la confiance des universitaires et accepte la direction de l’université. Il s’opposera aux dérives païennes du néo-platonisme athénien de Proclus.

Ce centre universitaire, avant de devenir entièrement chrétien, donna de grands esprits, forma des héros de la pensée chrétienne. Enée de Gaza philosophe remarquable, d’une grande audace :

 

[…] ; c’était là d’authentiques philosophes qui osaient aborder de front les difficiles problèmes résultant de la confrontation de la foi chrétienne avec le système néo-platonicien : l’origine de l’âme, la résurrection des corps, la création ou l’éternité du monde. Foyer secondaire mais actif, Gaza a produit d’autres représentants de cette tendance.

 

Gaza devient la seconde capitale intellectuelle de l’Empire. C’est d’elle que sorti le pseudo Denys l’Aréopagite qui eut une si grande influence au Moyen Age en Occident.

Durant cette période, la théologie devient une science parmi les autres, grâce au néo-platonisme qu’accompagna la mise en œuvre de la logique aristotélicienne avec l’Organon. C’est d’Alexandrie que sortirent les principaux commentaires sur Aristote.

Il y a une évolution importante dans le discours intellectuel, on assiste à l’introduction des écrits patristiques comme éléments constitutifs dans l’argumentation théologique en complément des sources scripturaires :

 

[…] ; chez nos Byzantins on objecte des citations patristiques : aux recueils de testimonia bibliques, succèdent les florilèges dogmatiques qui regroupent, par sujets, des citations d’auteurs autorisés ; même phénomène dans l’exégèse, nous voyons se développer des Chaînes qui accrochent à un verset des Livres Saints de brefs passages extraits des commentaires dus aux plus célèbres des Pères de l’Église.

   

Les Byzantins inventent les techniques du digeste, du résumé, nécessaire à l’argumentation.

La vie intellectuelle atteint sa maturité, elle s’enrichit sans jamais rompre avec l’antiquité. Les monastères florissants créent des écoles chrétiennes, mais il n’existe pas de maillage scolaire. Théodose II, en 425 crée une université d’État dans les lignes les plus traditionnelles.

Les mathématiques ne sont pas négligées, Euclide et Archimède sont commentés. Toute l’élite chrétienne byzantine met sa vie intellectuelle au service de la foi chrétienne. C’est ainsi que des laïcs interviennent dans les débats théologiques ; il n’y a pas de scission intellectuelle entre clercs et laïcs comme cela se produira malheureusement en Occident.

La dynamique intellectuelle de l’Empire de Byzance explique que les empereurs sont intervenus dans les disputes théologiques. L’empereur se sentait obligé de veiller au bien spirituel et matériel de ses sujets.

L’Église d’Orient est très organisée, très réglementée, mais le pouvoir impérial va être trop puissant. Il enferme cette Église dans un cadre strictement impérial ; tandis qu’en Occident, c’est l’Église qui devra combler les défaillances de l’Empire et son pouvoir deviendra trop excessif :

 

Il y a, non pas sans doute confusion, mais association étroite, compénétration, entre les deux domaines, car si l’empereur s’immisçait comme on le voit très intimement dans la vie de l’Église, il demandait d’autre part, et comme naturellement, à celle-ci son concours pour le bon fonctionnement des institutions impériales. Les évêques sont officiellement chargés de jouer un rôle dans l’administration, par exemple municipale, et ce rôle déborde peu à peu le cadre initial d’une influence d’ordre surtout moral (protéger les faibles, dénoncer les abus) : une constitution de 530 finit par placer l’évêque « à la tête de toute l’administration financière des villes, y compris l’approvisionnement et les travaux publics. »

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LES ENCYCLIQUES

 

 

JEAN XXXIII

 

PACEM IN TERRIS

 

Lettre encyclique sur la paix entre les nations fondée sur la vérité, la justice, la charité, la liberté.

 

 

Cette encyclique est la première du genre, elle s’adresse au-delà de la chrétienté.

Jean XXIII, conscient des urgences de l’après guerre, en appelle à tous les hommes soucieux d’instaurer la paix dans le monde autant que dans le cœur des hommes et des femmes sur toute la surface de la Terre.

Le pape la rédige alors qu’il se sait condamné par la maladie et que le Concile Vatican II est dans le travail de la première cession.

La situation internationale n’est guère brillante : nous sommes au cœur de la guerre froide : guerre psychologique, dissuasion de l’arme atomique, paix armée de la terreur.

La guerre au Vietnam prend un tournant tragique. On vient d’échapper à une troisième guerre mondiale dont la cause était la Baie des Cochons.

Les puissances impérialistes occidentales terminent la décolonisation.

La reprise économique est bien commencée, nous sommes au cœur des trente glorieuses.

La guerre idéologique bat son plein et, d’étranges appétits commencent à se faire jour. Ils s’exprimeront en 1968…

 

Nous entrerons alors dans la conclusion de la deuxième roue du dragon de l’Apocalypse pour entrer dans la troisième sans même nous en apercevoir tant, derrière l’agitation des intellectuels, s’installait une profonde et confortable léthargie, révolutionnaire tant du côté des dictatures d’État, que de celui d’un libéralisme avancé qui devait aboutir à légiférer sur la pratique de l’avortement…

 

Aucun mode de gouvernement, aucun système politique ne fut épargné par cette maudite culture. L’Église entra dans la tourmente majeure de la crise du modernisme : théologies, philosophies infestées par les idéologies si radicalement opposées à l’Évangile et à la doctrine de l’Église. Elles induirent des orientations pastorales aberrantes, désastreuses quand certaines de celles-ci ne se firent objectivement leurs complices.

 

Pacem in terris venait dans ce tourbillon comme une deuxième Pentecôte sur les intelligences. Grâce à cette encyclique les intelligences sages et justes avaient la matière intellectuelle et spirituelle d’initier la révolution de l’amour de charité… Fallait-il qu’elles acceptassent de se convertir à la Vérité, seul nécessaire pour se mettre au service de la justice sans laquelle il ne peut y avoir de paix.

 

Pacem in terris n’innovait pas, elle reprenait toute la réflexion du Magistère, sa révolution vint de ce qu’elle s’efforça de mettre cet enseignement à la portée de tous. Elle répondait avec une lumineuse compassion à l’attente des cœurs blessés, des esprits brisés, des regards inquiets qui ne savaient plus s’il leur était encore permis de sonder l’avenir… On avait besoin de s’entendre redire d’espérer, de croire et d’aimer…

Comment aimer, comment réapprivoiser l’art de l’amour de charité, l’art de la confiance en soi-même et dans les sociétés qui s’engageaient inexorablement dans une culture de mort… ?lâcheté, l’émergence de la pensée unique.

 

Devant l’apparente solidité des dictatures et leur multiplication en Amérique Latine et, dans le choc encore bien présent des horreurs du nazisme et des événements de Budapest, la préoccupation apparemment majeure pour les États n’est rien de moins que le respect des droits de l’homme, la liberté de conscience…

 

La seconde roue du dragon atteignait son accomplissement, l’humanité se trouvait prisonnière de la culture

 

 

L’ORDRE DANS L’UNIVERS :

1. La paix sur la Terre, objet du profond désir de l’humanité de tous les temps, ne peut se fonder ni s’affermir que dans le respect absolu de l’ordre établi par Dieu. […] : dans les êtres vivants et dans les forces de l’univers, il règne un ordre admirable, et c’est la grandeur de l’homme de pouvoir découvrir cet ordre […] Mais ce que montrent avant tout les progrès scientifiques […], c’est la grandeur infinie de Dieu, […] « Seigneur, Seigneur, que ton nom est magnifique sur la Terre, que tes œuvres sont nombreuses, Seigneur ! Tu les as toutes accomplies avec sagesse. »

Et il a créé l’homme intelligent et libre à son image et ressemblance, l’établissant maître de l’univers : Tu l’as fait de peu inférieur aux anges ; de gloire et d’honneur, tu l’as couronné ; tu lui as donné pouvoir sur les œuvres de tes mains, tu as mis toutes choses sous ses pieds.

L’ordre si parfait de l’univers contraste douloureusement avec les désordres qui opposent entre eux les individus et les peuples, comme si la force seule pouvait régler leurs rapports mutuels. Pourtant le Créateur du monde a inscrit l’ordre au plus intime des hommes : ordre que la conscience leur révèle et leur enjoint de respecter : Ils montrent gravé dans leur cœur le contenu même de la Loi, tandis que leur conscience y ajoute son témoignage. […] Mais la pensée humaine commet fréquemment l’erreur de croire que les relations des individus avec leur communauté politique peuvent se régler selon les lois auxquelles obéissent les forces et les éléments irrationnels de l’univers. Alors que les normes de la conduite sont d’une autre essence : il faut les chercher là où Dieu les a inscrites, à savoir dans la nature humaine.

 

Jean XXIII, par cette introduction, rétablit les principes de l’ordre de la création. Dieu est volonté et cause de tout ce qui est. Il oppose aux désordres de la culture révolutionnaire la hiérarchie des valeurs naturelles et surnaturelles.

L’humanité, homme, femmes, se retrouve au sommet de la création visible et invisible, puisque supérieure aux anges par la grâce. L’homme et la femme ont tous les deux une égale dignité, jouissent de droits identiques. L’une n’est pas inférieure de l’autre et aucun d’entre eux n’est objet de l’autre. Cet ordre procède de Dieu qui l’inscrivit en chaque humain.

Jean XXIII est dans la continuité thomiste, il rappelle que l’homme et la femme sont ‘raison’. C’est à cause de cette raison qu’ils ont besoin de Dieu. (Confère le discours de Ratisbonne de Benoît XVI ) C’est dans la mesure où l’on accepte en conscience que sa raison soit éclairée de la grâce de Dieu qu’il devient possible d’échapper aux forces irrationnelles : les idéologies, les cultures révolutionnaires, elles tendent inexorablement à détacher l’homme de Dieu.

Il met en garde l’homme face à la rapide évolution des sciences et des techniques : qu’il ne se prenne pour Dieu ! Et qu’il n’en vienne à réduire son prochain dans une aliénation qui le satisfasse et le rassure. Les sciences et les techniques ne sont pas une fin en elles-mêmes.

L’homme désir la paix, mais celle-ci ne peut se laisser saisir que si on désire, recherche d’abord celle que Dieu nous propose, sa paix : Je vous donne ma paix.

La paix ne peut s’obtenir en dehors de la recherche du bien commun dans sa maison, dans sa paroisse ou commune, dans sa patrie et sur toute la surface de la Terre.

Jean XXIII renvoie l’homme et la femme dans la lumière de Dieu où se révèle leur propre conscience source de leur dignité.

 

L’ordre entre les êtres humains :

Les droits :

Le fondement de toute société bien ordonnée et féconde, c’est le principe que tout être humain est une personne, c’est à dire une nature douée d’intelligence et de volonté libre. ( Ce que nie la religion musulmane qui n’est pas une religion révélée quoiqu’elle se réfère au Livre mensongèrement. Elle est une religion monothéiste naturelle. )  Par-là même il est sujet de droits et de devoirs, découlant les uns des autres, ensemble et immédiatement, de sa nature : aussi sont-ils universels, inviolables, inaliénables.

Si nous considérons la dignité humaine à la lumière des vérités révélées par Dieu, nous ne pouvons que la situer bien plus haut encore. Les hommes ont été rachetés par le sang du christ Jésus, faits par la grâce enfants  et amis de Dieu et institués héritiers de la gloire éternelle.

Tout être humain a droit à la vie, à l’intégrité physique et aux moyens nécessaires et suffisants pour une existence décente, notamment en ce qui concerne l’alimentation, le vêtement, l’habitation, le repos, les soins médicaux, les services sociaux.

[…] Tout être humain a droit au respect de sa personne, à sa bonne réputation, à la liberté dans la recherche de la vérité, dans l’expression et la diffusion de sa pensée, dans la création artistique, les exigences de l’ordre moral et du bien commun étant sauvegardées ; il a le droit également à une information objective. […] Chacun a le droit d’honorer Dieu suivant la juste règle de la conscience et de professer sa religion dans la vie privée et publique. Lactance déclare avec clarté : Nous recevons l’existence pour rendre à Dieu, qui nous l’accorde, le juste hommage qui lui revient, pour le connaître lui seul et ne suivre que lui. Cette obligation de piété filiale nous enchaîne à dieu et nous relie à lui, d’où son nom de religion. […] La famille, fondée sur le mariage librement contracté, un et indissoluble, est et doit être tenue pour la cellule première et naturelle de la société. […] Aux parents, en tout premier lieu, revient le droit d’assurer l’entretien et l’éducation de leurs enfants. […] Tout homme a droit au travail et à l’initiative dans le domaine économique. […] De la nature de l’homme dérive également le droit à la propriété privée des biens, y compris les moyens de production.[…] Par ailleurs, il n’est pas hors de propos de rappeler que la propriété privée comporte en elle-même une fonction sociale. […] A la dignité de la personne humaine est attaché le droit de prendre une part active à la vie publique et de concourir personnellement au bien commun. L’homme comme tel, bien loin d’être l’objet et un élément passif de la vie sociale, en est et doit en être, en rester le sujet, le fondement et la fin. (Pie XII)

 

Dans un contexte d’oppression généralisée pour les deux tiers de l’humanité, après une guerre mondiale où l’inhumain atteignit des abîmes insoupçonnés, improbables à l’entendement et où le dernier tiers s’installait dans hyper-consommation, Jean XXIII convoque la société humaine aux droits de la personne. Il énonce un inventaire qu’il puisa dans la nature réelle de l’homme, nature humaine qui émane de l’amour que Dieu lui porte et du projet de cet amour : que l’homme et la femme deviennent comme lui, un accomplissement plus grand que tout ce qu’ils sont.

A toutes les atteintes aux droits de l’homme et à sa dignité, aux aliénations, Jean XXIII rappelle le NON de Dieu. Il renvoie aux Dix Commandements et au discours sur le mont des Béatitudes. Il n’oublie aucun domaine, car l’homme est fait pour le bonheur sur la Terre et au bonheur surnaturel.

 

Les Devoirs :

 

Jusqu’ici, Nous avons rappelé une suite de droits de nature. Chez l’homme, leur sujet, ils sont liés à autant de devoirs. La loi naturelle confère les uns, impose les autres ; de cette loi ils tiennent leur origine, leur persistance et leur force indéfectible.

Ainsi le droit à la vie entraîne le devoir de la conserver ; le droit à une existence décente comporte le devoir de se conduire avec dignité ; au droit de chercher librement le vrai, répond le devoir d’approfondir et d’élargir cette recherche. […] Tout droit essentiel de l’homme emprunte en effet sa force impérative à la loi naturelle qui le donne et qui impose l’obligation de leurs droits, oublient leurs devoirs ou ne les remplissent qu’imparfaitement risquant de démolir d’une main ce qu’ils construisent de l’autre.

Etres essentiellement sociables, les hommes ont à vivre les uns avec les autres et à promouvoir le bien les uns des autres. […] Mais en outre chacun est appelé à concourir généreusement à l’avènement d’un ordre collectif qui satisfasse toujours plus largement aux droits et aux obligations. […] La dignité de la personne humaine exige que chacun agisse suivant une détermination consciente et libre. […] Une société fondée uniquement sur des rapports de forces n’aurait rien d’humain : elle comprimerait nécessairement la liberté des hommes, au lieu d’aider et d’encourager celle-ci à se développer et à se perfectionner.

Voilà pourquoi une société n’est dûment ordonnée, bienfaisante, respectueuse de la personne  humaine, que si elle se fonde sur la vérité, selon l’avertissement de saint Paul : Rejetez donc le mensonge ; que chacun de vous dise la vérité à son prochain, car nous sommes membres les uns des autres. Cela suppose que soit sincèrement les droits et les devoirs mutuels. Cette société doit, en outre, reposer sur la justice, c’est à dire sur le respect effectif de ses droits et sur l’accomplissement loyal de ses devoirs ; […] Cette société, enfin, doit se réaliser dans la liberté, c’est à dire de la façon qui convient à des êtres raisonnables, faits pour rassurer la responsabilité de leurs actes.

La vie en société, vénérables frères et chers fils, doit être considérée avant tout comme une réalité d’ordre spirituel.

L’ordre propre aux communautés humaines est d’essence morale. En effet, c’est un ordre qui a pour base la vérité, qui se réalise dans la justice, qui demande à être vivifié dans l’amour et qui trouve dans la liberté un équilibre sans cesse rétabli et toujours plus humain. Cet ordre moral – universel, absolu et immuable dans ses principes – a son fondement objectif dans le vrai Dieu transcendant et personnel, Vérité première et Souverain Bien, source la plus profonde de vitalité pour une société ordonnée, féconde et conforme à la dignité des personnes qui la composent. Saint Thomas d’Aquin s’exprime clairement à ce sujet : La volonté humaine a pour règle et pour mesure de son degré de bonté la raison de l’homme ; celle-ci tient son autorité de la loi éternelle, qui n’est autre que la raison divine…Ainsi, c’est bien clair, la bonté du vouloir humain dépend bien plus de la loi éternelle que de la raison humaine.

Aujourd’hui chez les travailleurs de tous les pays, l’exigence est vivement sentie d’être considérés et traités non comme des êtres sans raison ni liberté, dont on use à son gré, mais comme des personnes, dans tous les secteurs de la vie collective : secteur économico-social, culturel et politique.

Une seconde constatation s’impose à tout observateur : l’entrée de la femme dans la vie publique, […], la femme n’admet plus d’être considérée comme un instrument ; elle exige qu’on la traite comme une personne aussi bien au foyer que dans la vie publique.

Les hommes de tout pays et continent sont aujourd’hui citoyens d’un État autonome et indépendant ou ils sont sur le point de l’être. Personne ne veut être soumis à des pouvoirs politiques étrangers à sa communauté ou à son groupe ethnique.

Maintenant, en effet, s’est propagée largement l’idée de l’égalité naturelle de tous les hommes. Aussi, du moins en théorie, ne trouve-t-on plus de justification aux discriminations raciales. […] Maintenant, à mesure que l’homme devient conscient de ses droits, germe comme nécessairement en lui la conscience d’obligations correspondantes : ses propres droits, c’est avant tout comme autant d’expressions de sa dignité qu’il devra faire valoir, et à tous les autres incombera l’obligation de reconnaître ces droits et de les respecter.

Et une fois que les normes de la vie collective se formulent en termes de droits et de devoirs, les hommes s’ouvrent aux valeurs spirituelles et comprennent  ce qu’est la vérité, la justice, l’amour, la liberté ; ils se rendent compte qu’ils appartiennent à une société de cet ordre.

 

Nous lisons ce passage avec un sentiment nostalgique mêlé d’amertume, car si tout un chacun : individu, peuple et nation réclament la reconnaissance et l’application de ses droits combien sont ceux qui acceptent d’assumer les devoirs qui découlent de leurs droits

Jean XXIII écrit cette encyclique sur son lit de mourant, cinq ans avant les évènements de 68, de sinistre mémoire.

Dans un documentaire sur Charles de Gaulle, on posa la question à l’un de ses petits-enfants sur mai 68, il répondit : « On voulait jouir ! » On continue de jouir dans une société qui n’est plus qu’une immense fosse septique : il est interdit d’interdire.

Il semble évident qu’aux droits correspondent les devoirs. Sans cette réciprocité morale et spirituelle, il ne peut se trouver ni justice ni paix.

Qui de nos jours considère dans nos élites la vie en société comme une réalité spirituelle ?

Notre époque subit au quotidien les effets dévastateurs, dramatiques de ses gavages de droits, voir de droits imaginaires, sans aucune considération pour les devoirs les plus élémentaires, ne serait-ce que le respect des lois naturelles et de la morale qui en émane.

La plus part des droits actuels s’exigent dans le rejet des devoirs ; les mêmes exigent de ceux qui osent leur rappeler leurs devoirs que ceux-ci assument les leurs de devoirs au détriment souvent de leurs droits.

Jacques Lang, le plus improbable de nos ministres de la culture, déclara qu’il ne convenait pas de souhaiter le retour de l’ordre moral : venant de lui le contraire eut été une conversion ! Pourtant aucune société ne peut se survivre sans le respect de la morale, car sans elle, il ne peut y avoir de société humaine viable, toutefois, si nécessaire que soit la morale celle-ci n’est pas une fin en soi.

 

Rapports entre les hommes et les pouvoirs publics au sein de chaque communauté politique.

 

A la vie en société manqueraient l’ordre et la fécondité sans la présence d’hommes légitimement investis de l’autorité et qui assurent la sauvegarde des institutions et pourvoient dans une mesure suffisante au bien commun. Leur autorité, ils la tiennent tout entière de Dieu, comme l’enseigne saint Paul : Il n’est pas d’autorité qui ne vienne de Dieu. […] De sain Jean Chrysostome : Qu’il y ait des pouvoirs publics, que des hommes commandent, que d’autres soient subordonnés et que tout n’arrive pas au hasard, voilà, dis-je, ce qui est le fait de la sagesse divine. […], toute communauté humaine a besoin d’une autorité qui la régisse. Celle-ci, tout comme la société, a donc pour auteur la nature et du même coup Dieu lui-même.

[…] Pour autant l’autorité n’échappe point à toute loi. Elle consiste précisément dans le pouvoir de commander selon la droite raison. […] L’ordre absolu des vivants et la fin même de l’homme – de l’homme libre, sujet de devoirs et de droits inviolables, de l’homme origine et fin de la société […] Suivant la droite raison et surtout la foi chrétienne, cet ordre universel trouve nécessairement son origine en Dieu, être personnel et notre créateur à tous ; par conséquent les titres des pouvoirs publics se ramènent à une certaine participation de l’autorité divine elle-même. (Pie XII)

Aussi bien, si le pouvoir s’appuie exclusivement ou principalement sur la menace et la crainte des sanctions pénales ou sur la promesse des récompenses, son action ne réussit aucunement à susciter la recherche du bien commun ; […] L’autorité est avant tout une force morale. Ses détenteurs doivent donc faire appel, en premier lieu, à la conscience, au devoir qui incombe à tous de servir avec empressement les intérêts communs. Mais les hommes sont tous égaux en dignité naturelle ; aucun n’a le pouvoir de déterminer chez un autre le consentement intime ; ce pouvoir est réservé à Dieu, le seul qui scrute et qui juge les décisions secrètes de chacun.

[…] L’autorité exigée par l’ordre moral émane de Dieu. Si donc il arrive aux dirigeants d’édicter des lois ou de prendre des mesures contraires à cet ordre moral et par conséquent, à la volonté divine, ces dispositions ne peuvent obliger les consciences, car il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. […] La législation humaine ne revêt le caractère de loi qu’autant qu’elle se conforme à la juste raison ; d’où il appert u’elle tient se vigueur de la loi éternelle. Mais dans la mesure où elle s’écarte de la raison, on la déclare injuste, elle ne vérifie pas la notion de loi, elle est plutôt une forme de la violence. (Som. Théo. St. Thomas.)

L’origine divine de l’autorité n’enlève aucunement le pouvoir d’élire leurs gouvernants, de définir la forme de l’État ou d’imposer des règles et des bornes à l’exercice de l’autorité. Ainsi la doctrine que Nous venons d’exposer convient à toute espèce de régime vraiment démocratique.

[…] Les actes commandés par l’autorité devront parfaitement corrects en eux-mêmes, d’un contenu moralement bon ou tout au moins susceptible d’être orienté au bien.

[…] Ce bien commun ne peut être défini doctrinalement dans ses aspects essentiels et les plus profonds, ni non plus être déterminé historiquement  qu’en référence à l’homme ; il est, en effet, un élément essentiellement relatif à la nature humaine.

[…] Ici Nous devons attirer l’attention sur le fait que le bien commun concerne l’homme tout entier, avec ses besoins tant spirituels que matériels. Conçu de la sorte, le bien commun réclame des gouvernements une politique appropriée, respectueuse de la hiérarchie des valeurs, ménageant en juste proportion au corps  et à l’âme les ressources qui leur conviennent. […] Aussi les moyens mis en œuvre au profit du bien commun ne peuvent-ils faire obstacle au salut éternel des hommes, mais encore doivent-ils y aider positivement.

Pour la pensée contemporaine, le commun rédie surtout dans la sauvegarde des droits et des devoirs de la personne humaine ; […] Car  la mission essentielle de toute autorité politique est de protéger les droits inviolables de l’être humain et de faire en sorte que chacun s’acquitte plus aisément de sa fonction particulière. (Pie XII)

C’est pourquoi si les pouvoirs publics viennent à méconnaître ou a violer les droits de l’homme, non seulement ils manquent au devoir de leur charge, mais leurs dispositions sont dépourvues de toute valeur juridique. […] Un ordre juridique en harmonie avec l’ordre moral et répondant au degré de maturité politique dont il est l’expression constitue sans aucun doute un facteur fondamental pour la réalisation du bien commun. […] On ne peut, certes admettre la théorie selon laquelle la seule volonté des hommes – individus ou groupes sociaux  - serait la source unique et première d’où naîtraient droits et devoirs des citoyens, et d’où dériveraient la force obligatoire des Constitutions et l’autorité des pouvoirs publics. (Léon XIII)

 

Dieu est la source de l’autorité que les hommes exercent légitimement, c’est à dire dans l’usage naturel de leur mission, mandat, vocation… L’autorité cesse d’être sanctificatrice lorsqu’elle est détournée pour un usage personnel aux dépens de ceux qui la subissent. L’homme a une autorité et un pouvoir naturels liés à sa mission : dominer la création.

Le concept de légitimité demande un long développement pour lequel nous vous prions d’aller à ‘La Vie des Mots’

Depuis le schisme de la Réforme une progressive évolution du concept d’autorité s’est élaborée, des hommes et des femmes se sont accaparé le pouvoir divin sans mandat. Le siècle dit ‘Des Lumières’ a amplifié cette évolution, au point que certains s’accaparèrent tous les pouvoirs de la cité, s’arrogeant même celui de dire ce qu’est la Vérité, de l’imposer contre les consciences, sacrifiant des vies. Il exalta  deux évolutions contradictoires : l’autorité et pouvoir absolus et le refus de toute autorité. C’est ce que l’on peut qualifier de renversement des ordres naturels, du renversement des hiérarchies liées, reliées à celles du ciel, du divin. Dieu s’est alors retiré de ces autorités et pouvoirs et voici que le gouvernement des hommes s’enténèbre au fil des jours.

Toute autorité détenue légitimement ne doit ni ne peut s’exercer en dehors de la recherche du bien commun. L’autorité comme le pouvoir sont une force morale,  leur usage ne peut se distraire ni s’opposer aux exigences de la morale commune et individuelle. Mieux vaut obéir à Dieu qu’aux hommes sans craindre pour sa vie.

L’autorité légitime peut s’exercer dans les formes que les hommes se seront librement choisies – ce qui n’est pas, sur le fond, le cas de la République en France – car la forme n’est pas contradictoire avec la dignité de l’homme pour autant que celle-ci ne s’oppose à son salut.

Le pouvoir au service du bien commun ne peut s’établir en toute légitimité qu’à la condition qu’il prenne en compte tout de l’homme, de sa personne et y revienne.

Il est nécessaire d’accueillir et de respecter l’être humain dans tout ce qui le fait être sans rien rejeter ni nier.

( Une société sans Dieu ne peut prétendre œuvrer au bien commun : Kmers-rouges, nazisme, communisme, fascisme, laïcisme : car la mission essentielle de toute autorité politique est de protéger les droits inviolables de l’être humain et de faire en sorte que chacun s’acquitte plus aisément de sa fonction particulière. Pie XII)

Depuis Léon XIII, l’Église ne cesse d’insister sur la nécessité des corps intermédiaires : nous regrettons, pour ce qui concerne la France, la fossilisation des syndicats et l’ingérence inacceptable de l’État, ce qui déstabilise l’application des principes de notre démocratie et la pervertit.

Le syndicalisme français reste depuis son origine dans une logique pré-révolutionnaire, car il participe de la même culture et, à part la C.F.T.C. il est engagé dans une laïcité active, parfois agressive. Il a contribué à fragiliser le monde ouvrier, à n’en faire qu’une relation mécanique, enfermé qu’il est dans une logique matérialiste, idéologique.

La justice, la recherche du bien commun ne peuvent se contenir dans aucun enfermement idéologique, car leur origine est en Dieu.

Dans les passages 67 à 69, la question de la séparation des pouvoirs et de leur légitimité est réglée. Hormis les évènements de l’histoire, l’Église, de part sa mission, et sa nature est à l’origine de cette séparation. Pour elle la laïcité en tant que mode procédant de la séparation des pouvoirs ne pose aucun problème, sauf si cette laïcité est idéologique et se conjugue sous le mode de la confrontation frontale. C’est malheureusement le cas pour la France. Cette laïcité là n’a aucune racine positive pour la société française qui, à cause d’elle, ne parvient pas vraiment à construire des relations pacifiées entre les citoyens. Elle se fige dans un mode accusateur et de culpabilisation, sa fin se trouve dans le même mouvement que celle de la culture révolutionnaire. A notre époque et qui est inexcusable, c’est que l’on puisse de nos jours trouver des discours qui s’en alimentent et des ‘intellectuels’ qui en font une source de carrière et un propos de café du commerce. 

A la section 70, Jean XXIII met le doigt sur un problème maintenant majeur de nos sociétés modernes : celui du lien ou d’absence de lien entre justice, droit et morale. Aucun pouvoir ne devrait avoir la possibilité de contraindre la justice à déterminer ses actes au profit de lois qui contreviennent à la morale, à la loi de nature.

 

Rapport entre les communautés politiques.

 

La même loi morale qui régit la vie des hommes doit régler aussi les rapports entre les États.

Ce principe s’impose clairement quand on considère que les gouvernants, lorsqu’ils agissent au nom et pour l’intérêt de leur communauté, ne peuvent en aucune façon renoncer à leur dignité d’homme ; dès lors, il ne leur est absolument pas permis de trahir la loi de leur nature, qui est la loi morale.

Ce serait d’ailleurs un non-sens que le fait d’être promus à la conduite de la chose publique contraigne des hommes à abdiquer leur dignité humaine. […]  Écoutez donc, rois, et comprenez ! Instruisez-vous souverains des terres lointaines ! Prêtez l’oreille, vous qui commandez aux peuples ! Car c’est le Seigneur qui vous a donné le pouvoir et le Très-Haut la souveraineté ; c’est lui qui examinera votre conduite et scrutera vos desseins. (Sag. 6, 24)

Or, l’un des premiers impératifs majeurs du bien commun concerne justement la reconnaissance et le respect de l’ordre moral. La bonne organisation des États trouve son assise sur le roc inébranlable et immuable de la loi morale, manifestée par le Créateur lui-même…de l’ordre naturel, et inscrite par lui dans le cœur des hommes en caractères ineffaçables. Comme un phare resplendissant, elle éclaire de ses principes la route à tenir par les hommes et les peuples. Qu’ils se guident sur les signes et les avertissements si sûr qu’elle leur adresse, s’ils ne veulent pas livrer à la tempête et au naufrage toute la peine et l’ingéniosité dépensées pour établir une organisation nouvelle. (Pie XII – Discours de Noël 1941)

[…] L’expérience nous montre les différences souvent notables de savoir, de vertus, de capacités intellectuelles et de ressources matérielles qui distinguent les hommes les uns des autres. Mais cet état de fait ne donne aux plus favorisés aucun droit d’exploiter les plu faibles ; il leur crée, à tous et à chacun, un devoir plus pressant de collaborer à leur élévation réciproque.

[…] Il ne peut, certes, pas exister d’êtres humains supérieurs à d’autres par nature ; par nature tous sont d’égale noblesse. […] D’ailleurs, l’histoire montre que rien n’affecte les peuples comme ce qui touche de près ou de loin à leur honneur, et cette sensibilité est légitime.

A ce propos, Nous devons déclarer de la façon la plus explicite que toute politique tendant à contrarier la vitalité et l’expansion des minorités constitue une faute grave contre la justice, plus grave encore quand ces manœuvres visent à les faire disparaître.

[…] La vérité et la justice présideront donc aux relations entre les communautés politiques, et celles-ci seront animées par une solidarité efficace, […], la mission naturelle du pouvoir politique n’est pas de limiter aux frontières du pays l’horizon des citoyens, mais de sauvegarder avant tout le bien commun national, lequel assurément est inséparable du bien de toute la communauté humaine.

[…] L’organisation internationale doit respecter la liberté. Ce principe interdit aux nations toute ingérence dans les affaires internes des autres comme toute action oppressive à leur égard.

[…] ; ils comprendront plus parfaitement que l’un des devoirs primordiaux issus de leur communauté de nature, c’est de fonder les relations des hommes et des peuples sur la l’amour et non sur la crainte. C’est, en effet, le propre de l’amour d’amener les hommes à une loyale collaboration, susceptible de formes multiples et porteuse d’innombrables bienfaits.

 

Aucun pouvoir ne peut s’arroger le droit de se soustraire à la loi morale individuelle ou pouvoir d’État. Tout pouvoir devrait être déclaré illégitime dans le cas objectif du non-respect de la loi naturelle et de la morale.

Il ne peut y avoir d’action conforme au bien commun sans le respect des exigences morales et des lois naturelles, pas plus qu’il ne peut y avoir de mensonge légitime en politique, puisque le mandat confié n’est pas la propriété de celui qui le détient. La vérité est une exigence morale qui protège les pouvoirs politiques contre les tentations dérivantes.

Dans la section 102, Jean XXIII  revient sur les problèmes d’émigration déjà traités « Mater et magistra » Ce sont aux capitaux d’aller vers les pays pauvres. Le bien commun est aussi au service de l’homme et des peuples.

Le respect des peuples est une valeur fondamentale, elle exige que tout soit fait pour enrayer la corruption entre individus et entre les États.

 

Rapport des individus et des communautés politiques avec la communauté mondiale :

 

De nos jours, les échanges de biens et d’idées, ainsi que les mouvements de populations se sont beaucoup développés. […] Les économies nationales se trouvent peu à peu tellement liées ensembles qu’elles finissent par constituer chacune une partie intégrante d’une unique économie mondiale. […] Le progrès et la prospérité de chaque nation sont à la fois cause et effet de la prospérité et progrès de toutes les autres.

L’unité de la famille humaine a existé en tout temps, puisqu’elle rassemble des êtres sui sont tous égaux en dignité naturelle. C’est donc une nécessité de nature qui exigera toujours qu’on travaille de façon suffisante au bien commun universel, celui qui intéresse l’ensemble de la famille humaine. […] D’autre part, le bien commun universel soulève des problèmes extrêmement graves, difficiles, et qui exigent une solution rapide, surtout quand il s’agit de la défense de la sécurité et de la paix mondiale. D’autre part, au regard du droit, les pouvoirs publics des divers communautés politiques se trouvent sur un pied d’égalité les uns à l’égard des autres ; […], ils ne parviennent plus a affronter et à résoudre efficacement ces problèmes. Non pas qu’eux-mêmes manquent de bonne volonté et d’initiative, mais c’est l’autorité dont ils sont investis qui est insuffisante.

[…] L’ordre moral qui postule une autorité publique pour servir le bien commun dans la société civile, réclame en même temps pour cette autorité les moyens nécessaires à sa tâche. […] De nos jours, le bien commun universel pose des problèmes de dimensions mondiales. Ils ne peuvent être résolus que par une autorité publique dont le pouvoir, la constitution et les moyens d’actions prennent eux aussi des dimensions mondiales et, qui puisse exercer son action sur toute l’étendue de la terre. C’est donc l’ordre moral lui-même qui exige la constitution d’une autorité publique de compétence universelle.

Cet organisme de caractère général, dont l’autorité vaille au plan mondial et qui possède les moyens efficaces pour promouvoir le bien universel, doit être constitué par un accord unanime et non pas imposé par la force. […] Si ce pouvoir supranational ou mondial était instauré de force par les nations plus puissantes, on pourrait craindre qu’il soit au service d’intérêts particuliers ou bien qu’il ne prenne le parti de telle ou telle nation ; ce qui compromettrait la valeur et l’efficacité de son action.

[…] Pas plus que le bien commun d’une nation en particulier, le bien commun universel ne peut être défini sans référence à la personne humaine. […] Il n’appartient pas à l’autorité de la communauté mondiale de limiter l’action que les Etats exercent dans leur sphère propre, ni de se substituer à eux. Elle doit au contraire tâcher de susciter dans tous les pays du monde des conditions qui facilitent non seulement aux gouvernements, mais aussi aux individus et aux corps intermédiaires l’accomplissement de leur fonctions, l’observation de leurs devoirs et l’usage de leurs droits dans des conditions de plus grande sécurité.

 

Jean XXIII fut un précurseur par sa perception de la mondialisation économique et sociale qui résulte des deux guerres mondiales et, que ces deux conflits mirent et figèrent l’humanité dans la contemplation abrupte et abyssale de ses propres crimes, cruautés. Les concepts de progrès technique et scientifique et celui de prospérité font l’objet d’un développement prudent, car se ne sont pas des absolus d’autant qu’ils s’opposent trop souvent à l’accomplissement de l’homme.

Progressivement nous sommes, depuis la Renaissance, sous la dictature du progrès, un progrès s’immencipant de toutes les obligations morales et spirituelles… Après être passé par une forme d’idolâtrie du progrès voici qu’il s’impose à nous comme un nouveau despote… Pourquoi faudrait-il lui être soumis ?

Le bien commun universel, comme celui des communautés, se trouvent gravement contrarié par des intérêts contradictoires, des concepts nationalistes archaïques et d’une régression de la connaissance de l’homme. Les atteintes au bien commun universel prouvent l’incapacité à prévoir. En définitive, si les concepts idéologiques de nationalisme n’arrivent pas à s’effondrer malgré deux conflits mondiaux et certains conflits récents, cela tient surtout à un effondrement identitaire des patries, des peuples dans des organismes internationaux trop éloignés des plus élémentaires besoins des hommes. On ne peut rien construire dans la négation des identités particulières et naturelles des peuples et patries.

L’Union Européenne est le contre exemple de ce qu’il faut faire. Il y a en elle tous les ingrédients pour une résurgence des nationalismes radicaux. La Commission et la geste des États membres font naître des frustrations et des incompréhensions dangereuses. Il y a un risque réel d’éclatement et d’affrontement pour une guerre civile à l’échelle de l’Union, surtout depuis la candidature de la Turquie et l’inconcevable faiblesse envers les migrations du sud, ainsi que l’adhésion accélérée, imprudente des pays de l’Est.

 

Directives pastorales :

 

Une fois de plus, Nous invitons Nos fils à participer activement à la gestion des affaires publiques et Nous leur demandons de contribuer à promouvoir le bien commun de toute la famille humaine ainsi que de leur propre pays. Éclairés par leur foi et mus par la charité, ils s’efforceront aussi d’obtenir que les institutions relatives à la vie économique, sociale, culturelle ou politique ne mettent pas d’entrave, mais au contraire apportent une aide à l’effort de perfectionnement des hommes, tant au plan naturel qu’au plan surnaturel. […] Nos fils ne se contenteront pas à promouvoir le bien. Mais il faut qu’ils soient présents dans les institutions de la société et qu’ils exercent du dedans une influence sur les structures. Or, la civilisation moderne se caractérise surtout par les acquisitions de la science et de la technique. Il n’est donc pas d’action sur les institutions sans compétence scientifique, aptitude technique et qualification professionnelle.

Ces qualités, toutefois, ne suffisent nullement, […] Celui-ci réclame la vérité comme fondement des relations, la justice comme règle, l’amour mutuel comme moteur et la liberté comme climat. […] Ce qui exige des hommes qu’ils vivent leur action comme une synthèse de l’effort scientifique, technique et professionnel avec les plus hautes valeurs spirituelles.

C’est un fait bien connu : dans des pays imprégnés depuis longtemps de la tradition chrétienne, le progrès des sciences et des techniques est actuellement très florissant, et les moyens aptes à réaliser ce qu’on désire ne manquent pas ; mais souvent, l’esprit et le ferment chrétiens y tiennent peu de place. […] Le dommage tient au fait que leur action au plan temporel n’est pas en harmonie avec leur foi. Il est donc nécessaire qu’ils rétablissent leur unité intérieure de pensée et de dispositions, de manière que toute leur activité soit pénétrée par la lumière de la foi et le dynamisme de l’amour.

Si la foi religieuse des croyants est maintes fois en désaccord avec leur manière d’agir, cela provient encore, pensons-Nous, du fait que leur formation en manière de doctrine et de morale chrétiennes est restée insuffisante. Trop souvent, dans beaucoup de milieux, se trouve rompu l’équilibre entre les études religieuses et l’instruction profane, celle-ci se poursuivant jusqu’au stade le plus élevé, tandis-que pour la formation religieuse on reste à un degré élémentaire.

[…] Qu’alors les catholiques veillent avec grand soin à rester conséquents avec eux-mêmes et n’admettre aucun compromis nuisible à l’intégrité de la religion ou de la morale. Mais aussi qu’ils ne considèrent pas leurs seuls intérêts et collaborent loyalement en toute matière bonne en soi ou qui peut mener au bien.(A.A.S., LIII, 1961, p. 456 cf. supra § 252)

[…] On se souviendra, en effet, que les droits et les devoirs de l’Église ne se limitent pas à sauvegarder l’intégrité de la doctrine concernant la foi ou les mœurs, mais que son autorité auprès de ses fils s’étend aussi au domaine profane, lorsqu’il s’agit de juger de l’application de cette doctrine aux cas concrets.

[…]  Ce n’est pas la révolution, mais une évolution harmonieuse qui apportera le salut et la justice. L’œuvre de la violence a toujours consisté à abattre, jamais à construire ; à exaspérer les passions, jamais à les apaiser. Génératrice de haine et de désastre, au lieu de réunir fraternellement, elle jette hommes et partis dans la dure nécessité de reconstruire lentement, après de douloureuses épreuves, sur les ruines amoncelées par la discorde. (Pie XII, 1943) 

[…] A tout croyant, il revient d’être, dans le monde d’aujourd’hui comme une étincelle lumineuse, un centre d’amour et un ferment pour toute la masse. Cela, chacun le sera dans la mesure de son union à Dieu. […] Ton âme veut-elle vaincre les passions qui sont en elle ? Qu’elle se soumette à celui qui est en haut et elle vaincra ce qui est en bas. Et tu auras la paix : la vraie paix, la paix sans équivoque, la paix pleinement établie sur l’ordre. Et quel est l’ordre propre à cette paix ? Dieu commande à l’âme et l’âme commande au corps. Rien de plus ordonné. (St. Augustin, Sermones post Maurinos repeti)

[…] Mais la paix n’est qu’un mot vide de sens, si elle n’est pas fondée sur l’ordre dont Nous avons, avec une fervente espérance, esquissé dans cette encyclique les lignes essentielles ; ordre qui repose sur la vérité, se construit selon la justice, reçoit de la charité sa vie et sa plénitude, et enfin s’exprime efficacement dans la liberté.

 

La chrétienté, de tous les temps, n’a cessé de travailler à l’amélioration de la cité, soucieuse de contribuer à l’élaboration d’une justice toujours plus grande et de la paix.

Les chrétiens s’efforcent d’être présents en toutes les parties de la société, malgré les efforts des sociétés secrètes à les en écarter par toutes les sortes de moyens peu honnêtes et parfois violents.

Il importe pour eux, afin d’être toujours au cœur de la cité des hommes, d’acquérir des compétences toujours plus perfectionnées même pour des services dits serviles. Les compétences professionnelles ne suffisent pas, il faut rechercher une vie d’union au Christ. Le chrétien est certes un citoyen qui doit ne pas oublier qu’il est en marche pour son salut et que son salut, il ne le fera pas seul, mais également au profit des autres, de son prochain. En tous lieux et en toutes charges de sa vie, il doit être un canal de grâces, car tout ce qui est, est en la présence de Dieu.

Dans la section 153, Jean XXIII souligne l’importance d’une formation religieuse supérieure. Tout baptisé doit avoir accès sans restriction à l’enseignement de la doctrine de façon approfondie. Pour cela, encore faut-il que les enseignants soient rigoureusement fidèles à la doctrine, sans infestation idéologique.

Dans nos établissements scolaires religieux et en d’autres institutions, malheureusement ces conditions sont très éloignées des exigences de l’Église. Les défaillances sur ce point sont vertigineuses. Il semble qu’il y ait une volonté délibérée d’enseigner une doctrine adaptée aux convictions des uns et des autres sans grand souci de servir la Vérité. Que d’âmes perdues à cause de manipulations doctrinales, de tant d’abandons, cette souffrance si injuste réclame justice au trône de Dieu. Nous pouvons témoigner non seulement d’indigence doctrinale, mais aussi de pastorale apostate… Nous le vivons au quotidien dans notre propre diocèse.

Tout ne peut être mis sur le dos d’une société laïcisée à outrance, c’est un peu facile… La crise douloureuse que traverse l’église de France tient aussi et sinon plus à des comportements pastoraux très lâches, très compromis avec les tenants des modes intellectuelles et politiques. Il semble bien difficile pour notre hiérarchie de sortir des logiques criminelles des idéologies matérialistes et du modernisme. Un nombre certain de nos responsables agissent en véritables prédateurs de l’espérance.

Il ne peut y avoir pour un catholique le moindre compromis nuisible pour la doctrine ni pour la morale. Le Christ-Jésus n’est pas mort d’un grand éclat de rire ni les martyrs. Face à l’effondrement d’un monde apostat, blasphémateur et infanticide, le catholique doit s’efforcer d’être un canal de grâces, d’une qualité doctrinale ferme, véritable pilier porteur de l’Évangile et un champion de la communion avec le successeur de Pierre.

 

Ce n’est que dans une humble et virile disposition intérieure et extérieure que peut se déverser la paix de Dieu, pas la paix du monde, il en est bien incapable.

Il nous faut ici, comme pour la précédente encyclique, souligner combien elle est prophétique et d’une qualité doctrinale admirable. C’est un outil qui fut inexcusablement ignoré voir rejeté volontairement, alors que s’il avait été suivi d’effets, il n’eut pas manqué de porter d’admirables fruits de justice et de paix.

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MEDITATION DE LA BIBLE

 

Désiré Wasson

 

 

Le Crime de Caïn sur Abel le Juste

 

« Or, au bout d’un certain temps, Caïn présenta des fruits du sol en oblation à Yahvé ; Abel, de son côté, présenta des premiers-nés de son troupeau, ainsi que de leur graisse. Yahvé porta ses regards vers Abel et vers son oblation, mais vers Caïn et vers son oblation il ne les porta pas. Caïn entra dans une grande colère et eut le visage abattu. Yahvé dit à Caïn : « Pourquoi es-tu en colère et pourquoi as-tu le visage abattu ? Si tu agis bien, ne te relèveras-tu pas ? Mais si tu n’agis pas bien, le péché n’est-il point tapi à la porte ? Vers toi [ se porte ] son désir, mais à toi de dominer sur lui. »

« Caïn dit à Abel, son frère : « Allons dehors. » Or, tandis qu’ils étaient dans la campagne, Caïn se dressa contre Abel, son frère, et le tua. Yahvé dit à Caïn : « Où est Abel, ton frère ? » Il dit : « Je ne sais pas ; suis-je le gardien de mon frère, moi ? » [Yahvé] dit : « Qu’as-tu fais ! La voix du sang de ton frère crie vers moi du sol, qui a ouvert sa bouche pour prendre de ta main le sang de ton frère. Lorsque tu cultiveras le sol, il ne te donnera plus sa vigueur. Errant et fugitif  tu seras sur la terre. » Caïn dit à Yahvé : «  Mon châtiment est trop lourd à porter. Voici que tu me chasses aujourd’hui  de dessus la face du sol, et de ta face je dois me cacher. Je serai errant et fugitif sur la terre, et alors, quiconque me rencontrera me tuera. » Yahvé lui dit : «  Eh bien ! Quiconque tuera Caïn, sept fois subira la vengeance. » Et Yahvé mit un signe sur Caïn pour que ne le frappe pas quiconque le reconnaîtrait. Caïn se retira loin de la face de Yahvé, et il habita au pays de Nod, à l’est de l’Eden. » (Gn. 4, 3-16)

 

Ce passage est, pour le rédacteur inspiré par Dieu

 – Moïse – contient un enseignement sur la condition humaine après le péché originel. Il passe par la culture de l’époque, il a donc recours à des résonances mythologiques, ce qui ne signifie pas que cet épisode ne soit pas historiquement vrai, comme est historiquement vrai la faute originelle.

La Révélation hébraïco-chrétienne transcende les cultures environnantes des époques. L’Ancien Testament est ordonné au Christ Jésus qui l’accomplit, donnant au genre humain la possibilité de son salut.

La méditation que nous vous proposons est infiniment douloureuse et pleine de douce espérance : ne voit-on pas un Dieu déjà soucieux du salut de ses enfants !

Nous avancerons étape par étape, doucement, sachant que le peu que nous savons n’est rien par comparaison à l’abîme de notre ignorance. 

 

Considérons la micro-société que représente la famille d’Adam et Eve. Nous voyons deux enfants cités, les deux garçons de la maison : Caïn l’aîné et Abel le cadet. Adam et Eve gèrent une exploitation qui leur permet de vivre et leurs deux garçons aident leur père à ce rude labeur. Tous les deux ont un  état de vie différent : Caïn est cultivateur, Abel est pasteur, il surveille les troupeaux.

Il se dessine les diverses aptitudes qui feront la richesse productive et créatrice de l’humanité. Il n’y a rien qui, dans ce passage et dans tous les Testaments, méprise un travail plutôt qu’un autre. L’appel, la vocation originelle de l’homme est ici parfaitement rendue. Il doit soumettre la création…

Caïn est l’aîné d’Abel, Ésaü est l’aîné de Jacob. Les aînés de Joseph voulurent tuer leur frère. Les aînés du peuple élu décidèrent la mort de Jésus.

Caïn et Abel reçurent la même éducation d’Adam et Eve. Ils apprirent l’histoire de la chute et la Promesse de salut. Ils furent formés au discernement, à l’écoute de la conscience morale, à l’usage du libre arbitre. Et pourtant, comme dans la plupart des familles, l’un d’entre eux faillira, car tous ont également péché en Adam et Eve. Tous ont la faculté de faire ce qu’ils veulent de la grâce que Dieu met à leur disposition.  

 

« Or, au bout d’un certain temps, Caïn présenta des fruits du sol en oblation à Yahvé ; Abel, de son côté, présenta des premiers-nés de son troupeau, ainsi que de leur graisse. »

 

Caïn offrit en oblation les fruits de la Terre et Abel les premiers –nés de son troupeau.

Dieu a-t-il méprisé l’oblation de Caïn à cause de sa nature propre ? Aucun travail n’est méprisable en lui-même et ce qui fait la valeur d’un travail, c’est l’intention qu’on y met et qu’il soit dans l’ordre moral.

Pourquoi Caïn et Abel ne se sont-ils pas unis pour offrir l’oblation ?

Pourquoi l’oblation de Caïn n’a-t-elle pas été regardée par Dieu ?

Qu’a fait de plus Abel pour que son oblation soit agrée par Dieu ? 

« Yahvé porta ses regards vers Abel et vers son oblation, mais vers Caïn et vers son oblation il ne les porta pas. »

 

Ce passage, illustre-t-il simplement la liberté de Dieu, un choix de bon plaisir ? Si c’est le cas, Dieu ne manquerait-il pas de qualités ?

Caïn s’est-il contenté d’offrir son superflu ?

Pourquoi Abel donna-t-il le meilleur de son troupeau, de sa fortune ? Il pouvait lui aussi offrir des bêtes fatiguées, qui n’avaient plus aucun rapport, des bêtes malades. Il offrit des bêtes pleines de promesses de vie et de rapports. Il ne calcula pas, il donna tout par ces premiers-nés là.

Abel aurait pu faire comme son frère et ne donner que des prémices des fruits du sol.

Chacun fit librement ce que son cœur lui dictait.

Que c’est-il donc passé pour que Dieu réprouve l’oblation de Caïn ?

On ne peut y répondre directement. Arrêtons-nous sur un aspect rarement souligné : ce drame, s’il est un drame métaphysique, est aussi et avant tout un drame familial. C’est peut-être dans l’expérience parentale qu’il faut également en chercher la compréhension.

Si on a la grâce d’avoir plusieurs enfants, on constate qu’ils sont tous très différents quant à leur personnalité, même s’il y a des traits de caractères communs aux géniteurs, aux ascendants. Il y a une constante, notre souffrance vient de l’inquiétude, car il se peut que notre progéniture ait un individu difficile, qui tournera mal ?

Quelle sera la parole, le regard, le geste qui fera que l’un nous échappera et l’autre non ?

Que l’un sera un assassin et l’autre pas ?

Que l’un décidera de sa damnation et l’autre de son salut ?

 

Nous sommes au seuil du mystère d’iniquité et de l’espérance : l’un accepte la grâce, l’autre la refuse.

Si Dieu aime d’un amour égal tout homme, on ne peut enseigner qu’il ne voudrait pas le salut de tout homme. Tout homme et toute femme a la possibilité de son salut : « J’appellerai tous les hommes à moi. » Le problème de la grâce, n’est pas tant celui de la liberté de Dieu que celui de la liberté de l’homme et de la femme. A tout instant, fraction de seconde, chacun peut rejeter ou accueillir Dieu dans sa vie, la grâce elle ne cesse pas pour autant de se proposer.

Dans Maria Voltorta, on découvre les inquiétudes de la maman de Judas Iscariote ; d’un certain point de vue, on peut considérer que Marie, la mère de Jésus et la mère de Judas ont incarné les deux facettes du drame spirituel et maternel d’Eve :

 

[…] Et je suis venu ici avec empressement pour trouver du réconfort auprès d’une mère et  pour lui donner le réconfort de savoir de savoir que son fils sert le Seigneur ! […] Merci de tant l’aimer ! Car c’est ton amour qui le sauve, mon Judas… 

Oui. C’est ‘notre’ amour qui le…, soutient…

Notre amour ! Comme tu es bon Seigneur ! Mettre mon pauvre amour tout proche, uni au tien qui est divin… ! Oh ! quelle parole tu m’as dite ! Quelle sécurité ! Quel réconfort et quelle paix tu me donnes avec elle ! Tant qu’il n’y avait que mon pauvre amour, Judas pouvait en tirer peu de profit. Mais Toi, avec ton pardon…mon Judas se vaincra lui-même enfin, pour toujours, n’est-ce pas, Maître ? (tm. 6, page 45, édition 1983, traduit par Sauvage)

 

Envisageons que la matière choisie pour l’offrande de Caïn exprimait la révolte d’un enfant jaloux de la naissance de son frère ? Et que, sur cette jalousie jamais dépassée, Satan, le Tentateur, soit venu murmurer en vue d’une révolte plus grande. Lui qui a perdu son combat malgré la chute, car Adam et Eve ont reconnu leur faute, ils sont passés aux aveux. Caïn, dans l’écoute séduisante des murmures sataniques, a pu nourrir des sentiments de mépris et de rejets envers ses parents et ce Dieu.

N’ont-ils pas refusé de se saisir de l’autre fruit !

N’ont-ils pas eu la faiblesse de reconnaître leur faute et de croire en la Promesse, donc de donner leur foi à ce Dieu !

Quel lien se sera-t-il établi entre Caïn et Satan ? Car la jalousie de Caïn va lui faire commettre un assassina prémédité. Il l’aura décidé dans son cœur et dans son intelligence. Toute sa liberté s’y trouva engagée.

Alors le choix d’une oblation des seuls fruits du sol n’est peut-être pas aussi innocent qu’il n’y paraît ?

Il aurait pu demander à son frère Abel de lui donner du bétail ou de le lui acheter en échange des fruits de son travail. Il ne l’a pas fait ! Pourquoi ?

Quel rapport avait-il avec Eve sa mère ? Sans doute faut-il chercher chez Isaac et Rébecca avec leurs deux enfants : Ésaü, le chasseur – c’est à dire l’inconstant – et Jacob, celui qui écoute, le fils du foyer – celui qui protège qui rassure, une générosité tranquille – la tradition établie que Dieu parle aux enfants par la maman, Jacob écoutait sa mère Rébecca. 

Caïn écoutait-il sa mère ? 

On ne peut que supposer ; la nature humaine depuis la faute originelle est la même, les mécanismes psycho-affectifs n’ont pas changé. Ici, c’est davantage le parent que nous sommes qui, à la lumière de son expérience, essaie de comprendre, de poser un regard neuf, un peu original.

Nous savons bien ce qu’il en est lorsque la relation entre parents et enfants tombe dans la nuit. Aimer, c’est aussi pleurer. Ce premier drame familial est aussi le second drame métaphysique. On ne peut dissocier les deux, car ce serait alors oublier que le salut est une œuvre incarnée. Le ciel n’a pas besoin d’être sauvé, pas plus qu’il n’a besoin de croire. Dieu est le seul ‘athée’. D’expérience personnelle, il ne sait pas ce qu’est la foi. Il n’a pas besoin de croire en lui-même puisqu’il se suffit de lui-même à lui-même.

Ce drame est une totalité. C’est humainement très banal mais il est le premier. C’est le contenant de tous les drames à venir. Toute la dramaturgie de l’homme s’y trouve, il n’y manque rien.

Que c’est-il passé sur l’offrande ?

Dieu a-t-il manifesté sa gloire au moment du sacrifice d’Abel ?

Caïn a-t-il compris au fond de lui que Dieu réprouvait son sacrifice ?

Caïn souhaitait-il cette rupture ?

Y avait-il chez Abel une joie si forte qu’elle le transfigura, et alors que Caïn comprit le jugement de Dieu ?

Peut-être un peu de tout cela, car Caïn n’est pas devenu subitement un assassin. Son acte semble être une conclusion, une décision mûrement réfléchie que rien ne vient distraire… On sait qu’un assassin est souvent un menteur, Caïn mentira à Dieu et, nous n’ignorons pas qu’il existe des formes très subtiles du mensonge. Le mensonge est un corrosif de l’âme, de la personnalité ; quand il est une pratique habituelle, il n’est pas rare qu’il soit à l’origine d’une grande confusion intérieure ou du moins son terreau. Le mensonge est un déstructurant de la personnalité.

 

Caïn entra dans une grande colère et eut le visage abattu. Yahvé dit à Caïn : « Pourquoi es-tu en colère et pourquoi as-tu le visage abattu ? Si tu agis bien, ne te relèveras-tu pas ? Mais si tu n’agis pas bien, le péché n’est-il point tapi à la porte ? Vers toi [ se porte ] son désir, mais à toi de dominer sur lui. »

 

Dieu ne laisse pas Caïn seul devant sa colère. Il entre au cœur de sa conscience. Le rédacteur inspiré jette une lumière spécifique sur la grandeur de l’homme. Il met en relief une qualité que seul l’humain possède : la conscience de ce qui est bien et mal.

La conscience pourrait être représentée par une salle des pas perdus. En son centre se trouve un lieu sanctuarisé où viennent s’implanter l’éducation, la culture, l’hérédité et la foi. Au cœur de ce lieu,il y a le tabernacle, un lieu de rencontre. Dieu s’y trouve ainsi que l’être de la personne. La tente de la rencontre où se décide, dans un murmure inviolable entre l’âme et Dieu, la forme de notre immortalité pour une éternité librement consentie.

Observons comme Dieu est plein de retenu, Moïse n’était pas ignorant du débat intérieur. Dieu ne s’impose pas. Il pourrait le faire mais il est Dieu. Il respecte son projet sur l’homme, plus que jamais décidé à ce que l’homme vienne à lui librement.

On sent toute la tragédie que ce murmure contient ; sont présentes les larmes d’un papa et d’une maman qui espèrent mais ne peuvent plus prendre la décision à la place de leur enfant. Il est une personne !

Dieu attend la réponse avec sa grâce prête à se déverser en abondance. Caïn va dire non ! Ne nous semble-t-il pas préfigurer le Judas tragique des Jardins de Gethsémani ? « Mon ami ! »

Caïn a déjà décidé. Il a décidé depuis longtemps. Ce crime est une conclusion, l’aboutissement d’une succession de petit rien qui déconstruisent un être aussi fragile que l’homme ou la femme. Il n’entend déjà plus la parole de Dieu. Judas ne l’entendit jamais : menteur, voleur, luxurieux et sans doute sataniste.  Pense-t-il au fruit qu’il espère saisir, ce fruit que ses parents ont laissé pour un pardon ?

 

 

Caïn dit à Abel, son frère : « Allons dehors. » Or, tandis qu’ils étaient dans la campagne, Caïn se dressa contre Abel, son frère, et le tua.

 

Caïn tue son frère Abel ! Meurtre prémédité, calculé, pensé, voulu dans un débat intérieur où tout de son immortalité et de son éternité se joua.

Le premier crime de sang, aujourd’hui crime ordinaire, car enfin peut-on être jaloux d’un enfant à naître ? La banalité sanglante ! Le quotidien mortifère de tant de famille !

Il scelle une totalité : rejet de Dieu, rejet de ses parents, rejet de la communauté humaine…

Y-a-t-il seulement encore de l’humain chez lui… ?

Qui peut répondre à cette question ?

Dans le sang d’Abel le Juste, dans la masse, sur le couteau de pierre, dans le silence crépusculaire, la passion de Notre Seigneur s’inscrit. Elle y est inscrite comme sont inscrits tous les assassins de l’histoire… Le pas du diable est toujours à côté de celui de Dieu…

 

Yahvé dit à Caïn : « Où est Abel, ton frère ? » Il dit : « Je ne sais pas ; suis-je le gardien de mon frère, moi ? » [Yahvé] dit : « Qu’as-tu fais ! La voix du sang de ton frère crie vers moi du sol, qui a ouvert sa bouche pour prendre de ta main le sang de ton frère.

 

Caïn ne se repend pas de son crime, il n’éprouve aucun remord. C’est un homme d’orgueil qui répond à Dieu. Lui l’aîné n’est en rien responsable de son frère. Mais là  a-t-il seulement aimé un jour, une heure, une minute, une seconde ?

Il y a là une résonance troublante avec la réaction d’Adam : c’est la femme que tu m’as donnée…  Adam n’avait pas protégé Eve. Caïn a-t-il sans doute ressenti un moment de grande puissance, lui aussi était Dieu ! Ne venait-il pas de décider de la vie et de la mort de son frère, un autre homme !

Et où était Dieu qui l’a laissé faire ?

N’est-il pas l’égal de Dieu maintenant ?

Nous sommes tous responsables quelque part du frère très proche et du plus éloigné. On ne fait pas son salut seul. On ne se damne pas seul…

Ah ! Liberté ! Absolu de toutes les tragédies ! Homme pleure et sourit en usant d’elle. Elle est ta grandeur qui t’élève, elle est ta grandeur qui t’enténèbre… Si tu savais qui tu es l’homme, si tu savais !

Observons que la réaction de Caïn est presque accusatrice contre son frère : si je l’ai tué, c’est de sa faute ! Si je tue mon enfant qui va naître ou si je tue l’enfant à naître, c’est la faute de l’enfant… Il n’avait qu’à ne pas être là… ! Il n’y a que le silence comme réponse. C’est ici l’abîme vertigineux de l’homme qui se renie.

 

Caïn dit à Yahvé : «  Mon châtiment est trop lourd à porter. Voici que tu me chasses aujourd’hui  de dessus la face du sol, et de ta face je dois me cacher. Je serai errant et fugitif sur la terre, et alors, quiconque me rencontrera me tuera. » Yahvé lui dit : «  Eh bien ! Quiconque tuera Caïn, sept fois

subira la vengeance. » Et Yahvé mit un signe sur Caïn pour que ne le frappe pas quiconque le reconnaîtrait. Caïn se retira loin de la face de Yahvé, et il habita au pays de Nod, à l’est de l’Eden. 

 

Caïn ne se repend pas. Effrayé du jugement de Dieu, il lui demande une protection, lui qui n’a pas protégé son frère Abel contre lui, lui l’assassin ! N’y a-t-il pas là de quoi chanter :Faites-moi rire, faites-moi rire ?

Le signe que Dieu lui accorde est la prison : je suis un assassin ; je suis un assassin… ! Dieu le protège mais signifie aussi son dégoût de sang versé, car il sait que ce sera bientôt le sien de sang que cette Terre, maudite maintenant, boira pour retrouver la bénédiction.

 

Si vous le voulez bien, revenons à cette affirmation dite plus haut : ce drame est aussi un drame humain, familial… Adam et Eve savent ce qu’est l’étendue de la faute originelle. Ils en payent le prix fort, car sans cette faute, il n’y aurait jamais eu le meurtre d’un fils. Ils sont en présence de ce que sera la Promesse, son prix est le Sang d’un Juste, du Juste.

Sont-ils responsables de la décision mauvaise de Caïn, certainement pas. Il avait toute possibilité d’être auprès de ses parents pour rester en amitié auprès d’un Dieu toujours aimant.

Et que l’on ne vienne plus nous faire de psychologie de bazar au sujet de l’homme : la condition humaine est l’homme blessé et racheté. C’est l’homme et la femme blessés qui sourit à l’horizon, car ils savent qu’il y a plus fort que leur blessure et que ce plus fort est une espérance fidèle, une présence d’amour qu’il faut inviter dans son cœur… La raison de l’homme est Dieu… La raison de Dieu est l’homme…

 

 

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L’ESCHATOLOGIE

 

ARNAUD DUMOUCH  

 

LE JUGEMENT DERNIER

 

CHAPITRE 6:

 

LE SIXIÈME JOUR ET L’ANTÉCHRIST

 

Deux textes de l’Écriture sont importants pour la connaissance de la venue et de l’œuvre du dernier Antéchrist[1].

 

“Lorsque vous verrez l’abomination de la désolation dont a parlé le prophète Daniel, installée dans le lieu saint (que le lecteur comprenne !), alors que ceux qui sont en Judée s’enfuient dans les montagnes...[2]

“Nous vous le demandons, frères, à propos de la Venue de notre Seigneur Jésus Christ et de notre rassemblement auprès de lui, ne vous laissez pas trop vite mettre hors de sens ni alarmer par des manifestations de l’Esprit, des paroles ou des lettres données comme venant de nous, et qui vous feraient penser que le jour du Seigneur est déjà là. Que personne ne vous abuse d’aucune manière. Auparavant doit venir l’apostasie et se révéler l’Homme impie, l’être perdu, l’Adversaire, celui qui s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu’à s’asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu, se produisant lui-même comme Dieu. Vous vous rappelez, n’est-ce pas, que quand j’étais encore auprès de vous je vous disais cela(...). Sa venue à lui, l’Impie, aura été marquée, par l’influence de Satan, de toutes espèces d’œuvres de puissance, de signes et de prodiges mensongers, comme de toutes les tromperies du mal, à l’adresse de ceux qui sont voués à la perdition pour n’avoir pas accueilli l’amour de la vérité qui leur aurait valu d’être sauvés. Voilà pourquoi Dieu leur envoie une influence qui les égare, qui les pousse à croire au mensonge en sorte que soient condamnés tous ceux qui auront refusé de croire la vérité et pris parti pour le mal [3]

 

Avant tout, si l’on suit la lettre des Ecritures Saintes, on peut dire sans hésiter que la foi des chrétiens tient pour certaine onze affirmations concernant l’Antéchrist de la fin du monde [4]:

 

1- Première certitude : L'Antéchrist sera une épreuve pour les bons, un châtiment éducatif pour les pauvres pécheurs, une voie de perdition pour les pervers.

2- L'Antéchrist sera un homme, un individu.

3- L'Antéchrist ne sera pas Satan incarné, ni un démon sous une apparence humaine, mais un membre de la famille humaine, un homme, rien qu'un homme.

4- L'Antéchrist sera séducteur par certaines qualités de sa personne.

5- Les débuts de l'Antéchrist seront humbles et peu remarqués.

6- L'Antéchrist grandira et fera des conquêtes.

7- L'empire de l'Antéchrist deviendra universel.

8- L'Antéchrist fera une guerre acharnée à Dieu et à l'Église.

9- L'Antéchrist se fera lui-même passer pour Dieu, il voudra être adoré lui seul.

10- C'est au moyen de prodiges diaboliques que l'Antéchrist prétendra démontrer qu'il est Dieu.

11- La domination et la persécution de l'Antéchrist seront passagères. L'homme de péché sera détruit.

 

La première question qui se pose est la suivante. Qui est l’Antéchrist? Est-il un homme fait de chair et de sang ou le symbole personnifié d’une idéologie, d’un anti-Évangile? Les deux thèses ont été soutenues par les théologiens. Pourtant, si l’on regarde les textes de l’Écriture Sainte qui nous annoncent sa venue, ils semblent trancher sans ambiguïté pour un Antéchrist homme, fait de chair et de sang. Saint Jean, dans sa première épître ne cesse de distinguer «l’esprit de l’Antéchrist» et « l’Antéchrist ». Le premier est une forme de pensée: «Tout esprit qui ne confesse pas Jésus n’est pas de Dieu. C’est là l’esprit de l’Antéchrist[5] ». Au contraire, l’Antéchrist doit, selon lui, venir à une époque bien précise comme vient un faux prophète: «Petits enfants, voici venue la dernière heure. Vous avez entendu dire que l’Antéchrist doit venir; et déjà maintenant beaucoup d’Antéchrists sont venus, à quoi nous reconnaissons que la dernière heure est là[6] ». Son enseignement concorde en tout point avec celui de saint Paul cité ci-dessus. Il semble que la prédication unanime des apôtres a consisté à rappeler que le Christ ne reviendrait pas dans sa gloire avant que ne vienne l’Antéchrist. Chaque génération de chrétiens eut son Antéchrist dont la venue fut permise par Dieu pour approfondir la fidélité de ses disciples et leur pauvreté dans la lutte. Pour eux, cet Antéchrist fut donné comme le signe de la fin de leur monde. Cela se réalisa très concrètement puisque, depuis que le monde est monde, il n’existe pas de génération qui n’ait eu sa part de malheurs politiques, guerres, famines etc.

Cependant, la fin des fins, celle qui précède la résurrection des morts, est aussi l’ère d’un Antéchrist particulier dont les autres ne sont que des préfigurations. Ainsi, à moins de forcer les textes de l’Écriture, il semble certain que l’Antéchrist est un homme qui prêche avec succès une forme d’Antichristianisme. Cela concorde d’ailleurs avec tout ce que l’histoire nous montre des antichristianismes. Une idée, quelle qu’elle soit, ne brille puissamment que si elle est incarnée par un homme talentueux qui sait enthousiasmer les foules. L’exemple le plus typique de cette nécessité d’une incarnation est l’histoire du nazisme. Cet antichristianisme est épais dans ses principes. Établir la valeur des hommes sur une base strictement raciale, est indigne d’un siècle cultivé et du peuple de Goethe. Qu’un barbare du XVème siècle avant notre ère[7] ait pu élaborer une telle doctrine pour défendre sa tribu contre les menaces d’une autre, cela peut se comprendre. Mais qu’une nation chrétienne y sombre presque tout entière et avec émotion, cela dépasse la raison. Hitler est un Antéchrist, l’un des plus puissants que l’humanité ait connu. A ce propos, citons la prophétie étonnante de sainte Odile*[8], morte en 720 et patronne de l’Alsace. Dans l’une de ses visions, elle attribue à Hitler le qualificatif d’Antéchrist.

 

“Ecoute, écoute, ô mon frère. J’ai vu la terreur des forêts et des montagnes. L’épouvante a glacé les peuples. Il est venu le temps où la Germanie sera appelée la plus belliqueuse des nations de la terre. Elle est arrivée l’époque où surgira de son sein le guerrier terrible qui entreprendra la guerre du monde et que les peuples en armes appelleront l’Antéchrist, celui qui sera maudit par les mères pleurant, comme Rachel, leurs enfants et ne voulant pas être consolées. Vingt peuples combattront dans cette guerre. Le conquérant partira des rives du Danube. La guerre qu’il entreprendra sera la plus effroyable que les humains aient jamais subie. Ses armées seront flamboyantes et les casques de ses soldats seront hérissées de pointes qui lanceront des éclairs pendant que leurs mains brandiront des torches enflammées. Il remportera des victoires sur terre, sur mer et jusque dans les airs, car on verra ses guerriers ailés, dans des chevauchées inimaginables, s’élever dans le firmament pour y saisir les étoiles et les projeter sur les villes et y allumer des grands incendies. Les nations seront dans l’étonnement et s’écrieront: «D’où vient sa force? ” La terre sera bouleversée par le choc des combats; Les fleuves seront rougis de sang, et les monstres marins eux-mêmes s’enfuiront épouvantés jusqu’au fond des océans. Les générations futures s’étonneront que ses adversaires n’aient pu entraver la marche de ses victoires. Des torrents de sang humain couleront autour de la montagne, ce sera la dernière bataille «Ultima pugna ». Cependant, le conquérant aura atteint l’apogée de ses triomphes vers le milieu du sixième mois de la deuxième année des hostilités, ce sera la fin de la première période, dite de victoire sanglante. II croira alors pouvoir dicter ses conditions La seconde partie de la guerre égalera en lon­gueur la moitié de la première; Elle sera appelée « tempus diuitionis », la période de la diminution. Elle sera féconde en surprises qui feront frémir les peuples. Dans la troisième période, tous les peuples spo­liés recouvreront ce qu’ils ont perdu et quelque chose de plus. La région de Lutèce sera sauvée elle-même à cause de ses montagnes bénies et de ses femmes dévotes. Pourtant, tous auront cru à sa perte, mais les peuples se rendront sur la montagne et rendront grâce au Seigneur. Car les hommes auront vu de telles abomina­tions dans cette guerre que leurs générations n’en voudront plus jamais. Malheur pourtant encore à ceux qui ne craignent pas l’Antéchrist, car il suscitera de nouveaux meur­tres. Mais l’ère de la paix sous le feu sera arrivée et l’on verra les deux cornes de la lune se réunir à la croix, car en ces jours, les hommes effrayés adoreront Dieu en vérité, et le soleil brillera d’un éclat inaccoutumé.[9]

 

Mais Hitler n’est pas le dernier Antéchrist. Les Écritures nous décrivent son œuvre avec suffisamment de précision pour que nous puissions le reconnaître au moment de sa venue. Hitler fut avec Lénine, Staline, Pol Pot, Mao, l’un de ces terribles Antéchrist en matière de persécutions extérieures: “Celui qui tue le corps [10]”, dirait Jésus, mais dont l’âme reconnaît assez facilement la perversité. L’Antéchrist final sera plus terrible au plan de la vie divine. Il sera celui “qui, après avoir tué le corps, a le pouvoir de jeter dans la géhenne l’âme et le corps.[11]

 

Qui est le dernier Antéchrist ?

(Chose probable)

 

“Quatre royaumes viendront qui n’auront pas la force du précédent. Et, au terme de leur règne, au temps de la plénitude de leurs péchés, se lèvera un roi au visage fier, sachant pénétrer les énigmes. Sa puissance croîtra en force (non en raison de sa propre puissance), il tramera des choses inouïes, il prospérera dans ses entreprises, il détruira des puissants et le peuple des saints. Et, par son intelligence, la trahison réussira entre ses mains. Il s’exaltera en son cœur et détruira un grand nombre par surprise. Il s’opposera au Prince des princes (le Christ) mais, sans acte de main, il sera brisé. Elle est vraie la vision qui a été dite.[12]

 

Le dernier Antéchrist naîtra, confie la Vierge Marie aux enfants de la Salette, d’une fausse vierge hébraïque et d’un évêque[13]. Pour celui qui sait lire le genre apocalyptique utilisé, la traduction est simple. Il sera le fruit, en raison de toutes ses pensées, d’un judéo-christianisme mal orienté. La fausse vierge symbolise la foi d’Israël et l’évêque la foi chrétienne qui, loin de se tourner vers Dieu, cherche une réussite terrestre. Des prophéties de l’Écriture, nous pouvons déduire qu’il sera un homme brillant intellectuellement. Il analysera les réalités de son époque de manière perspicace et il s’en fera une idée précise à partir de la connaissance de l’homme selon toutes ses dimensions. Si l’on suit saint Paul, ces brillantes capacités ne seront pas seulement naturelles. Elles seront aidées et surélevées par une influence satanique[14]. Faut-il en conclure qu’il aura fait un pacte lucide avec Lucifer*? Certains théologiens ont cru pouvoir déduire cela du texte de saint Paul cité au début du chapitre. De fait, le texte[15] suggère une telle interprétation mais ne le prouve pas vraiment. Je penche personnellement pour cette thèse. Mon opinion est fondée sur plusieurs observations et déductions[16]. Ceci étant dit, il s’agit d’hypothèses. De plus, elles ne préjugent pas du fond d’une âme.

L’essentiel n’est pas là. Le dernier Antéchrist, par blasphème direct contre l’Esprit Saint (ce que nous appelions un culte Luciférien) ou par humanisme convaincu et sincère (implicitement sataniste[17]), servira sans le savoir ou en le sachant, le démon. Satan, quant à lui, sait ce qu’il fait. Sa lutte à lui est “théologale”, explicitement et consciemment orientée contre la charité.

La deuxième “qualité ” de l’Antéchrist sera son exceptionnel talent pour la parole. Non seulement ce qu’il dira sera intelligent, mais il saura grâce à un grand charisme pédagogique l’exposer à tous. Il ne fera pas que convaincre, il enthousiasmera. Il aura cette qualité qui fait les grands hommes politiques et leur permet d’entraîner les peuples dans de grandes réalisations.

Enfin, et c’est la troisième qualité qu’il est possible de déduire des textes prophétiques, l’Antéchrist saura prouver la vérité de ses dires par des réalisations efficaces. Il produira vraiment du bien, de grandes oeuvres humaines dont nous essayerons de définir la nature. Les trois qualités, intelligence, parole et efficacité font aussi les grands apôtres chrétiens mais eux savent mettre les qualités humaines et charismatiques que Dieu leur donne au service de l’Évangile. ­

Peut-on savoir ce que le dernier Antéchrist proposera aux nations pour les séduire et réussir dans ses entreprises? Quelle est la nature de l’antichristianisme de la fin? A partir de l’Écriture, nous savons qu’il sera pour les hommes la meilleure chose qui puisse exister en vue du bonheur terrestre. Mais, au regard de Dieu, il sera la pire car il produira efficacement dans l’esprit des peuples de l’égoïsme et de l’orgueil.

Quelle est donc l’idéologie, le projet de société le plus capable de produire égoïsme et orgueil? Je pense que le dernier antichristianisme sera une forme politique du blasphème contre l’Esprit saint. Le monde entier, sachant que Dieu existe et connaissant ses projets, se décidera à construire lucidement un monde dont il est absent. Il s’agit, nous l’avons montré, d’un péché explicitement et consciemment tourné contre la charité.

 

 

 

L’œuvre de l’Antéchrist

(Chose certaine pour le sens général, indécise pour le comment concret)

 

Pour comprendre son oeuvre, Jésus[18] invite à se référer aux prophéties du prophète Daniel. Voici les deux principales.

 

“ (...) et après soixante-deux semaines, un messie sera supprimé, et il n’y a plus pour lui (de place). La ville et le sanctuaire seront détruits par un prince qui viendra. Sa fin sera dans le cataclysme et, jusqu’à la fin, la guerre et les désastres décrétés. Et il consolidera une alliance avec un grand nombre. Le temps d’une semaine; Et le temps d’une demi-semaine, il fera cesser le sacrifice perpétuel et l’oblation et sur l’aile du temple sera l’abomination de la désolation jusqu’à la fin, jusqu’au terme assigné pour le désolateur.[19]

“ Je regardais, moi Daniel, et voici: deux anges se tenaient debout, de part et d’autre du fleuve. L’un dit à l’homme vêtu de lin (le Christ) qui était en amont du fleuve. Quand se produiront ces choses inouïes? J’entendis l’homme vêtu de lin, qui se tenait en amont du fleuve. Il leva la main droite et la main gauche vers le ciel et attesta par l’Eternel Vivant: “ pour un temps, des temps et un demi-temps, et toutes ces choses s’achèveront quand sera achevé l’écrasement de la force du Peuple Saint.” J’écoutais sans comprendre; puis je dis: Mon Seigneur, quel sera cet achèvement? Il dit: Va, Daniel; ces paroles sont écrites et scellées jusqu’au temps de la Fin; Beaucoup seront lavés, blanchis et purifiés; les méchants feront le mal, les méchants ne comprendront point; les savants comprendront. A compter du moment où sera aboli le sacrifice perpétuel et posée l’abomination de la désolation, 1290 jours. Heureux qui tiendra et atteindra 1335 jours. Pour toi, va, prend ton repos; et tu lèveras pour ta part à la fin des jours.[20]

 

Ces deux prophéties nous sont données selon un genre littéraire apocalyptique. Le Seigneur utilise cette manière symbolique de s’exprimer lorsqu’il veut nous amener à comprendre des événements qui à ses yeux se ressemblent mais peuvent se produire plusieurs fois au cours des époques. Leur première réalisation est racontée dans le livre des martyrs d’Israël*[21]. Sur ordre des princes grecs, on interdit le culte de Dieu. On transforma le temple de Jérusalem* en un sanctuaire dédié à Zeus Olympien (l’Abomination de la désolation dans le lieu saint![22]). On punit de mort ceux qui s’obstinaient à garder la religion du Dieu unique. Ces événements du passé sont l’image de ce qui se produira à la fin du monde, en raison de l’Antéchrist, non pas seulement à l’échelle du culte extérieur en Israël mais dans le temple des cœurs humains sur toute la terre. En s’appuyant sur ces textes et sur ce qui est discernable dans l’évolution du monde post-chrétien, essayons de nous faire une idée de l’œuvre de l’Antéchrist.

Lorsque, par suite de l’apostasie* grandissante dans le monde entier, les forces spirituelles de ceux qui adorent Dieu auront suffisamment diminué, Satan jugera que l’heure est venue. Les quatre royaumes annoncés à Daniel[23] symbolisent toutes les guerres, les idéologies, les forces de destruction qui ne cessent d’affaiblir l’Église et les religions[24]. Alors, Satan inspirera à un homme de commencer à agir. L’Antéchrist, car c’est de lui qu’il s’agit, entreprendra de parler à quelques personnes puis, très vite, à cause de la force de conviction de ses arguments, on viendra plus nombreux l’écouter. « Sa puissance croîtra en force, affirme Daniel[25], non par sa propre puissance ». C’est que, caché derrière lui, inspirant son discours et l’électrisant, Sa­tan sera présent. Il lui communiquera en raison de ses pouvoirs angéliques un extraordinaire charisme pour convaincre et les hommes sortiront après l’avoir écouté le cœur brûlant. La teneur de ses paroles semble pouvoir être résumée en deux parties. D’abord une lecture satanique de l’histoire de l’humanité; ensuite la proposition d’une nouvelle religion de l’Homme. Ses propos, comme ceux du serpent originel, mêleront vérité, interprétations tendancieuses et mensonges cyniques.

 

1- Lecture satanique de l’histoire

(Chose indécise)

 

Parmi les charmes séducteurs, Daniel et l'Apocalypse s'accordent à signaler, comme devant certainement présenter plus de dangers, le charme de la voix et de l'éloquence : Et il fut donné à la bête une bouche qui proférait de grandes choses[26]. De grandes choses !

 

“Depuis que le monde existe, les hommes se sont divisés et entretués. Ces guerres plaisaient aux Puissances mauvaises de l’au-delà dans la mesure où, divisant les hommes, elles pouvaient les maintenir dans l’humiliation et l’humilité[27]. Mais, malgré les fléaux que ces esprits mauvais ne cessait d’envoyer ou de permettre[28], l’humanité mûrit.

           L’âge des convoitises : Au début de l’humanité, on se battait pour conquérir la terre. On était animé par les trois convoitises bassement charnelles.

           L’âge des religions : En évoluant culturellement, les hommes ne perdirent pas leur zèle pour le pouvoir, les richesses et les plaisirs. Ils les mirent au service des religions. Les plus primitives soumettaient l’homme à des idoles de bois. Les plus élaborées eurent en commun de prêcher l’humilité, la négation de soi au profit d’un Dieu. De fait, elles ne visaient qu’à maintenir l’homme dans sa condition d’esclave. Sous le masque de l’agneau, elles servaient d’opium du peuple.

           L’âge des idéologies politiques : Pour se libérer, avec les siècles, l’humanité s’efforça de les rejeter. Croyant devenir plus libre, elle se donna à des utopies politiques. Elles furent nombreu­ses et insensées. Il en sortit des guerres encore plus terribles car on tuait tout homme qui pensait autrement, sans aucune limite, l’idole pouvant tout permettre.

           L’âge de l’humanisme sans Dieu : Dans une étape suivante, calmée par la vision des crimes, on inventa l’humanisme athée et le devoir de tolérance. On parla de l’urgence d’être heureux avant le vide du néant. On parla de paix, de respect d’autrui et on tenta de l’imposer à travers une autorité mondiale. Mais cet humanisme matérialiste finit par être partout rejeté car ils étaient sans espérance. C’est que « l’homme ne vit pas seulement de pain[29] ». Il a soif de vie éternelle. Il est un animal religieux.

           Parallèlement, la connaissance scientifique de la nature ne cessait de progresser. Devant sa complexité, on finit par comprendre que l’existence d’un créateur n’était pas un mythe. On découvrit la source profonde de l’éternel mal-être de l’homme. L’âme de l’homme, faite pour vivre libre et ne pas mourir, mourait du faux espoir où l’avaient plongée[30] les religions de la soumission et les idéologies anciennes. »

 

2- La proposition d’une nouvelle religion de l’Homme

(Chose indécise)

 

L'ange déchu ayant choisi l'Antéchrist comme chef visible de la suprême bataille à livrer contre le Christ et son Église, il lui communiquera quelque chose des charmes naturels et incomparables que l'Éden contempla autrefois avec étonnement dans Lucifer, charmes qui ne lui ont pas été retirés, mais dont il abuse pour faire le mal. Sous cette influence occulte, le sublime, dans la bouche du fils de perdition, s'unira au blasphème ; et cette tentation du sublime sera si attrayante, que les élus seraient séduits, si les élus pouvaient l'être[31].

        

« Arrivée à la plénitude du savoir et de l’expérience, l’heure est venue pour l’humanité d’adhérer à la sagesse qui peut la combler tout entière. Après des siècles d’errance, le monde est mûr pour se donner à la vraie religion, l’Évangile éternel voulu par le Créateur, celui qui libère l’homme de toutes ses peurs.

     Les faux Évangiles affirmaient que l’homme devait être un serviteur. Le vrai affirme qu’il a été créé pour être un dieu. Il a été fait pour la liberté et la puissance, pas pour la dépendance. Il le peut dès ici-bas.

     L’humanisme sans Dieu disait que la vie s’arrête avec la mort, plongeant l’humanité dans l’exclusive recherche du bonheur immédiat et dans la désespérance[32]. Au contraire, cette vie n’est qu’un commencement. Après la mort, l’homme vit[33]. De l’autre côté du voile, il lui est proposé, pour l’éternité, liberté et dignité. Cela se réalise très concrètement par l’apparition du dieu suprême, « celui qui porte toute vraie lumière »[34]. L’homme qui choisit la liberté, qui refuse librement la dépendance que lui propose le faux dieu[35], prolongera sa puissance[36] dans l’autre monde pour l’éternité, dans la communion intellectuelle avec le projet grandiose de l’Ange de Lumière.

     Ainsi pacifiée et maîtresse d’elle-même, l’humanité va enfin s’appartenir. Elle va se mettre debout. Libérée de l’angoisse du néant, en contact spirite avec l’autre monde, elle va connaître la pleine possession d’elle-même[37]. Rien ne lui sera plus impossible. L’humanité deviendra maîtresse de son destin, décidant elle-même ce qui est bien ou mal.»

 

Ce discours ressemble beaucoup à l’Évangile du Christ. On y parle même d’un Dieu, d’une vie après la mort. Il n’y a plus d’athéisme. Il est aisé de se laisser abuser, même en étant chrétien.

Le message de l’Antéchrist plaira. Rappelons qu’il s’adressera à une génération du futur, une génération qui n’aura plus de religion[38]. L’humanité le recevra avec enthousiasme car elle aura bu jusqu’à la lie le désespoir de l’humanisme athée. Il sera ressenti par la majorité des hommes comme vrai. Il enthousiasmera les nations* avides de bonheur, de liberté et surtout d’une espérance éternelle. Plus encore que les autres, une partie des chrétiens de cette époque se mettra au service de ce grand projet. Leur sens de l’amour du prochain les y poussera. « C’est l’Évangile de Jésus, les entendra-t-on proclamer partout. Jésus n’a pas voulu autre chose que cela. La gloire de Dieu, c’est l’homme debout ».[39]

Le texte de Daniel décrit cette séduction exercée sur le peuple de Dieu en ces termes: “Il détruira des puissants et le peuple des saints. Et, par son intelligence, la trahison réussira entre ses mains.[40]”. Car il s’agit d’une trahison, d’une apparence du christianisme dont j’ai montré la fausse ressemblance[41]. Très vite, poussé par l’enthousiasme des peuples séduits, l’Antéchrist progressera en popularité.

L’abbé Augustin Lemann[42] affirme comme une certitude que c’est au moyen de prodiges diaboliques que l'Antéchrist prétendra démontrer que sa religion est celle de Dieu. « L'avènement de cet impie aura lieu selon la puissance de Satan, avec toutes sortes de miracles, de signes et de prodiges trompeurs. [43]» « C'est par des miracles, dit-il, aussi nombreux qu'éclatants, que Jésus-Christ avait prouvé sa filiation et sa mission divines. « Les oeuvres que mon Père m'a données d'accomplir, ces oeuvres que j'opère, rendent témoignage de moi, et prouvent que c'est le Père céleste qui m'a envoyé » ; l'Antéchrist aura la prétention d'établir également sa fausse divinité sur des prodiges extérieurs. C'est avec l'aide de Satan, par sa puissance, qu'il les accomplira. Mais ces miracles seront-ils réels?

« On demande souvent, dit saint Augustin, si ces expressions de « signes ou prodiges trompeurs » veulent faire entendre l'inanité des prodiges dont l'Antéchrist abusera les sens de l'homme, toutes ces oeuvres n'étant qu'apparentes; ou bien est-ce à dire que la vérité même de ces miracles entraînera au mensonge ceux qui croiront y voir la présence de la force divine ? » Et l'illustre docteur répond : « on le saura plus tard[44] ».

Cet embarras a déterminé deux courants d'opinions. Les uns pensent que les miracles, accomplis par l'Antéchrist avec la puissance de Satan, seront réels, de vrais miracles et qu'ils entraîneront au mensonge, c'est-à-dire à la croyance de la divinité de l'Antéchrist. Les autres estiment que tous les miracles de l'Antéchrist seront mensongers, le démon illusionnant les sens de ses adeptes. Quel que soit le sentiment que l'on adopte, ce qu'il y a de certain, c'est que les prodiges accomplis par l'homme de péché, seront considérables, les mots accumulés de « miracles, signes, prodiges » marquant une multiplicité étonnante. »

 

Pourtant, une dernière fois, Dieu permettra que des voix s’élèvent pour manifester aux hommes la vraie nature de cet homme. Avec netteté et précision, ils profiteront des derniers moments de liberté pour prêcher. L’apocalypse de saint Jean* présente symboliquement ces voix sous la figure de deux témoins[45]. Ils ne sont pas autre chose que tous ceux qui, à cette époque avancée en apostasie*, auront gardé un sens suffisamment profond du projet de Dieu sur le monde pour l’expliquer. Ils sont, selon une expression de saint Paul[46]Tout ce qui porte le nom de Dieu ”, c’est-à-dire selon le Concile Vatican II[47], toute religion qui dispose l’homme à attendre le salut non de ses propres force mais de la grâce que Dieu donne aux humbles et aux assoiffés d’amour. La première d’entre toutes est évidemment la religion de Jésus puisqu’elle ne fait pas que disposer au salut mais le donne déjà à travers la prière du cœur et les sacrements de la charité. Ainsi, il est probable et même certain que Dieu suscitera un pape ou des apôtres qui diront: « Le salut oui! Mais avec le vrai Dieu! Ne confondez pas avec ce faux Dieu. Rappelez-vous l’avertissement de saint Paul: “Si un ange venu du ciel vous annonçait un évangile différent de celui que nous avons prêché, qu’il soit anathème![48]“ Dieu est humilité, amour jusqu’à mourir. Il n’est pas le Dieu du pouvoir et de la liberté orgueilleuse![49] »

Le vrai Évangile de Jésus sera prêché à tous. Chacun l’entendra (sans doute grâce aux moyens de communication encore plus développés que ceux d’aujourd’hui). Ainsi se réalisera une dernière fois la parole. « Il faut d’abord que l’Évangile soit prêché à toutes les nations.[50]» Pourtant, il ne sera pas reçu. Les hommes seront trop attachés à eux-mêmes pour se soucier ou désirer le vrai paradis céleste, celui de l’amour crucifié et ressuscité. Le message de l’Antéchrist correspondra beaucoup plus à leurs désirs. L’Église et le pape de cette époque seront pauvres et humbles de cœur comme jamais ils ne l’auront été au cours de l’histoire. Une si profonde qualité aura été préparée par les décennies précédentes et les humilia­tions de la progression de l’apostasie*. L’Église sera revêtue de l’esprit de douceur d’Énoch* et de la force d’Élie*. Mais l’Église ne sera pas seule. Les religions seront alors si faibles et si peu nombreuses en fidèles qu’elles ne songeront plus à se faire la guerre. Le vrai oecuménisme sortira des souffran­ces spirituelles de la fin. Les hindouistes prieront avec les chrétiens, les musulmans croyants avec les Juifs, chacun dans le respect des convictions de l’autre, unis dans la confession commune. «Le paradis n’est pas donné à l’orgueil. Il l’est à l’humilité ».

Le témoignage de l’islam sera devenu assez semblable à celui de l’Église, selon ce que j’ai cru pouvoir dire de ses épreuves futures[51]. Il aura appris la pauvreté et pureté de sa foi, à cause de l’apostasie de ses masses dégoûtées des crimes et des guerres du passé. Les derniers musulmans fidèles, rendus humbles par les malheurs subis dans leurs défaites militaires, diront: « Des membres de notre religion se sont conduits en fanatiques par le passé. Ils ont, par leur crime et les atrocités commises au nom d’Allah, précipité le rejet par les générations suivantes du nom de Dieu. Pardon pour leurs crimes. Dieu n’en fut pas responsable mais les hommes et leur orgueil. Le Dieu d’Abraham n’est pas ce Dieu du culte de l’homme. Il aime l’homme quand il est humble et miséricordieux. Il a créé l’homme et attend de lui adoration et soumission. Il nous donnera dans l’autre monde le bonheur éternel auprès de lui. »

A cette époque de la fin, Israël* sera en paix. D’après les prophéties, il sera revenu dans sa terre de Palestine, installé de nouveau dans Jérusalem unifié. L’attitude du peuple juif devant l’Antéchrist sera analogue à celle du reste du monde. La plus grande partie sera séduite par son message. Ils y verront même le Messie de la gloire annoncé par la Bible et qui doit venir pour régner sur toutes les nations, pour instaurer la paix. Quelques-uns, peu nombreux, resteront fidèles à la foi d’Abraham et des prophètes, dénonçant conjointement aux chrétiens et aux musulmans le faux messianisme, le « messianisme luciférien » de l’Homme impie.

Ce dernier combat spirituel sera terrible et sans merci. Il ne se fera pas d’abord avec des armes d’acier mais dans les cœurs. Aux yeux de Dieu, tout échec en ce domaine de la part du peuple de ses saints serait bien plus terrible que le meurtre car c’est de la vie éternelle qu’il s’agit. C’est pourquoi l’Apocalypse et les diverses prophéties de l’Écriture décrivent ces combats de l’Antéchrist comme des guerres et des meurtres abominables, inimaginables. De fait, il est probable que l’Antéchrist ne triomphera que par des armes spirituelles, celles de ses idées, de son intelligence, de ses ruses[52]. C’est ainsi. Plus l’humanité approchera de son terme et se spiritualisera, plus ses guerres seront celles de l’Homme sans Dieu contre l’Homme au service de Dieu. Ce sont les deux conceptions opposées du monde, celles de Dieu et celle de Lucifer. Elles sont, révélées à la face du monde de manière explicite, le combat sous-jacent, depuis la création du monde, toutes les tribulations de l’humanité. Alors sera réalisée la prophétie de saint Paul[53] : « Auparavant doit se révéler l’Homme impie, l’Être perdu, l’Adversaire, celui qui s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu ou reçoit un culte, allant jusqu’à s’asseoir en personne dans le sanctuaire de Dieu, se produisant lui-même comme Dieu. »

 

Jusqu’où iront les succès de l’Antéchrist?  [54]

 (Chose certaine pour l’aspect général, indécise pour le particulier)

 

La fin des nations, le gouvernement mondial

 

« Et la puissance fut donnée à la Bête sur toute tribu, sur tout peuple, sur toute langue, sur toute nation. » (Apoc., XIII, 7.)

 

Cette accumulation d'expressions ne laisse aucun doute sur l'universalité de l'empire de l'Antéchrist. Il deviendra, soit par lui-même, soit par ses lieutenants, maître du monde.

L’Histoire et le démon qui la manipule auront puissamment préparé les peuples au nouvel évangile de l’Homme libéré. Très vite, porté par l’enthousiasme des nations* devant son projet politique, l’Antéchrist étendra son pouvoir sur le monde entier: “Il consolidera une alliance avec le grand nombre[55]”. Il n’aura d’ailleurs que l’opposition de quelques groupes spirituels isolés à son action puisque le monde entier, disposé par des années d’apostasie*, sera en communion avec lui, selon saint Paul [56]: « Mais que seulement celui qui le retient soit d’abord écarté. Alors l’impie se révélera ».

Il sera très efficace. Soit lui personnellement, soit le courant de l’histoire qui l’aura précédé de peu, établira un gouvernement mondial. L’Évangile fait même de la disparition des nations l’un des signes important du temps de la fin. « Jérusalem sera foulée aux pieds par des païens jusqu’à ce que soient accomplis les temps des nations[57]. » Il semble que cet événement sera politiquement visible et qu’il s’accomplira parallèlement à la récupération par l’État d’Israël de la totalité de Jérusalem[58]. Intelligemment et avec respect des différentes mentalités humaines, le dernier Antéchrist centralisera le gouvernement du monde en un seul endroit. Il fera des nations (France, Belgique etc.) de simples provinces. Le but de cette œuvre sautera aux yeux de tous, bannir à jamais les guerres nationales ou religieuses. Les armées nationales seront dissoutes au profit d’un corps d’armée mondial chargé de bannir toute guerre locale. Ce sera une réussite. “ Quand les hommes diront paix et sécurité (...)”, commente saint Paul[59]. Il saura mettre les sciences et les techniques au service de tous. Il supprimera définitivement la famine. De même, la médecine fera reculer la maladie de manière unique et universelle. L’Antéchrist multipliera les lois de ce genre et il réussira. Il établira pour la première fois dans toute l’histoire de l’humanité une paix universelle. Chacun pourra le constater.

Ce sera bien sûr aux yeux de Dieu une fausse paix, c’est-à-dire non fondée sur la charité mais sur l’intérêt commun. Mais elle sera réelle, palpable. Le commerce mondial en sera dopé, le capital des anciennes nations croîtra sans effets pervers trop visibles, étant encadré par des lois sociales justes. Chacun sera obligé de constater la réalisation des promesses. On se réjouira en disant: « Maintenant que la paix est acquise sur le monde, rien ne sera plus impossible à l’homme, prolonger la durée de la vie, conquérir de nouveaux espaces habitables, vivre de loisirs dans le travail et de travail dans le loisir, profiter des joies les plus douces ou les plus fortes. Ce sera un véritable paradis sur terre. » La puissance de l’Antéchrist semblera alors définitivement consolidée devant les nations.

 

L’interdiction des religions

(Chose certaine pour le fait, indécise pour la manière)

 

Sûr de sa force, “ il s’exaltera dans son cœur et détruira un grand nombre par surprise[60]”. En effet, il saura discerner le risque considérable que représentent les restes des religions pour la durée de son oeuvre. Il sera intelligent et ne négligera pas la puissance des idées. Il connaîtra la faille de son système d’humanité coupée du vrai Dieu, cet­te soif insatiable du cœur de l’homme vers l’amour absolu, la Lumière infinie, en un mot vers le Dieu d’amour, le Dieu de Jésus-Christ. Sans doute ce danger lui paraîtra-t-il d’autant plus réel que l’Église, dans un dernier sursaut (les deux témoins), aura su prêcher avec un certain succès les failles présentes dans son humanisme en adoration devant le faux dieu froid du pouvoir et de la liberté solitaire. Aussi, appuyé sur ses premiers succès, il proposera aux peuples la loi suivante.

 

“Être debout, digne et maître de soi devant son éternité, voilà le bien le plus précieux de l’homme, celui qui lui permet de se réaliser en plénitude. Or, depuis des siècles les dirigeants religieux ou politiques ont abusé de la faiblesse des plus petits, de leurs angoisses, et leur ont proposé des systèmes de pensée qui les tenaient dans la dépendance. Souvenons-nous de l’Histoire. Nous devons protéger la liberté de nos enfants et leur éviter de se laisser séduire par les derniers adeptes de ces idéologies ou de ces sectes religieuses. En conséquence, et pour le bien de tous, il est temps d’établir une loi interdisant toute prédication publique ou privée des idéologies politiques et des sectes religieuses du passé. ”

 

Quelle sera la réaction des hommes devant une telle proposi­tion? Elle sera sans doute empreinte d’une certaine gêne, à cause de la liberté d’expression qui apparaîtra diminuée, et de cette nostalgie du vrai Dieu qui ne saurait être entièrement effacée de la nature humaine. Mais l’Écriture Sainte est formelle sur ce point. L’Antéchrist entre­prendra une lutte contre le peuple de Dieu[61] et réussira. C’est même, si l’on suit saint Paul et Daniel, le signe majeur qui devra précéder le retour du Christ: «Toutes ces choses s’achèveront quand sera ache­vé l’écrasement du Peuple Saint.[62] » En agissant ainsi, l’Antéchrist réalisera en plénitude les nombreuses prophéties de l’Écriture: « Il s’élève au-dessus de tout ce qui porte le nom de Dieu, il s’assoit en personne dans le sanctuaire de Dieu, il se produit lui-même comme Dieu.[63] » puisqu’il se juge digne d’établir sur l’univers les lois décidant de toutes choses, le bien et le mal, l’origine de la vie, son but et la manière de la vivre, le sens de la vie éternelle. Lorsque l’Écriture affirme qu’il établira son siège dans le sanctuaire de Dieu, elle ne veut pas signi­fier autre chose. Peut-être ira-t-il jusqu’à installer le siège de son gouvernement dans un lieu symbolique de ce pouvoir suprême (Jérusalem*, Rome) ? L’essentiel n’est pas là. L’essentiel est qu’il se produira comme le Maître suprême de la vérité (Magister), comme le berger de tous (Pastor Oves) et même comme l’organisateur de toutes les fêtes et réjouissance de l’hu­manité nouvelle (Pontifex maximus). Ces trois titres, attribués tradition­nellement aux papes de l’Église catholique, sont une délégation des titres de Dieu. En ce sens là, l’Antéchrist* sera le serviteur de l’Antidieu des derniers temps. On voit que celui qui, à cette époque, vivra profondément de sa foi chrétienne n’aura aucun risque de le confondre avec un vrai pape. C’est aussi en ce sens qu’il faut interpréter les prophéties de Jésus annonçant « l’Abomination de la désolation dans le temple saint »[64]. Ce serait un contresens d’imaginer la présence d’un Antipape légitimement élu par l’Église.

 

Le témoignage de la papauté et le martyre de l’Église[65]

(Chose certaine pour le fait, indécise pour la manière)

 

L’Antéchrist final installera sa royauté dans les cœurs humains et sur les nations. Sa religion sera de manière ultime celle du « 666* » puisque l’homme devenu Dieu adorera dans la paix la puissance de l’ange révolté. Ses méthodes ne laisseront place à aucune ambiguïté. Au contraire, le vrai pape et la vraie Église de cette époque auront à subir un martyre, très souvent annoncé par l’Écriture et qu’il faut contempler maintenant.

 

« Quand tu étais jeune, dit Jésus au pape Pierre[66], tu mettais toi-même ta ceinture et tu allais où tu voulais; quand tu seras devenu vieux, tu étendras les mains et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudras pas. Il indiquait ainsi, commente saint Jean, par quel genre de mort Pierre devait glorifier Dieu. Ayant dit cela, il lui dit: “suis-moi”. Se retournant, Pierre aperçoit, marchant à leur suite, le disciple que Jésus aimait, celui-là même qui, durant le repas, s’était penché sur sa poitrine et avait dit: «Seigneur, qui est-ce qui te livre? Le voyant donc, Pierre* dit à Jésus: Seigneur, et lui? Jésus lui dit: “S’il me plaît qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne, que t’importe? Toi, suis-moi”. Le bruit se répandit parmi les frères que ce disciple ne mourrait pas. Or Jésus avait dit à Pierre: «si Je veux qu’il demeure jusqu’à ce que je vienne”. et non: il ne mourra pas. »

 

Je l’ai dit, ce texte est l’annonce, sous forme symbolique, de la fin de l’Église. Il s’agit d’un exemple typique du style des prophéties de Jésus. Pierre* est vraiment mort martyrisé et Jean de vieillesse, le jour où le Seigneur est venu le chercher par son apparition à l’heure de sa mort. Pierre y figure comme le symbole de l’Église visible, hiérarchique. Cette partie de l’Église est composée de tous ceux qui ont reçu une mission officielle d’évangélisation dans le monde (pape, prêtres, évêques, personnes consacrées). Elle ne cesse de paraître aux yeux de tous par ses interventions extérieures, ses prédications. Jean symbolise pour sa ­part cette partie de l’Église qui se laisse moins voir car elle siège au fond du cœur des chrétiens par la prière. Jean ne fut-il pas le contemplatif par excellence, celui qui prit Marie* chez lui? Dans un autre sens et pour montrer la correspondance de toute l’Écriture, Pierre et l’Église hiérarchique sont Élie*, puisqu’ils doivent témoigner comme lui de la vérité devant les peuples. L’Église dans son intériorité est symbolisée par Jean est Énoch puisque, comme lui elle « marche avec Dieu[67] ». Ainsi, le texte de saint Jean raconte comment se produira le martyre final de l’Église.

Appuyé sur ses succès antérieurs, l’Antéchrist rendra les religions illégales dans le monde entier. Il fera adopter par toutes les nations « une interdiction définitive de prêcher ou de rendre un culte même privé à travers les anciennes religions liées à l’humilité ou à n’importe quelle divinité inventée par le passé. Seule la religion du Dieu de l’homme libéré de toute soumission sera tolérée ». Chacun sera invité à consacrer son temps à la construction du monde d’ici­-bas, au-delà des superstitions que la peur suscite. Le culte de Dieu ne pourra donc subsister qu’au fond de la conscience individuelle, domaine incontrôlable par définition aux autorités politiques. Les enfants devront être protégés des superstitions religieuses en foi de quoi il ne sera pas autorisé aux parents de les influencer par leurs propres croyances. Il n’est pas sûr que, dans le domaine privé, la contrainte de cette loi aille plus loin. Le monde de l’Antéchrist respectera les libertés privées. Ce sera même une de ses forces, accompagnée d’un réel bien-être matériel. Il ne sera d’ailleurs pas nécessaire de faire davantage. L’homme ne recherche pas le vrai Dieu quand il n’a pas besoin de lui pour être heureux. Par contre, au niveau politique, la loi sera sévère.

L’Écriture est nette sur ce point[68]: « La corne (la puissance de l’Antéchrist) grandit et s’éten­dit en direction du pays de la Splendeur (le pays où l’on adore Dieu, à savoir les religions et en premier celle du Christ). Elle grandit jusqu’aux armées du ciel (ceux qui servent Dieu), précipita à terre des armées (les apôtres qui luttent pour l’Évangile) et des étoiles (des docteurs qui enseignent la bonne direction à suivre) et les foula aux pieds. Elle s’exalta même contre le Prince de l’armée (le Christ), elle abolit le sacrifice perpétuel (pour les Juifs, il s’agit de l’holocauste du Temple et, pour les chrétiens, la messe et tous les sacrements de l’Église), et renversa le fondement de son autel (le pape sur qui l’Église est bâtie) et l’armée (les serviteurs de Dieu). Sur le sacrifice elle posa l’iniquité (c’est-à-dire qu’elle déclara mauvais tout culte divin) et renversa à terre la vérité. Elle agit et elle réussit ».

Ce texte comme tous les autres traitant du même sujet ne laisse aucun doute sur l’ampleur de la destruction opérée par l’Antéchrist. Il ne laissera rien subsister de l’Église vivante, surtout pas le sacerdoce. Il ne subsistera que les cadavres du passé (bâtiments du culte transformés à d’autres usages, écrits anciens transformés en pièces archéologiques). L’apocalypse décrit symboliquement ce fait. «Leurs cadavres demeurent exposés aux regards des peuples, des races, des langues et des nations, durant trois jours et demi, sans qu’il soit permis de les mettre au tombeau. Les habitants de la terre s’en réjouissent et s’en félicitent; ils échangent des présents, car ces deux prophètes leur avaient causé bien des tourments.[69]»

Rien ne permet d’être définitif sur les méthodes qu’il emploiera. Beaucoup de théologiens du passé affirmèrent à partir de ces textes et de la vie de saint Pierre qu’il s’agirait d’un martyre sanglant, d’une mise à mort physique des quelques milliers d’hommes que sont dans le monde le pape, les évêques et les prêtres. C’est une chose en définitive assez facile à réaliser dans un monde confiant devant sa liberté. Mais ce sens littéral du martyre n’est pas une certitude. Pour faire disparaître le sacerdoce de la vie des peuples, il suffit, après l’avoir vu s’affaiblir durant des siècles, de l’empêcher de s’exercer: convocation d’un faux concile oecuménique le ridiculisant, surveillance, emprisonnement, déportation, toutes méthodes policières dans un monde où rien n’est laissé au hasard[70]. Je ne peux affirmer qu’une chose de manière certaine. Vers la fin du monde, de par l’action de l’Antéchrist, le dernier pape vivra un sacrifice total dans son ministère désormais banni de la terre. Il sera crucifié comme saint Pierre dans son âme de pasteur (et peut-être aussi dans son corps). Afin que le caractère qui fait le prêtre ne subsiste en personne, il est possible que son martyre s’accompagne de celui des prêtres.

Pour se faire une opinion définitive, il convient ici de citer le texte d’une apparition privée officiellement reconnue par l’Église. Le troisième secret de Fatima[71]* est rapporté ainsi par Lucie[72].

 

« Après les deux parties que j’ai déjà exposées, nous avons vu sur le côté gauche de Notre Dame, un peu plus en hauteur, un ange avec une épée de feu dans la main gauche. Elle scintillait et émettait des flammes qui devaient, semblait-il, incendier le monde. Mais elles s’éteignaient au contact de la splendeur qui émanait de la main droite de Notre Dame en direction de lui. (Ceci semble signifier une intervention maternelle de la Vierge. Elle empêche la paternité de Dieu d’amender l’humanité en la frappant. Elle obtient de laisser agir patiemment la loi des conséquences du péché). L’ange, indiquant la terre avec sa main droite dit: “ Pénitence! Pénitence! Pénitence! ” Et nous vîmes, dans une lumière immense qui est Dieu quelque chose de semblable à la manière dont se voient les personnes dans un miroir, un évêque vêtu de blanc, nous avons eu le pressentiment que c’était le Saint-Père.

Nous vîmes divers autres évêques, prêtres, religieux et religieuses monter sur une montagne escarpée, au sommet de laquelle il y avait une grande croix en troncs bruts, comme s’ils étaient en chêne liège avec leur écorce. Avant d’y arriver, le Saint-Père traversa une grande ville à moitié en ruine et, à moitié tremblant, d’un pas vacillant, affligé de souffrance et de peine, il priait pour les âmes des cadavres qu’il trouvait sur son chemin. Parvenu au sommet de la montagne, prosterné à genoux au pied de la grande croix, il fut tué par un groupe de soldats qui tirèrent plusieurs coup avec une arme à feu et des flèches. Et de la même manière moururent les uns après les autres les évêques, les prêtres, les religieux et religieuses et divers laïcs, hommes et femmes de classe et de catégories sociales différentes. Sous les deux bras de la croix, il y avait deux anges, chacun avec un arrosoir de cristal à la main, dans lequel ils recueillaient le sang des martyrs et avec lequel ils irriguaient les âmes qui s’approchaient de Dieu. »

 

Une objection importante doit être faite ici. Parler d’un martyre de l’Église visible ne s’oppose-t-il pas à la promesse de Jésus faite à Pierre*: « Pierre, tu es pierre et sur cette pierre je bâtirai mon Église et les portes de l’enfer ne l’emporteront pas sur elle.[73] » Appuyé sur une telle parole, ne doit-on pas affirmer qu’il y aura toujours dans le monde un sacerdoce ministériel et donc un pape?

Pour répondre à cette objection, il convient de rappeler une autre promesse du même type faite à Marie au jour de l’Annonciation: « Il sera grand et sera appelé fils du Très-Haut. Le Seigneur lui donnera le trône de David son père, il régnera sur la maison de Jacob et son règne n’aura pas de fin ». Il convient de relire cette prophétie divine en regardant la croix de Jésus. Il existe une distance entre ce texte pris à la lettre et sa réalisation. Jésus est-il grand à la croix? Certainement pas extérieurement mais… spirituellement. Pourtant, Marie eut le cœur assez dilaté pour croire que les prophéties de gloire étaient accomplies ici et maintenant. A la fin du monde, il existera quelques chrétiens semblables à Marie qui comprendront, en contemplant le sacrifice final de Pierre, que les portes de l’enfer sont vaincues.

Il ne faut pas se tromper sur le sens réel des paroles de Dieu. Qu’on se souvienne du trouble analogue qui saisit la réflexion juive de l’Ancien Testament dans la tension d’une foi enseignant sans ambiguïté que “ Dieu comble de biens les hommes droits et renvoie les riches les mains vides ” et la constatation quotidienne de l’inverse. Cette dramatique expérience fut source d’une mutation spirituelle majeure depuis le livre de Job vers celui de la Sagesse, en préparation de la venue de Jésus. Au temps de leur gloire, les Juifs tuaient comme hérétiques les prophètes qui osaient annoncer, chose impossible en raison de la présence réelle de Dieu, la destruction du Temple de Jérusalem. Il fallut plusieurs ruines et déportations d’Israël* pour que certains comprennent que ce qui importe à Dieu, c’est le temple spirituel du cœur de chaque homme.

Il faut remarquer que Dieu se plaît dans d’apparentes contradictions. On en est frappé à l’évocation des nombreux exemples qui jalonnent l’Écriture ou la vie des saints. Jeanne d’Arc, demandant à ses voix si elle serait sauvée s’entendit répondre: « oui, par grande victoire! » Elle se réjouit fort, et se prépara à la venue de Charles VII, son roi. Le lendemain, elle était brûlée vive. Ses voix lui avaient-elles menties? Jeanne, dans un grand sanglot, le crut d’abord. Juste après sa mort, elle comprit à quel point ses voix avaient dit vrai, plus vrai qu’elle ne l’imaginait.

Pour le théologien, l’opposition apparente entre foi et réalité, loin d’être une torture, constitue le lieu théologique par excellence, le lieu des découvertes. Deux vérités apparemment contradictoires, dont l’une procède de la foi (les portes de l’enfer ne l’emporteront pas sur l’Église) et l’autre de l’expérience (l’Église disparaîtra de façon visible de la surface du monde) et qui sont comparables à deux silex durs qu’on frotte. La lumière en jaillit. Quand nous voyons horreur, martyre sanglant ou échec politique, Dieu voit victoire, règne éternel et gloire. Pour lui, la victoire réelle est celle qui se termine en Vie éternelle (donc, encore et toujours humilité et charité). Elles le seront de fait car le pape et le clergé de cette époque seront disposés à faire de leur sacerdoce et de leur vie une offrande d’amour, une dernière messe unie à la Messe éternelle de Jésus. Le Ciel entier sera ébranlé devant leur sainteté et le retour du Christ ne sera plus lointain. Tel est l’objet du chapitre suivant.

 



[1] Le chapitre qui suit peut paraître désespérant. En fait, il ne supprime pas l’espérance. Il montre qu’il n’y a pas d’espoir. Ces deux notions ne doivent pas être confondues. L’espoir vise une réussite terrestre. On espère, de cette manière, quand on est chrétien, que tous les hommes adhèrent à la foi dès cette terre. L’espérance, au contraire, vise une victoire éternelle. Elle n’attend que la victoire de Dieu, sachant qu’elle n’est promise dans sa plénitude que pour l’autre monde. Distinguer espoir et espérance est essentiel, sous peine de confondre le christianisme et son Royaume qui n’est pas de ce monde avec un millénarisme.

[2] Matthieu 24, 15.

[3] 2 Thessaloniciens 2, 1-12. Rappelons encore une fois, afin d’éviter le scandale de certains théologiens exigeants au plan de la précision, que ce genre de textes semble annoncer au sens premier littéral des évènements futurs. Bien que l’autorité de ces textes est la plus haute qui soit, ils doivent être utilisés avec prudence car leur sens est souvent, de par la volonté de Dieu, multiple. L’exemple de la fameuse parole de l’archange Gabriel à la Vierge Marie: « Ton fils régnera sur la maison de Jacob pour les siècles et son règne n'aura pas de fin. » (Luc 1, 33) le prouve. Marie aurait pu comprendre l’annonce d’une royauté terrestre, puis éternelle. L’ange ne parlait que d’abord d’une royauté spirituelle, par la croix, puis d’une royauté totale dans la gloire éternelle. Il était aisé de se tromper.

[4] D’après l’abbé Augustin Lemann, L’Antéchrist, 1905.

[5] 1 Jean 4, 3.

[6] 1 Jean 2, 18.

[7] Voir les génocides de Palestiniens commandés par Josué et Yahvé lors de la conquête de la terre sainte. Voir par exemple Josué 6, 17.

[8] De par sa canonisation, ses écrits et ses visions reçoivent une certaine autorité de l’Église dont le degré est précisé dans la dernière partie de cet ouvrage.

[9] Manuscrit des prophéties de sainte Odile qui, étant une sainte canonisée, a donc un certain niveau d’autorité dans ses écrits, niveau dont le degré n’apporte rien au contenu de la foi mais peut, dans le cas qui nous occupe, éclairer le mode de l’action de Dieu sur les générations humaines. L’original du texte est conservé à la Bibliothèque Nationale de France.

[10] Matthieu 10, 28.

[11] Luc 12, 4.

[12] Daniel 8, 22-26. Rappelons que ce genre de textes semble annoncer au sens premier littéral des évènements futurs. Bien que l’autorité de ces textes est la plus haute qui soit, ils doivent être utilisés avec prudence car leur sens est souvent, de par la volonté de Dieu, multiple et ambigu. La parole suivante de Jésus « Il annonçait par quel genre de mort Pierre devait glorifier Dieu » (Jean 21, 19) l’indique. Il parlait certes de la mort de Pierre (sens littéral historique)… Il parle sans doute aussi de l’Église, dans sa partie visible et sacerdotale.

[13] « Ce sera pendant ce temps que naîtra l’Antéchrist, d’une religieuse hébraïque, d’une fausse vierge qui aura communication avec le vieux serpent, le maître de l’impureté. Son père sera év. (évêque). En naissant, il vomira des blasphèmes. Il aura des dents. En un mot, il sera le diable incarné. Il poussera des cris effrayants, il fera des prodiges, il ne se nourrira que d’impuretés. Il aura des frères qui, quoiqu’ils ne soient pas comme lui des démons incarnés, seront des enfants du mal. A douze ans, ils se feront remarquer par leurs vaillantes victoires chacun à la tête des armées, assistés par les légions de l’enfer. »

[14] 2 Thessaloniciens 2, 9: « Sa venue à lui, l’Impie, aura été marquée, par l’influence de Satan, de toute espèce d’œuvres de puissance, de signes et de prodiges mensongers. »

[15] Voir par exemple Apocalypse 19, 20.

[16] Il s’agit d’abord d’observations théologiques. Dieu aime donner des prophéties dont le sens est d’abord symbolique. Mais il se plaît à les réaliser matériellement. Il y a de plus une série d’observations sociologiques: l’humanité peut se laisser entraîner à tout, jusqu’à la folie.

[17] Voir chapitre 4, fin, le dernier des antichristianismes.

[18] Matthieu 24, 15.

[19] Daniel 9, 26-27.

[20] Daniel 12, 5-13.

[21] 1 Mac. 1, 41-64. 2 Mac. 6, 1-9.

[22] Matthieu 24, 15.

[23] Daniel 8, 22.

[24] Voir chapitre 4. Voir aussi notre description du « Temps de l’apostasie en marche ».

[25] Daniel 8, 23.

[26] Apocalypse 13, 1-8 ; Daniel7, 20-26.

[27] Genèse 3, 3. Tout au long de l’Écriture Sainte, Dieu frappe l’homme de divers fléaux. Son but n’est pas de le rendre esclave mais de façonner son cœur dans l’humilité, l’amour, afin de le sauver.

[28] Apocalypse 16, 9. Face à des cœurs orgueilleux, l’expérience de la souffrance peut avoir l’effet inverse: elle durcit la peau et fortifie la dureté du cœur.

[29] La parole de Jésus en Luc 4, 4 est citée à cause de sa vérité devenue évidente après l’échec des matérialismes. Mais elle est dévoyée au service d’une autre religion, celle de l’ange des ténèbres. Le démon n’a pas intérêt à nier la vérité. Il ne fait que la détourner de son but. Le paradis qu’il propose à l’homme est réel en ce sens qu’il est une vie éternelle indépendante et libre. Mais c’est en vérité un enfer (l’enfer tel que le définit l’Église catholique) où le cœur brûle car l’amour y est rejeté.

[30] Nous l’avons montré, l’idéologie de l’Antéchrist n’est pas dénuée de vérité. La révolte première de Lucifer n’était pas dénuée de noblesse. Mais la valeur qui la motive est bien l’inverse de celle de Dieu.

[31] Citation de l’abbé Augustin Lemann, L’Antéchrist, 1905.

[32] Auguste Comte avait annoncé cette nécessité historique de la fin des religions. Selon lui viendra bientôt un âge définitif de l’humanité. Ce sera la fin de l’histoire. Les humains renonceront définitivement à se questionner sur les pourquoi de l’existence. Ils comprendront à quel point cela n’a pas de sens. Enfin mûris, ils ne chercheront qu’à s’attaquer aux « comment » : Comment faire disparaître la guerre, la famine, les maladies ? Le dernier des ennemis sera celui-ci : Comment détruire biologiquement la mort ? Grâce à la science, l’humanité réussira. Ce sera l’ère de la paix définitive, l’âge poste-moderne, la fin de l’histoire. Il a profondément tort. Il oublie que l’homme est fondamentalement religieux. Il se pose forcement les « pourquoi ». Mais les réponses peuvent être multiples. La dernière semble être la religion de Lucifer : vie éternelle dans la liberté totale…

[33] Le mystère de l’iniquité, tel que je l’ai montré dans l’histoire de Lucifer, n’est pas un athéisme. C’est une religion qui parle de vie éternelle. Mais la vie proposée par Satan n’a rien à voir avec celle de Dieu. Sa dignité n’est pas celle de l’amour poussé jusqu’au mépris de soi… Elle est liée au culte de sa grandeur individuelle. En conséquence, il est possible que l’un de ses dogmes fondamentaux annonce une forme de réincarnation personnelle sur terre. Il ne s’agit pas de la réincarnation telle que la conçoivent les hindouistes ou les bouddhistes. Pour ces sagesses, la réincarnation est la punition d’un manque d’anéantissement de soi, donc d’humilité. Pour l’Antéchrist, la réincarnation sera plutôt annoncée comme une espérance de l’individualisme, dans le style de l’espérance New Age.

[34] En latin, Lucis ferro, Lucifer. Satan redevient ce qu’il était à l’origine: un être intelligent et spirituel. Il « rampa sur son ventre » pendant des siècles, c’est-à-dire qu’il tenta l’homme charnellement, uniquement parce que c’était le meilleur moyen de faire tomber des peuples vulgaires. A la fin du monde, il s’adressera à des peuples cultivés. Il parlera donc en vérité de son projet de paradis fondé sur la noblesse des intelligences.

[35] Sous-entendu Jésus-Christ et son message d’humilité et d’amour.

[36] Il est intéressant de remarquer que, pour plusieurs messianismes temporels, annonçant pour bientôt un paradis religieux sur terre avec le Christ (par exemple les témoins de Jéhovah), il sera aisé de confondre ce faux Messie et le vrai.

[37] Voir Genèse 11, 9: Dieu divisa l’humanité à Babel pour l’empêcher de s’unir et de se croire toute puissante. Son but n’était bien sûr pas la préservation égoïste de sa primauté mais le salut éternel de l’homme.

[38] Saint Paul explique que l’adhésion à l’Évangile de l’homme impie ne peut venir qu’après la disparition de la vraie religion de Dieu. Voir la deuxième lettre aux Thessaloniciens, 2, 6-8: «Vous savez ce qui retient aujourd’hui l’apostasie et l’Homme impie, de façon qu’il ne se révèle qu’à son moment.. »

[39] Un texte de l’Apocalypse de saint Jean 13, 15 : « On lui donna même d'animer l'image de la Bête pour la faire parler, et de faire en sorte que fussent mis à mort tous ceux qui n'adoreraient pas l'image de la Bête. » La bête est Lucifer (c’est le dragon rouge-feu de la Bible). L’image de la bête est l’idéologie qui motiva sa révolte originelle contre Dieu. Mais c’est aussi, très matériellement, le monde des dinosaures, ces dragons disparus depuis 65 millions d’année. Il y aura certainement à cette époque des correspondances très curieuses, comme la renaissance par l’image ou même par génie génétique de certaines de ces espèces du passé, afin que tous les hommes, même les moins réfléchis, ne soient pas totalement étrangers aux signes des temps.

[40] Daniel 8, 24.

[41] On peut les distinguer avec facilité en considérant l’ordre d’importance donné aux vertus: Dans cet évangile luciférien, la première est la liberté, la deuxième est la puissance. La concorde entre les hommes ne vient qu’en fonction de ces deux principes. L’Évangile du Christ est celui de la petitesse et de l’amour poussé, s’il le faut, jusqu’au mépris de sa propre liberté.

[42] L’Antéchrist, 1905.

[43] II Thessaloniciens, 2, 9.

[44] S. Augustin, La cité de Dieu, liv. XX, n° XX.

[45] Apocalypse 11.

[46] 2 Thessaloniciens 2, 4.

[47] Décret sur les religions non chrétiennes.

[48] Galates 1, 8.

[49] Anne-Catherine Emmerich (citée à titre de simple témoignage, sans qu’il lui soit attribué d’autorité)* vit au XIXème siècle ce dernier antichristianisme sous la forme de la fameuse prostituée de l’Apocalypse : « Mais cette ignoble fiancée voulait se marier et, qui plus est, à un jeune prêtre pieux et éclairé. Je crois que c’était un des douze que je vois souvent opérer des œuvres importantes sous l’influence de l’Esprit Saint. Il s’était enfui de la maison à la vue de cette femme. Elle le fit revenir en lui adressant les paroles les plus flatteuses. Quand il arriva, elle lui montra tout et voulait tout remettre entre ses mains. Il s’arrêta quelque temps. Puis il prit un air grave et très imposant. Il la maudit ainsi que tous ses manèges, comme étant ceux d’une infâme courtisane et se retira. » (Vie d’Anne-Catherine Emmerich, Téqui, 1950, Tome 2, p. 398). Ce texte représente bien cette dernière parole de la vraie Église au temps de l’Antéchrist.

[50] Marc 13, 10.

[51] Chapitre 5.

[52] Daniel 8, 25.

[53] 2 Théssaloniciens 2, 4.

[54] …ou de ce qui précèdera sa venue, le dernier des antichristianismes.

[55] Daniel 9, 26.

[56] 2 Thessaloniciens 2, 6-8.

[57] Luc 21, 24.

[58] Nous avons montré que toutes les prophéties de Jésus concernant Israël ont en premier lieu un sens politique. Elles sont datables dans leur réalisation. L’histoire qui est en marche permet de deviner les grandes lignes des évènements à venir: Jérusalem* est aujourd’hui divisée en deux. Une partie est tenue par les Juifs, l’autre partie par les Palestiniens chrétiens et surtout musulmans, eux que l’Ancien Testament appelle les « gentils » (les peuples). Or les guerriers musulmans sont en train de se rendre odieux aux yeux des nations coalisées. Y aura-t-il guerre, crime puis défaite de l’islamisme et, avec lui, parce que l’histoire aime peu les nuances, de l’islam? Si c’est le cas, il est peu probable qu’une mosquée continue à trôner sur le mont du Temple. Si, au cours du XXIéme siècle, une nation ou un groupe musulman prend l’initiative du terrorisme nucléaire, il provoquera non seulement une réaction nucléaire mais, à court terme, la fin du système politique des nations et à moyen terme, le rejet des religions dans leur ensemble.

[59] l Thessaloniciens 5, 3.

[60] Daniel 8, 25.

[61] « Tout ce qui porte le nom de Dieu », donc tout ce qui peut conduire au minimum à l’humilité, au maximum à l’amour de Dieu.

[62] Daniel 12, 7.

[63] 2 Thessaloniciens 2, 4.

[64] Matthieu 24, 15.

[65] Le secret de la Salette décrit cette époque: « Le Vicaire de mon Fils aura beaucoup à souffrir, parce que pour un temps l’Église sera livrée à de grandes persécutions. Ce sera le temps des ténèbres. L’Église aura une crise affreuse. La sainte foi de Dieu étant oubliée, chaque individu voudra se guider par lui-même et être supérieur à ses semblables. On abolira les pouvoirs civils et ecclésiastiques, tout ordre et toute justice seront foulés aux pieds. On ne verra qu’homicide, haine, jalousie, mensonge et discorde, sans amour pour la patrie et la famille. Le Saint-Père souffrira beaucoup. Je serai avec lui jusqu’à la fin pour recevoir son sacrifice. Les méchants attenteront plusieurs fois à sa vie sans pouvoir nuire à ses jours. Mais ni lui, ni son successeur ne verront le triomphe de l’Église de Dieu. »

[66] Jean 21, 18-23.

[67] Genèse 5, 24.

[68] Voir Daniel 8, 9.

[69] Apocalypse 11, 9.

[70] Voir L’anneau du pécheur de Jean Raspail, qui raconte la manière dont disparut du monde visible la papauté* d’Avignon.

[71] Apparition reconnue canoniquement par l’Église. Les textes cités ont une certaine autorité dont le degré est rappelé en fin d’ouvrage. La béatification de deux des trois voyants montre l’importance que donne l’Autorité apostolique romaine à cet événement.

[72] Dévoilé au monde le 26 juin 2000 par le pape Jean-Paul II. Mon opinion est que ce secret ne concerne pas le passé. Elle diffère en cela de celle du cardinal Ratzinger (commentaire du secret, 26 juin 2000). Sa portée me semble être beaucoup plus grande que l’attentat de 1981 contre Jean-Paul II. Le fait que les autorités de Rome le rangent dans les faits passés n’est-il pas lié à cette parole de Jésus en Jean 21, 18 : « Quand tu auras vieilli, tu étendras les mains, et un autre te ceindra et te mènera où tu ne voudrais pas. »

[73] Matthieu 16, 18.